Ligue de Délos 6: Guerre de Décélie et Chute d'Athènes

Article

Christopher Planeaux
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 30 septembre 2016
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Disponible dans ces autres langues: anglais

Ce texte fait partie d'une série d'articles sur la Ligue de Délos.

La sixième et dernière phase de la Ligue de Délos commença par la guerre de Décélie, également appelée guerre ionienne, et se termina par la reddition d'Athènes (413/412 - 404/403 av. J.-C.). Les neuf dernières années de la Ligue furent les plus chaotiques pour l'alliance dans son ensemble. Elle subit des revers de fortune répétés, tandis que le contrôle réel de la Ligue de Délos passa parfois entre la polis d'Athènes et la flotte athénienne opérant dans la mer Égée. Bien que les deux hégémons aient fait la paix au printemps 421 avant notre ère, cette paix avait effectivement pris fin à la fin de l'été 418 avant notre ère, lorsqu'un contingent athénien se battit aux côtés d'Argos et de Mantinée contre Sparte au cours de l'été 418 avant notre ère. Nous disposons de peu de preuves, mais l'évaluation de 421/420 avant notre ère montre également que les dispositions athéniennes avaient peu changé depuis l'évaluation de 425 avant notre ère.

Ancient Naval Battle
Bataille navale antique
The Creative Assembly (Copyright)

Sur les conseils d'Alcibiade, qui avait fait défection à Sparte après s'être enfui de Sicile, le roi Agis s'empara de Décélie (413 av. J.-C.). Décélie se trouvait à 14 miles (environ 22 km) au nord-nord-est d'Athènes. Une garnison péloponnésienne permanente privait Athènes de tout territoire à l'extérieur des murs ainsi que de l'accès à l'Eubée. 20 000 esclaves, dont beaucoup travaillaient dans les mines d'argent voisines, désertèrent la polis. Thèbes confisqua rapidement la plupart du matériel et des provisions abandonnés dans la campagne attique. Les Athéniens réagirent à nouveau en envoyant 30 trières et une force d'hoplites argiens pour effectuer des raids sur la côte laconienne. En outre, la Ligue de Délos disposait de petites forces opérant dans le golfe Thermaïque et en Ionie. Même si le gros de la flotte athénienne était engagé en Sicile, les faits montrent qu'Athènes ne souffrait pas d'un mécontentement généralisé de la part de ses alliés de la mer Égée à cette époque.

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Désastre en Sicile

Alors que le roi Agis préparait son fort, les Péloponnésiens préparaient des renforts supplémentaires pour Syracuse: 25 trières corinthiennes avec de nombreux transporteurs de troupes, 600 Hilotes, 500 hoplites corinthiens, 300 béotiens et 200 sicyoniens, ainsi qu'un certain nombre de mercenaires arcadiens. Ils se glissèrent devant les 20 trières athéniennes à Naupacte. Lorsque la nouvelle des troubles de Nicias en Sicile parvint à Athènes, les Athéniens préparèrent d'autres renforts de la Ligue: 60 trières, 5 navires de Chios, 1 200 hoplites athéniens et des soldats alliés supplémentaires. Cette force, cependant, s'arrêta pour participer aux raids laconiens, puis pour s'emparer de l'isthme de Cythère et le fortifier. La logique demeure nébuleuse et ils n'obtinrent que peu d'avantages en retour. La flotte s'arrêta ensuite pour rassembler les forces alliées de Zante, de Céphallénie, de Messénie et d'Acarnanie.

Après avoir laissé dix navires pour aider Corcyre, la flotte finit par se diriger vers la Sicile. Mais à son arrivée, la situation des alliés s'était nettement détériorée. Les Syracusains, aidés par des arrivées péloponnésiennes, poussèrent les forces de la Ligue délienne sur la défensive. Bien que les sources attestent de certaines défections parmi les soldats alliés, les contingents alliés dans leur ensemble restèrent loyaux. Même lors de la retraite finale, la majorité d'entre eux refusa de se rendre ou de faire défection. Néanmoins, les Syracusains et les Péloponnésiens mirent en déroute et détruisirent l'ensemble des forces de la Ligue de Délos à la rivière Assinaros.

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Suites de l'expédition de Sicile

Lorsque la nouvelle de la catastrophe parvint en Attique, personne ne crut aux premiers rapports. Néanmoins, le désastre en Sicile avait complètement décimé les ressources de la Ligue de Délos et avait ainsi paralysé le pouvoir d'Athènes. L'incrédulité se transforma rapidement en colère, puis en terreur. Les Syracusains et les Péloponnésiens avaient détruit ou capturé au moins 216 trières, dont 160 athéniennes. Athènes perdit également 3 000 hoplites, 9 000 thètes et des milliers de métèques. La cité ne possédait plus que 100 trières dans les docks du Pirée, toutes plus ou moins délabrées les unes que les autres, et n'avait pratiquement plus de trésorerie pour effectuer les réparations nécessaires ou engager de nouveaux équipages.

Greek Trireme Shipsheds
Hangars à trières grecques
Zea Harbour Project (Copyright)

Les listes de tribut montrent en fait que la ligue de Délos ne disposait que de 444 talents, bien qu'elle ait encore collecté environ 900 talents par an à cette époque. Cependant, elle n'avait plus de flotte pour assurer ces collectes. De plus, l'armée spartiate à Décélie avait enfermé les Athéniens dans la polis et les avait privés de leurs mines et de leurs terres agricoles. Plusieurs alliés se livrèrent bientôt une concurrence acharnée pour se révolter les premiers: Eubée, Chios, Lesbos, Rhodes, Milet et Ephèse. Les Spartiates calculèrent qu'ils pouvaient désormais déposer Athènes et "conserver en toute sécurité l'hégémonie sur les Hellènes" (Thuc. 8.2.2-4). La Ligue de Délos semblait menacée d'effondrement.

