Afghanistan Ancien

Définition

Ralf Rotheimer
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 08 août 2022
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Disponible dans ces autres langues: anglais, grec, espagnol
Cybele Plate (by Museé Guimet, Public Domain)
Assiette représentant Cybèle
Museé Guimet (Public Domain)

L'histoire ancienne de l'Afghanistan, pays enclavé d'Asie centrale, regorge de fascinantes cultures, des premières tribus nomades aux royaumes de la Perse achéménide, les Séleucides, les Maurya, les Parthes et les Sassanides, en passant par les peuples des steppes comme les Kouchans ou les Hephtalites (alias les Huns blancs). Toutes ces civilisations ont laissé leur empreinte sur la région, donnant lieu à un mélange unique de cultures et de religions.

Géographie et peuples

L'Afghanistan partage ses frontières avec l'Iran à l'ouest, le Turkménistan et l'Ouzbékistan au nord, le Tadjikistan au nord-est, la Chine à l'est et au nord-est, et le Pakistan au sud-est. Le pays est l'un des principaux connecteurs entre l'Asie centrale et l'Asie du Sud. Ce fait a conféré au territoire une énorme importance géopolitique. Au cours des millénaires, des routes d'invasion et des voies commerciales stratégiques vitales ont traversé les régions de l'Afghanistan contemporain. La route de la soie et la passe de Khyber (ou défilé de Khaïber) en sont des exemples notables.

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Pourtant, traverser l'Afghanistan comporte des défis. La majeure partie du pays oscille entre un terrain montagneux et des vallées profondes et étroites. L'imposante chaîne de l'Hindou Kouch sépare les plaines du nord et du sud-ouest. La partie méridionale est relativement aride, et le désert du Régistan couvre de vastes zones dans la province de Kandahar.

Tout comme aux premiers temps, une grande partie de la population est aujourd'hui constituée de modestes agriculteurs ou éleveurs. Ce sont surtout les régions du nord qui offrent des terres fertiles. Par conséquent, les rivières et les ruisseaux ont toujours joué un rôle essentiel dans les structures urbaines et les premières exploitations agricoles. Les cultures anciennes se sont développées à proximité de cours d'eau tels que l'Helmand, le Kaboul et l'Oxus (L'Amou-Daria moderne).

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Les régions riches en minéraux de l'Afghanistan permettaient l'échange de matériaux comme l'or, l'argent, le cuivre et le lapis-lazuli contre des céréales, du coton ou des produits similaires.

L'Afghanistan étant riche en minéraux, les activités minières ont joué un rôle central depuis l'Antiquité. Malheureusement, le terrain montagneux et accidenté rend l'accès à ces ressources très difficile. Les premiers habitants de l'Afghanistan ont donc dû travailler dur pour récolter les précieux minerais.

Malgré les fortes racines de l'islam dans la population actuelle, le pays a connu diverses influences. Les premiers souverains connus de la région étaient les Perses achéménides. Pourtant, ils étaient loin d'être les premiers à influencer la région.

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Des premiers colons aux premières civilisations

Les artefacts et les ossements découverts suggèrent que des personnes vivaient en Afghanistan il y a au moins 52 000 ans. Si nous savons peu de choses sur l'émergence des villes en Afghanistan, différentes découvertes ont permis d'en savoir plus. Par exemple, la culture Helmand érigea des établissements tels que le site de Mundigak, dans l'actuelle province de Kandahar. L'Afghanistan possédait également des zones urbaines associées aux Harrapans, plus connus sous le nom de civilisation de la vallée de l'Indus.

Bodhisattva Head, Gandhara
Tête de Bodhisattva, Gandhara
Mary Harrsch (Photographed at The Art Institute of Chicago) (CC BY-NC-SA)

La civilisation de l'Oxus, également appelée complexe archéologique Bactro-Margien (abrégé en BMAC en anglais), était située dans la région nord de l'Afghanistan actuel. Les chercheurs savent qu'il s'agissait d'une société agricole avec des établissements fortifiés et de vastes compétences en métallurgie qui influencèrent la région d'environ 2 200 à environ 1 700 avant notre ère. Les Indo-Aryens commencèrent à se déplacer vers l'est, de l'Asie centrale vers le sous-continent indien, entre environ 2 000 et 1 200 avant notre ère. Ils entrèrent en contact avec les peuples et les cultures déjà présents en Afghanistan, comme les BMAC.

Intégration aux empires

À partir d'environ 500 avant notre ère, diverses civilisations façonnèrent l'histoire de la région. Deux d'entre elles, le Gandhara et le Kamboja, appartenaient aux 16 Mahājanapadas ("grands royaumes") de l'Inde ancienne. Elles exercèrent une importance politique considérable dans ce qui est aujourd'hui l'Afghanistan oriental.