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Les Athéniens, cependant, étaient déterminés à faire tout ce qui était en leur pouvoir. Ils commencèrent par élire un conseil de dix anciens chargés de conseiller et de tempérer les passions de l'Ekklesia. Ils prirent toutes les mesures nécessaires pour se procurer du bois, préparer une nouvelle flotte, s'occuper de l'alliance, et envisagèrent de puiser dans la réserve de "fer" de 1 000 talents de la Ligue tout en réduisant les dépenses publiques. Ils abandonnèrent le fort de Laconie et en construisirent un à Sounion pour protéger les cargaisons de céréales importées de la garnison spartiate de Décélie.

Nouvelle réorganisation de la ligue de Délos

En outre, les Athéniens instituèrent le changement logistique le plus radical tenté pour financer la Ligue de Délos: ils annulèrent les tributs, qui avaient pris une connotation considérablement négative à cette époque, et imposèrent à la place un prélèvement de 5% sur tous les biens d'import-export transportés par mer (413 av. J.-C.). Ce nouveau système de financement de l'alliance permit d'augmenter les recettes, mais nécessita un contrôle plus précis de la collecte. Forts d'une bureaucratie en place depuis plus de 60 ans, les Athéniens pensaient être à la hauteur de la tâche. Les faits montrent cependant qu'ils rencontrèrent des succès variables et limités. Bien qu'ils n'aient jamais officiellement annulé l'impôt, ils rétablirent le tribut pour au moins certains membres de la Ligue en 407 avant notre ère.

Malgré la résurgence de la détermination athénienne, Sparte semblait sur le point de remporter la victoire (412 av. J.-C.). Le roi Agis rétablit la colonie d'Héraclée et contraignit les Achéens ainsi que d'autres alliés des Thessaliens à livrer des otages. L'Eubée, Lesbos, Chios et l'Erythrée offrirent leur aide en échange du soutien spartiate. Malheureusement pour la ligue du Péloponnèse, la guerre de Décélie se déplaça désormais vers l'est de la mer Égée.

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Ligue de Péloponnèse et la Perse

L'alliance spartiate s'avéra encore mal adaptée pour soutenir des opérations outre-mer. Sparte manquait de navires, de commandants navals expérimentés et, surtout, de financement. La Ligue du Péloponnèse n'avait pas de revenus réguliers ni de réserves. Une flotte importante et prête à l'emploi nécessitait des équipages qui devaient être payés régulièrement. Des salaires réguliers nécessitaient des subventions régulières. Les Spartiates ne réussirent à engager que 39 trières.

Pour faire face aux contraintes financières, la Ligue du Péloponnèse se tourna vers l'argent perse. Malgré l'hésitation, l'opportunisme, voire la suspicion, les Spartiates finirent par négocier trois traités avec le roi de Perse. L'attention de la Perse restait cependant divisée entre deux satrapes rivaux: Tissapherne à Sardes voulait concentrer la guerre en Ionie, tandis que Pharnabaze à Dascylion voulait concentrer les efforts en Carie - et tous deux voulaient récupérer les poleis grecs que l'Empire perse avait perdus au profit de la Ligue de Délos à la suite de sa deuxième invasion ratée.

Les avantages tactiques immédiats dont jouissait Sparte révélèrent également une faiblesse stratégique sous-jacente inhérente. L'Eubée et Lesbos avaient fait appel au roi Agis à Décélie, tandis que la Perse, Chios et l'Erythrée s'adressaient directement à Sparte et présentaient leurs arguments aux éphores. Comme ces deux centres de pouvoir étaient en proie à des rivalités de longue date et à des désaccords fréquents, il fallut des mois à Sparte pour formuler une politique cohérente. La Ligue du Péloponnèse, toujours sur les conseils d'Alcibiade, finit par voter en faveur d'un départ pour Chios afin d'établir une base d'opérations à l'est et, de là, d'inciter à la rébellion dans la région, mais le départ fut retardé.

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Guerre Égéenne et Ionienne (412 av. J.-C.)

Les Athéniens, avec l'aide des Macédoniens, commencèrent à mettre sur pied une nouvelle marine et, après avoir intercepté la première flotte spartiate qui se dirigeait vers Chios, poursuivirent les Péloponnésiens jusqu'au fort déserté de Spiraeum, juste au nord d'Épidaure. Ils détruisirent les navires péloponnésiens. Les Athéniens bloquèrent alors le passage, coupant les navires corinthiens de la mer Égée. Une petite flotte spartiate de 5 trières, toujours sur les conseils d'Alcibiade, passa le blocus et arriva à Chios, ce qui provoqua une rébellion ouverte. Erythrée se joignit à la révolte et le mécontentement s'étendit bientôt à Clazomènes, Lebedos, Haere, Anea et Ephèse. Milet, le joyau de la mer Égée, suivit. Les Spartiates commandaient alors 23 trières dans la région.