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Les Mèdes furent les premiers à incorporer la majeure partie de l'Afghanistan à leur territoire en toute harmonie. Ce peuple iranien établit vers 700 avant notre ère l'un des premiers royaumes du Proche-Orient qui s'étendait de la rive sud de la mer Noire au Pakistan.

En 550 avant notre ère, les Mèdes renversèrent et s'intégrèrent à l'empire achéménide perse qui façonna l'histoire du monde pendant les 200 années suivantes. Darius Ier (c. 550-486 av. J.-C.) en fut un personnage central. À sa mort, il avait réalisé d'importantes réalisations culturelles, architecturales et infrastructurelles dans les provinces (satrapies) de l'Empire perse. Il était également un adepte du zoroastrisme, la principale religion monothéiste de l'empire achéménide dont il favorisa la diffusion.

Alexandre le Grand

En 327 av. J.-C., Alexandre le Grand (21 juillet 356 av.J.-C. - 323 av.J.-C.) finit par prendre le contrôle de la satrapie de Bactriane. La région couvrait des zones de l'Afghanistan, de l'Ouzbékistan et du Tadjikistan modernes, et ses habitants étaient depuis un certain temps une épine dans le pied d'Alexandre. Les cavaliers de Bactriane faisaient partie des plus redoutables au sein des armées perses que le conquérant macédonien avait affrontées lors de sa campagne.

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Alexander the Great [Profile View]
Alexandre le Grand [Vue de profil]
Egisto Sani (CC BY-NC-SA)

Même après la défaite du Grand Roi Darius III (r. de 336 à 330 av. J.-C.), le satrape (dirigeant régional) Bessos de Bactriane (r. de 336 à 329 av. J.-C.) s'était révélé problématique. Avec d'autres satrapes, il assassina Darius III lorsqu'il devint évident que le roi ne pouvait plus tenir tête à Alexandre. Cette trahison priva Alexandre de l'opportunité de renforcer sa légitimité par l'intermédiaire de son rival vaincu.

En outre, les satrapes opposèrent une résistance féroce à l'avancée d'Alexandre. Même la capture et l'exécution imminente de Bessos ne purent y mettre fin. Un noble connu sous le nom d'Oxyartès poursuivit le combat et ne se rendit qu'après la prise par Alexandre de la forteresse de la Roche-de-Sogdiane. C'est là qu'Alexandre vit pour la première fois sa future épouse et la fille d'Oxyartès, la fameuse Roxane. Leur mariage scella définitivement le contrôle macédonien sur la région.

Séleucos Ier gouverna d'une main de fer et repoussa les frontières de son empire jusqu'à la rivière Indus.

Avec des troupes rafraîchies et l'empire achéménide enfin sous sa coupe, Alexandre se tourna vers l'Inde. Malheureusement, cette campagne ne se passa pas bien, et il dut retourner en Afghanistan. Au cours de son règne, Alexandre créa de nombreuses villes dans la région et mit en œuvre des influences helléniques et des changements politiques considérables. En outre, Alexandre fit de son mieux pour rapprocher les peuples de Grèce et de Perse. Cependant, il mourut avant d'avoir atteint cet objectif.

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L'héritage d'Alexandre

Le vaste empire d'Alexandre ne survécut pas longtemps après sa mort. En l'absence d'un successeur clair, une lutte pour le pouvoir éclata entre les commandants du royaume. Ces guerres des Diadoques entraînèrent des années de rivalité, de complots et de troubles. Roxane et son fils d'Alexandre firent partie des victimes les plus importantes de cette époque turbulente.

Hellenistic Successor Kingdoms c. 301 BCE
Royaumes des diadoques, 301 av. J.-C.
Simeon Netchev (CC BY-NC-SA)

Le contrôle à long terme des parties orientales, y compris les régions de l'Afghanistan moderne, revint à Séleucos I Nicator (c. 358-281 av. J.-C.). C'est ainsi que commença la dynastie séleucide. Séleucos gouverna d'une main de fer et repoussa les frontières de son empire jusqu'à la rivière Indus. C'est alors qu'il engagea une lutte décisive contre les souverains maurya de l'Inde en 305 avant notre ère. L'empire maurya était le résultat du retrait d'Alexandre de l'Inde occidentale. Son fondateur, Chandragupta Maurya (r. de c. 321 -à c. 297 av. J.-C.), saisit l'opportunité créée par l'incursion ratée et exerça une pression agressive pour contrôler la vallée de l'Indus et le nord-ouest de l'Inde.

Les efforts de Séleucos pour reprendre les anciennes régions sous domination macédonienne n'aboutirent pas. Le conflit avec les Maurya se termina en 303 av. J.-C., et Séleucos céda de vastes régions, dont certaines parties du sud de l'Afghanistan, à Chandragupta. Il reçut en échange 500 éléphants de guerre, et une alliance conjugale renforça cet accord.