Athènes ne tarda pas à réagir. Les deux flottes athéniennes déjà déployées choisirent de jeter l'ancre à Samos. La force comptait 28 trières. 19 navires partirent pour intercepter la flotte péloponnésienne à Milet, mais arrivèrent trop tard; ils se tournèrent vers Lade, où ils bloquèrent les Milésiens, tandis qu'une force péloponnésienne de 13 trières fit entrer Méthymne et Mytilène en rébellion.

Les Athéniens décidèrent de puiser dans la "réserve [de fer] d'urgence" et de construire encore plus de navires (Thuc. 8.19.3-4). Pendant ce temps, une flotte de renfort composée de 16 trières de la Ligue délienne arriva à Samos, suivie peu après par une force de dix trières. Cette flotte athénienne désormais importante incita Samos à éclater en une révolution impitoyable. La nouvelle faction établit une démocratie forte. Les Athéniens, à leur tour, leur accordèrent l'indépendance. Samos étant désormais une base d'opérations sûre pour la flotte déployée de la Ligue délienne, les Athéniens entreprirent d'inverser les pertes subies.

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Greek Warships
Navires de guerre grecs
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Pendant ce temps, les Péloponnésiens brisèrent le blocus de Spiraeum. Quatre navires parvinrent à Chios. Ils débarquèrent à Lesbos le jour même de l'arrivée des Athéniens avec 25 trières. Bien que les Spartiates aient convaincu Phocée et Cyme de se révolter, les Athéniens vainquirent la flotte de Chios dans le port, remportèrent une bataille terrestre acharnée et s'emparèrent rapidement de la principale polis de Lesbos. Les Athéniens reprirent ensuite Clazomènes et naviguèrent vers Chios. Ils débarquèrent sur les îles Oenessae, où ils mirent en place un blocus et menèrent des raids. Les Athéniens réussirent alors à bloquer les deux principales poleis de la région: Chios et Milet. Plus tard dans l'année, de nouveaux renforts athéniens composés de 48 navires (trières et transporteurs de troupes) arrivèrent à Samos avec 3 500 hoplites: 1 000 Athéniens, 1 000 Égéens et 1 500 Argiens. Cette force assiégea bientôt Milet (412 av. J.-C.).

Les renforts péloponnésiens débarquèrent à leur tour sur Leros: 33 navires complétés par 20 trières syracusaines et 2 trières séléniennes. Les Athéniens abandonnent le siège, ce qui irrite les Argiens, qui rentrent chez eux, tandis que les Péloponnésiens livrent Iasus au satrape perse Tissapherne. 12 trirèmes supplémentaires de Thurii, de Laconie et de Syracuse arriveront plus tard à Cnide, que Tissapherne avait déjà incité à se rebeller contre la ligue délienne. Bien que Sparte reconnaisse les revendications perses sur les poleis grecques d'Asie, les Spartiates n'ont pas consulté ces Grecs. Les accords de Sparte avec la Perse tournent en dérision la libération promise par Sparte. Athènes, quant à elle, s'allie aux poleis qui résistent à la Perse contre Tissapehernes.

Alcibiade en Perse et siège de Chios

Le redressement d'Athènes, un an après son désastre en Sicile, s'avéra tout à fait extraordinaire. Dans le même temps, les Spartiates se méfiaient d'Alcibiade. Il semblait trop intelligent pour eux; ils lui en voulaient de sa vanité, en vinrent à se méfier de lui et ordonnèrent qu'il soit tué. Alcibiade, comprenant qu'il avait perdu la confiance des Spartiates, s'enfuit à Sardes et commença à conseiller Tissapherne. Alcibiade, qui souhaitait désormais retourner à Athènes, convainquit Tissapherne de se montrer dilatoire et évasif, au point de frustrer les chefs spartiates. Tissapherne réduisit leur solde, puis les paya de manière irrégulière. Le satrape retira également tout soutien militaire direct afin d'encourager les ligues délienne et péloponnésienne à s'affronter et à épuiser ainsi leurs ressources.

Cet hiver-là, la flotte péloponnésienne, qui comptait désormais 80 navires, resta inactive à Milet, tandis que des renforts athéniens de 35 trières arrivèrent à Samos. La ligue de Délos disposait alors de 104 navires dans la mer Égée. Le reste de la flotte péloponnésienne, ancrée à Chios (16 trières), tenta divers raids sur les côtes voisines, mais sans grand résultat. Les Athéniens, quant à eux, choisirent de déployer leur flotte: 30 trières à Chios et 74 à Milet.

Alcibiades
Alcibiade
Bija (CC BY)

Les Spartiates restaient divisés. Le gouverneur spartiate de Chios et son commandant naval n'étaient pas d'accord sur l'opportunité d'aider Lesbos dans sa rébellion contre la Ligue de Délos. La force péloponnésienne de Cnide se sépara en deux contingents: l'un pour protéger la polis et l'autre pour mener des raids sur les cargaisons en provenance d'Égypte. Les Athéniens, quant à eux, construisirent un fort à Chios. La flotte spartiate de Milet refusa d'intervenir. Pendant ce temps, une autre flotte spartiate de 27 trières arriva à Caunos. Après une brève escarmouche entre une flotte péloponnésienne de 64 navires envoyée de Milet et une flotte athénienne de 20 navires envoyée de Samos, les Spartiates amenèrent leurs flottes désormais combinées de 94 navires à Syme et se rendirent ensuite à Camiros sur Rhodes. Pendant ce temps, les Athéniens achevèrent leurs fortifications à Chios et l'île commença à souffrir de la famine (411 av. J.-C.). Les Spartiates auraient tenté de lever le blocus, mais ils craignaient une bataille navale ouverte contre une flotte athénienne et se retirèrent donc à Milet.

Le nouveau traité de Sparte avec la Perse abandonna l'Ionie et les Spartiates se tournèrent vers Abydos dans l'Hellespont. Cette ville se rebella bientôt contre la Ligue de Délos, suivie peu après par Lampsasque, mais les Athéniens la récupèrent rapidement. Au même moment, une flotte péloponnésienne de 35 trières, dont 5 de Thurii, 4 de Syracuse et 1 d'Anéa, se battit contre une flotte athénienne de 32 navires, dont des navires de transport de troupes, et obtint un match nul.

Les Quatre-Cents et les Cinq-Mille (411 av. J.-C.)

En 411 avant notre ère, les maladresses de la démocratie athénienne avaient suscité un mécontentement croissant parmi les Athéniens à l'esprit oligarchique. Les politiques d'Athènes semblaient insensées et leurs exécutions incompétentes. En outre, la flotte de la Ligue, qui opérait à partir de Samos, n'avait pas réussi à récupérer Milet et les rébellions s'étaient à nouveau propagées sur l'Hellespont. Ces résultats menaçaient la ligne de vie athénienne à partir de l'Euxine.

Athènes subit deux brèves révolutions oligarchiques: Les Quatre-Cents, suivies peu après par le gouvernement des Cinq-Mille. Les Quatre-Cents entamèrent immédiatement des négociations avec le satrape perse Tissapherne et le roi spartiate Agis. Le nouveau régime s'engagea en outre à assurer la sécurité de la Ligue avec des oligarchies similaires, mais les Athéniens de la flotte de la Ligue stationnée à Samos refusèrent de reconnaître la révolution.

Silver Coin of Tissaphernes
Pièce en argent de Tissapherne
The Trustees of the British Museum (Copyright)

Ces Athéniens convoquèrent une assemblée à Samos pour débattre de la situation. Ils écoutèrent Alcibiade qui venait d'être rappelé. La flotte, furieuse, souhaitait se rendre immédiatement au Pirée pour attaquer Athènes, mais Alcibiade l'encouragea à tenir bon dans l'espoir d'obtenir l'aide de Tissapherne. En outre, les Argiens envoyèrent des représentants à Samos, proclamant qu'Argos reconnaissait les Athéniens de l'île comme la véritable polis. La marine avait en effet créé une seconde Athènes. Ces Athéniens consolidèrent leurs forces et, sous la direction d'Alcibiade, mirent fin à leurs divisions internes.

Les Quatre-Cents, quant à eux, subirent un soulèvement au Pirée lorsque la rumeur se répandit qu'ils préféraient trahir la polis au profit de Sparte plutôt que de se rendre aux Athéniens de Samos. Les Spartiates préparèrent une flotte de 42 trières, apparemment pour aider l'Eubée à se révolter contre la Ligue de Délos, mais dont la véritable motivation semblait être de naviguer vers l'Eëtioneia et, de là, d'attaquer le Pirée. Le soulèvement du Pirée, cependant, se rallia au gouvernement des Cinq Mille et organisa avec succès la défense du Pirée. Les Cinq Mille envoyèrent alors une flotte de 36 trières pour attaquer la flotte spartiate qui s'était dirigée vers l'Eubée. Les Athéniens perdirent 22 navires et l'île se révolta. Les Spartiates, cependant, ne poursuivirent pas leur avantage et n'attaquèrent pas le Pirée.

La guerre en Égée continue

Les forces spartiates stationnées à Milet, bien qu'augmentant en nombre et en ressources, souffraient toujours de discorde, de division et d'indécision et n'accomplirent que peu de choses. Athènes "ne pouvait avoir un ennemi plus commode" (Thuc. 8.96.5). La ligue de Délos envoya un certain nombre de trières pour collecter le tribut et reprendre l'Hellespont. Elle récupéra Lesbos et Mytilène tout en attisant la guerre civile à Thasos (411 av. J.-C.). Les commandants athéniens remportèrent d'autres victoires dans la région, supprimèrent la possibilité de nouvelles révoltes de grande ampleur et, à la fin de l'année, avaient plus de 100 trières en mer.

En outre, Cnide, qui avait volontairement fait sécession avec la Perse, chassa sa garnison perse dans un soudain revirement de situation. De plus, les Milésiens chassèrent leur propre garnison perse. Entre-temps, la Perse avait commandé une flotte de 147 navires pour aider la Ligue du Péloponnèse, flotte qui arriva à Aspendos, mais qui n'entra jamais dans la mer Égée. La question de savoir si les Perses suivirent les conseils d'Alcibiade, qui préconisait toujours de laisser les deux ligues épuiser leurs ressources l'une contre l'autre, ou si le roi perse était plus préoccupé par les troubles dans d'autres parties de l'empire, reste débattue parmi les spécialistes.

En outre, Corinthe offrit peu d'aide directe à Sparte, tandis que Mégare ne semblait intéressée que par l'idée d'aider ses propres colonies, Byzance et Sélymbrie, à se détacher de l'alliance athénienne. La Béotie, dont l'attention se portait surtout sur la Grèce continentale, ne contribua guère à l'est de la mer Égée. Les équipages mixtes que les Spartiates commandaient désormais s'avéraient en outre beaucoup plus difficiles à contrôler que les hoplites spartiates. Ces commandants se heurtèrent également à l'esprit d'indépendance de leurs alliés syracusains et thuriens.

Des loyautés divisées

Plus important encore, la taille et l'ancienneté de la Ligue de Délos mirent en évidence des loyautés sous-jacentes concurrentes parmi ses nombreux membres. Outre les larges affinités que les Grecs ioniens entretenaient naturellement avec l'Athènes ionienne et les Grecs doriens avec la Sparte dorienne, les Athéniens avaient également passé 60 ans à encourager et à établir des démocraties dans toute la mer Égée. Sparte, en revanche, favorisait les oligarchies.

Les oligarques de chaque polis voyaient dans Sparte l'espoir d'accéder au pouvoir, tandis que les masses se tournaient naturellement vers Athènes. La plupart des poleis qui se séparèrent de la Ligue de Délos le firentt parce que les oligarques avaient pris le pouvoir. Les démocrates, en revanche, restèrent souvent fidèles à Athènes. Même si ces démocrates auraient certainement préféré une démocratie libre à une démocratie soumise, cette dernière s'avérait bien supérieure à une oligarchie incontrôlée, et ils résistèrent donc à la "libération" spartiate. Les Athéniens découvrirent qu'ils étaient confrontés à des ennemis plus faibles et qu'ils avaient encore plus d'amis qu'ils ne l'avaient d'abord réalisé après le désastre de Sicile.

Bataille de Cyzique

L'absence embarrassante d'une aide constante de la part de Tissapherne finit par pousser les Spartiates à abandonner le satrape et à s'allier à Pharnabaze, dont l'aide s'avéra résolue et constante. Après la révolte de Chios, les Spartiates disposaient d'une flotte de 112 navires. Ils envoyèrent 26 trières à Byzance et 13 à Rhodes. La Ligue du Péloponnèse réussit à susciter des rébellions dans ces régions. En conséquence, les Athéniens de Samos envoyèrent plusieurs trières pour faire face aux menaces. Les commandants athéniens s'efforcèrent de récupérer les poleis et de collecter les impôts là où ils le pouvaient. Puis, sous la direction d'Alcibiade, la Ligue finit par rassembler l'ensemble de la flotte dans l'Hellespont. Les marines du Péloponnèse et de la Ligue de Délos s'affrontèrent finalement dans la Propontide à Cyzique, où les Spartiates perdirent entre 135 et 155 navires (410 av. J.-C.).

Greek Trireme [Illustration]
Trière grecque
MatthiasKabel & Sting (GNU FDL)

Malgré les efforts sans précédent des Spartiates en mer, le soutien tardif mais finalement fiable et constant de la Perse, ainsi que deux révolutions successives à Athènes et le manque de fonds immédiats des Athéniens, la Ligue du Péloponnèse ne connut qu'une série de pertes et de revers dans la mer Égée. En outre, même si les Spartiates contrôlaient toujours Décélie sur le continent grec, Rhodes, Milet, Éphèse, Chios, Thasos et l'Eubée, ainsi qu'une poignée de poleis sur la côte thrace et dans l'Hellespont, les Athéniens contrôlaient à nouveau la mer Égée et, avec elle, la plus grande partie de la Ligue de Délos. En outre, la Ligue du Péloponnèse perdit un soutien important lorsque Carthage envahit la Sicile et que les Syracusains se retirèrent. Sparte fit donc des ouvertures pour garantir la paix et stabiliser les positions atteintes. Cependant, la démocratie d'Athènes désormais restaurée, refusa.

Pertes de la ligue de Délos et Reconquête de l'Égée par Athènes

La Ligue de Délos perdit bientôt son important allié Corcyre à la suite d'une guerre civile qui éclata en 410 avant notre ère. Elle perdit ensuite Pylos en 409 avant notre ère, une base importante pour les opérations contre le Péloponnèse. La Ligue perdit également Mégare à cause d'une rébellion. En outre, une petite flotte spartiate de 25 navires s'empara de Chios. Malgré ces irritations, les Athéniens conservèrent le contrôle de la mer. Plus inquiétant encore, Pharnabaze fournit à Sparte l'argent nécessaire à la construction d'une flotte aussi importante que celle détruite à Cyzique. Pendant ce temps, les Athéniens envoyèrent des renforts à Samos, d'où ils tentèrent de reprendre Pygèle, mais sans succès. La flotte de la Ligue ravagea alors la campagne pendant un certain temps, mais les Perses finirent par repousser les Athéniens vers la côte.

La Ligue de Délos commençait cependant à prendre l'avantage lorsqu'Alcibiade reprit Sélymbrie en 408 avant J.-C. Les Athéniens y installèrent une garnison et exigèrent un tribut. Thrasybule récupéra ensuite Thasos en 407 avant notre ère. Malgré les revers initiaux, la Ligue de Délos récupéra bientôt l'Hellespont et la flotte athénienne pouvait à nouveau naviguer et effectuer des raids à volonté en 407 avant notre ère. Alcibiade navigua ainsi dans le golfe Céramique et récolta 100 talents dans toute la Carie. La bonne fortune d'Athènes ne durerait cependant pas.

Disparition de la ligue de Délos

Les Athéniens accueillirent Alcibiade chez eux et l'élirent à la tête de l'armée de terre et de mer. Dans le même temps, les Spartiates avaient adopté leurs chefs les plus compétents à ce jour: Lysandre et Callicratès. Bien que ces deux Spartiates soient devenus rivaux, ils démontrèrent tous deux qu'ils possédaient ce que les commandants spartiates précédents, depuis Brasidas, n'avaient pas: l'initiative, l'audace, la perspicacité et l'esprit inventif.

Après une défaite mineure et embarrassante à la bataille de Notion contre Lysandre (406 av. J.-C.), et bien que la Ligue n'ait subi que peu de pertes et ait toujours commandé une flotte impressionnante de 108 trières, les démagogues rivaux d'Alcibiade à Athènes le discréditèrent et il s'enfuit d'Athènes pour la dernière fois. Il semble que Lysandre ait profité de l'occasion offerte par Notion pour proposer une augmentation de salaire et un nombre non négligeable de rameurs de la Ligue désertèrent la flotte à Samos. Le nouveau chef athénien, Conon, découvrit à son arrivée qu'il ne disposait que de 70 navires.

Bataille des Arginuses et exécution des généraux

Tandis que Conon continuait à naviguer, à collecter des tributs et à réprimer les rébellions là où il le pouvait, Callicratès lança une campagne avec 140 trières qui atteignirent bientôt une force de 170. Il attaqua les poleis sous contrôle athénien et mit fin à la "liaison adultère de Conon avec la mer". Il réussit ensuite à bloquer la flotte de la Ligue à Mytilène. Les Athéniens parvinrent à équiper 110 trières supplémentaires: 60 athéniennes et 50 insulaires (Xen. Hell. 1.6.24 ; cf. Diod. 13.97.1). Puis, après avoir rassemblé 10 navires de guerre de Samos et 35 autres des autres membres de la Ligue, cette flotte de secours fit voile vers Mytilène. Lorsque Callicratès fut informé de l'arrivée des renforts, qui comptaient désormais 145 trières, il envoya 110 de ses navires pour les intercepter.

La bataille des Arginuses s'avéra être la plus grande bataille jamais livrée entre les marines grecques, et la flotte du Péloponnèse subit une fois de plus une défaite décisive, perdant un peu moins de 80 navires. Les Athéniens, cependant, gâchèrent fatalement la victoire en exécutant collectivement leurs commandants les plus compétents pour n'avoir pas récupéré les corps de 12 trières naufragées sur les 25 qu'ils avaient perdues au cours de la bataille. Jamais auparavant dans l'histoire d'Athènes, les Athéniens n'avaient exécuté un chef militaire, et encore moins six en une seule fois. Le procès et les morts divisèrent les Athéniens, et les condamnations à mort rendirent extrêmement difficile la recherche d'un bon chef à un moment où un tel chef devenait primordial pour la survie de la Ligue de Délos.

Bataille d'Aigos Potamos et siège d'Athènes

Bien que la Ligue du Péloponnèse ait encore déployé plus de 90 navires, elle demanda à nouveau la paix, mais les Athéniens rejetèrent à nouveau l'offre. Ils commandaient une force allant jusqu'à 180 trières dans la mer Égée, et celle-ci était libre d'effectuer des raids et de piller les îles et les polis continentales amies de Sparte. Sparte envoya donc Lysandre avec 35 trières. Il rassembla rapidement toute la flotte du Péloponnèse à Éphèse et, de là, navigua jusqu'à Milet, puis jusqu'en Carie, rasant et soumettant les poleis sur son passage (406/405 av. J.-C.). Il finit par regagner l'Hellespont. L'arrivée de Lysandre menaça à nouveau la ligne de vie d'Euxine, obligeant la flotte de la ligue de Délos à le suivre. Les Athéniens et leurs alliés perdirent 168 de leurs 180 trières lors de l'engagement décisif et final d'Aigos Potamos.

La flotte de la Ligue de Délos étant détruite, Athènes se retrouva sans défense et se prépara à l'inévitable siège qui allait suivre. Les Péloponnésiens encerclèrent la polis et la Ligue de Délos n'avait plus d'argent. Les réfugiés s'entassaient dans la polis, commençaient à mourir de faim et Athènes frôla à nouveau la révolution. Finalement, les Athéniens se rendirent. Les polis qui résistaient encore à la Ligue du Péloponnèse ouvrirent leurs portes et les Spartiates purgèrent Délos de toute influence athénienne. Sparte exigea d'Athènes qu'elle démolisse ses longues murailles qui, depuis un demi-siècle, protégeaient la polis contre le Péloponnèse et la Béotie. Les Spartiates obligèrent également les Athéniens à céder le reste de leur flotte, à l'exception de 12 navires destinés à servir de force de police, et à renoncer à toutes leurs possessions outre-mer, y compris les clérouquies. La ligue de Délos cessa d'exister.

Jugements et conclusions

La ligue de Délos représenta la plus grande et la plus réussie des confédérations de la Grèce antique. Elle survécut à des revers et à des calamités souvent surprenants et nombreux. La confédération de Délos suivit également ce qui devint un modèle prévisible d'alliances multipolaires: les contributions des membres arrivèrent d'abord librement, puis l'hégémon dut les collecter sous la contrainte et, lorsque le mécontentement se répandit, il recourut à l'ingérence, à la suppression et à la répression. Les appels à une hégémonie athénienne précoce résultaient du discrédit et de l'indifférence des Spartiates, mais l'humeur des Grecs changeait souvent de manière soudaine et rapide. Le leadership athénien ne pouvait à lui seul mettre fin aux rivalités et aux factions. Athènes jugea bientôt nécessaire d'installer des garnisons et des magistrats, puis d'imposer les lois athéniennes à ses alliés. À l'apogée de la Ligue de Délos, les Athéniens déployaient 700 fonctionnaires à l'étranger.

La Ligue de Délos passa en effet d'un τὸ ξυμμαχικόν (symmachie, un corps d'alliés) à un ἀρχή athénien ( archi, commandement ou règle). Toutes les poleis membres indépendantes se réunirent d'abord en conseil commun (συνέδριον), mais se contentèrent ensuite de suivre les instructions des Athéniens. Les alliés passèrent ainsi de αὐτόνομοι (indépendants) à ὑπήκοοι (sujets). Un nouveau mot ferait son entrée dans les serments d'allégeance: πείσομαι (obéissance). Malgré les différences inhérentes à chaque polis, tous les Grecs anciens vénéraient les mêmes dieux et parlaient la même langue. Ils pratiquaient l'agriculture et se battaient de la même manière et, bien que chaque polis ait fermement défendu son indépendance, ils se considéraient toujours comme un seul et même peuple.

Le grec ancien n'a peut-être pas de mot pour "empire", mais les Grecs pouvaient exprimer l'idée d'impérialisme en utilisant des paraphrases comme ἀρχή + πολυπραγμοσύνη + πλεονεξία (une règle + beaucoup d'ingérence et d'interférence officielle + un désir insatiable de posséder ce qui appartient légitimement à d'autres). Les Athéniens s'adonnaient à ces trois pratiques. Il n'existe peut-être pas de meilleur commentaire sur la domination athénienne de la Ligue de Délos et l'impérialisme qu'elle engendra que les Oiseaux d'Aristophane, où une série d'Athéniens apparaissent pour protéger, puis guider et enfin supprimer les faiseurs de constitutions de Coucouville-les-Nuées.

L'impérialisme athénien naquit des succès de la Ligue, comme une sorte de sujétion économique et politique, un pouvoir coercitif nécessaire sur les autres poleis de l'alliance pour en assurer la continuité.

L'histoire de la Ligue de Délos montre que les Athéniens pratiquèrent peu à peu leur forme d'impérialisme. L'impérialisme athénien naquit des succès de la Ligue, comme une sorte de sujétion économique et politique, un pouvoir coercitif nécessaire sur les autres poleis de l'alliance pour en assurer la pérennité. L'exploitation par Athènes des membres de la Ligue n'impliquait cependant pas le contrôle direct des moyens de production ou du travail au sein de ces poleis. La question de savoir s'il s'agissait ou non d'un véritable "empire" dépasse le cadre de cet article. Si les alliés pouvaient légitimement affirmer que la démocratie athénienne se préoccupait d'abord de ses propres intérêts, ils ne pouvaient pas non plus nier qu'elle restait loyale envers ses amis. Samos, par exemple, était devenue indépendante pendant la guerre de Décélie et, lorsqu'Alcibiade s'empara de Byzance, il trouva également trouvé de l'aide au sein de la polis. Lorsque Lysandre s'empara de Byzance après Aigos Potamos, ces hommes s'enfuirent à Euxine, mais se rendirent plus tard à Athènes et devinrent des citoyens athéniens.

Néanmoins, au début de la guerre de Dix ans, Athènes était devenue un tyran. Sa domination sur la Ligue de Délos ne s'était pas poursuivie sur la base de l'acceptation officielle des autres membres ou d'un quelconque accord formel. Néanmoins, la plupart des alliés restèrent loyaux jusqu'à la fin. Thucydide ne suggère certainement jamais que la domination athénienne sur la Confédération reposait sur le libre consentement des alliés, mais les orateurs du IVe siècle ne suggèrent jamais que ce n'était pas le cas. Quoi qu'il en soit, les Athéniens firent valoir que leur régime était plus modéré que d'autres ne l'avaient été dans le passé ou ne le seraient à l'avenir: une affirmation intéressante, puisque les 27 années de conflit qui aboutirent à la reddition d'Athènes et, par conséquent, à la disparition de la Confédération de Délos, représentent peut-être l'une des guerres civiles les plus horribles des débuts de l'histoire écrite.

Le deuxième et dernier affrontement de neuf ans entre les ligues délienne et péloponnésienne se caractérisa, comme la guerre de Dix ans qui le précéda, non seulement par des batailles terrestres et navales conventionnelles, mais aussi par le terrorisme, les révolutions, les assassinats, les évacuations massives et les meurtres de masse. Des milliers de personnes moururent lors des combats, des sièges, des nettoyages ethniques, des sécheresses, des famines et de la peste. Toutes ces calamités se déroulèrent parallèlement à une série déconcertante d'alliances changeantes sur le continent grec.

L'objectif déclaré de la ligue de Délos était au départ de se libérer des Mèdes, mais cet objectif allait évoluer vers la promotion des désirs athéniens et l'encouragement de la culture ionienne. Athènes tenta de gouverner selon la loi athénienne, en promouvant le panhellénisme, et finalement les Athéniens cherchèrent à créer une métropole monumentale, ce qui signifie souvent imposer la démocratie aux poleis résistants. La guerre civile qui s'ensuivit engloba tous les habitants du monde de langue grecque. À la fin de la guerre, 80 000 Athéniens et d'innombrables autres Hellènes avaient trouvé la mort et 500 navires avaient coulé dans la mer Égée et avaient été détruits en Sicile.

La peur, l'orgueil et le profit sont les trois principaux moteurs de l'incapacité d'Athènes à réduire les obligations de la Ligue de Délos. La peur poussa les Athéniens à régner sur la mer Égée et les poussa à rechercher la Sicile et à étendre la Ligue encore plus loin, non pas pour réduire ou soumettre ces Grecs, mais plutôt pour les sauver de l'asservissement. Athènes prétendait se battre pour la "cause grecque". Sans Athènes, selon les Athéniens, la mer Égée tomberait aux mains des Mèdes et la Sicile aux mains des Carthaginois.

Delian League
Ligue de Délos
Marsyas (CC BY-SA)

Athènes exploita les alliés pour atteindre ces objectifs dans une certaine mesure, mais elle ne le fit pas de manière systématique ou étendue. Le tribut total perçu devint assez important, mais peu de poleis individuelles payèrent des sommes significatives. Avant la grande réévaluation de 425 avant notre ère, seuls 14 poleis avaient payé plus de 10 talents, et seuls 5 d'entre elles avaient payé plus de 15 talents. Pour bien comprendre la charge réelle que ces alliés durent supporter, il faut aller au-delà des preuves existantes sur leurs ressources, mais les spécialistes doutent qu'Athènes leur ait demandé de payer plus que ce qu'ils pouvaient confortablement se permettre (du moins jusqu'à un stade avancé de la guerre du Péloponnèse). Certaines d'entre elles en vinrent certainement à considérer le tribut comme un symbole de sujétion, mais cela reste une autre question.

Tous les Athéniens profitèrent d'une manière ou d'une autre de la domination de la Ligue de Délos. Les pauvres gagnèrent des terres grâce au développement des colonies et des clérouquies, tout en recevant une solde pour le service naval et le service des jurés. Les riches gagnèrent des terres et accédèrent à la notoriété grâce aux diverses fonctions publiques qu'exigeait le fait de gouverner non seulement Athènes, mais aussi la Ligue. Tous les Grecs, mais surtout les Athéniens, bénéficièrent également de l'accroissement du commerce maritime et, tandis qu'Athènes augmentait sa part de ce commerce, le volume des échanges s'accrut considérablement - mais ces avantages s'accompagnaient de la perte de l'autonomie de la polis et du coût de la confiscation des terres, ainsi que de la violation générale des libertés.

Les succès de la Ligue de Délos contre l'Empire perse furent indéniables, mais Athènes utilisa également les ressources de la Ligue de Délos pour supprimer et réprimer. Ces actes d'ingérence portaient directement atteinte au sens hellénique du corporatisme civique indépendant, que la nature même de la polis exigeait. Les Athéniens en vinrent à renverser les oligarchies partout dans le monde; les Spartiates, eux, les démocraties.

L'occasion de relancer une autre ligue dirigée par les Athéniens allait bientôt se présenter lorsque l'Hégémonie spartiate allait décevoir les habitants de la mer Égée. La défense par Sparte des Grecs orientaux contre Athènes et les Mèdes s'avérerait peu fructueuse. Les Spartiates soutenaient que tous les poleis helléniques, grandes et petites, resteraient autonomes, mais seulement si elles étaient dirigées par des oligarchies pro-spartiates - et les Spartiates échouèrent de manière spectaculaire. Les dirigeants spartiates constatèrent très vite qu'ils devraient eux aussi imposer des gouverneurs et des conseils pour gouverner et, pour financer les expéditions, prélever un tribut aussi élevé que les Athéniens. "Les Lacédémoniens mirent à mort plus d'hommes en trois mois que [les Athéniens] n'en jugèrent pendant toute la durée de [leur] règne" (Isoc. 4.113). Les Péloponnésiens laissèrent également de nombreuses poleis sans alignement, confuses et ambivalentes. Nombre d'entre elles subirent des invasions, des saccages ou s'appauvrirent.

La chute d'Athènes et la dissolution de la Ligue de Délos ne conduisirent pas, comme espéré, à une libération générale des Hellènes, mais laissèrent simplement de nombreux Grecs à l'abandon. D'autres Grecs en vinrent à penser qu'ils avaient simplement remplacé un tyran grec par un autre, qui semblait bien plus incompétent et indifférent à la "cause grecque". Les masses d'un nombre croissant de poleis commencèrent à réclamer une nouvelle hégémonie athénienne. Dix ans après la capitulation d'Athènes, la Béotie et Corinthe se préparaient à s'allier à Athènes et Argos contre Sparte. La question de savoir si Athènes avait tiré les leçons des erreurs qu'elle avait commises en dirigeant la Ligue de Délos deviendrait évidente avec la fondation de la Seconde Ligue athénienne.

Cet article fait partie d'une série consacrée à la Ligue de Délos:

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Bibliographie

Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Christopher Planeaux
Lectured in Classical Studies for 15yrs. Published articles on the dramatic settings for Plato's Dialogues & Ancient Greek History. Offered papers at conferences in North America & Great Britain. Area of expertise includes Greek History 600-300 BCE.

Citer cette ressource

Style APA

Planeaux, C. (2016, septembre 30). Ligue de Délos 6: Guerre de Décélie et Chute d'Athènes [The Delian League, Part 6: The Decelean War and the Fall of Athens (413/2-404/3 BCE)]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-955/ligue-de-delos-6-guerre-de-decelie-et-chute-dathen/

Style Chicago

Planeaux, Christopher. "Ligue de Délos 6: Guerre de Décélie et Chute d'Athènes." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le septembre 30, 2016. https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-955/ligue-de-delos-6-guerre-de-decelie-et-chute-dathen/.

Style MLA

Planeaux, Christopher. "Ligue de Délos 6: Guerre de Décélie et Chute d'Athènes." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 30 sept. 2016. Web. 27 avril 2024.

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