L'influence maurya en Afghanistan se maintint pendant plus de 100 ans. Le petit-fils de Chandragupta, Ashoka le Grand (r. de 268 à 232 av. J.-C.), joua un rôle essentiel. Le roi deviendrait plus tard un véritable adepte et partisan du bouddhisme. Il diffusa ses croyances par le biais de proclamations et d'édits gravés dans des rochers et des piliers. En conséquence, le bouddhisme devint une religion influente aux côtés du zoroastrisme.

L'ascension des Gréco-Bactriens et des Parthes

Vers 250 av. J.-C., les Séleucides perdirent progressivement le contrôle de leurs domaines orientaux en raison de troubles internes et de luttes à l'ouest. Ils affaiblirent ainsi leur emprise sur les régions de l'Afghanistan moderne. De nouvelles puissances profitèrent donc de cette situation. Le royaume gréco-bactrien apparut vers 250 avant notre ère, lorsque le satrape de Bactriane et les provinces environnantes se révoltèrent contre leur souverain séleucide. Les connaissances actuelles sur le royaume gréco-bactrien proviennent principalement des pièces de monnaie et de quelques remarques dans les textes historiques. Le royaume avait de grandes bases de prospérité grâce à ses zones fertiles et ses diverses routes commerciales. Cependant, à l'ouest, une nouvelle menace pointait.

Demetrius I Tetradrachm
Tétradachme de Démétrios Ier
Mark Cartwright (CC BY-NC-SA)

Une tribu nomade appelée Parnes, probablement apparentée aux Scythes, commença à pousser vers le sud à partir de ses terres d'origine. Leur invasion prolongée de la région leur permit de s'établir en tant que souverains vers 247 avant notre ère. Ce peuple serait connu sous le nom de Parthes, d'après le nom de la région qu'ils dominèrent en premier lieu.

Jusqu'en 200 av. J.-C., les différentes factions tentaient de stabiliser ou de renforcer leur contrôle. Les Séleucides, en particulier, tentèrent de reconquérir leurs territoires perdus à l'est. Antiochos III (r. de 223 à 187 av. J.-C.) remporta de brefs succès grâce à de multiples victoires contre les Parthes et les Gréco-Bactriens jusqu'à la fin de sa campagne orientale en 205 av. J.-C.. Cependant, il permit à ses ennemis vaincus de rester au pouvoir pour s'assurer leur loyauté.

La chute des puissances établies

Au final, les Parthes et les Gréco-Bactriens profitèrent des faiblesses des Séleucides et des Maurya. Antiochos III subit de multiples défaites contre la République romaine et dut accepter de dures conditions de paix en 188 avant notre ère. La perte de terres, de puissance militaire et de ressources qui s'ensuivit paralysa les Séleucides. Au cours des décennies suivantes, l'empire autrefois puissant se désintégra en raison de révoltes et de guerres (civiles). De l'autre côté, l'empire maurya s'effrita lentement après la mort d'Ashoka. Les Gréco-Bactriens profitèrent de cette instabilité pour étendre leur influence jusqu'à l'Inde moderne. Cette expansion donna naissance aux royaumes indo-grecs qui étaient politiquement indépendants et qui devinrent les lieux d'un mélange unique de culture hellénistique et indienne.

Cependant, des troubles internes et des divisions affectèrent les royaumes grecs d'Asie centrale. Un homme appelé Eucratide (r. de c. 171-145 av. J.-C.) renversa son roi gréco-bactrien vers 171 avant J.-C. et marcha ensuite contre les Indo-Grecs. Leur souverain, Ménandre Ier (r. vers 165-130 avant J.-C.), finit par éliminer les envahisseurs. Il est généralement considéré comme le plus grand des souverains indo-grecs et était un célèbre protecteur du gréco-bouddhisme.

D'autre part, les Parthes s'avérèrent être des voisins occidentaux ambitieux. Parallèlement ou peu de temps après les avancées d'Eucratide, les Parthes, sous la direction de Mithridate Ier (r. de 165 à 132 av. J.-C.), portèrent des coups sévères aux Gréco-Bactriens. Il est possible que les Gréco-Bactriens aient même fini par devenir les vassaux des Parthes. Ces derniers devinrent peu à peu la puissance dominante de la région en s'emparant de portions substantielles des terres séleucides à l'ouest.

Map of the Greco-Bactrian Kingdom
Carte du royaume greco-bactrien
PHGCOM (CC BY-SA)

Les invasions des Sakas et des Yuezhi

La ruine ultime de la domination gréco-bactrienne apparut par le nord. Au début du IIe siècle avant J.-C., une confédération de tribus nomades, les Yuezhi, quittèrent leur territoire situé dans l'actuelle Mongolie occidentale et en Chine. Sur leur chemin vers le sud-ouest, ils poussèrent une tribu scythe appelée les Sakas hors des steppes du Kazakhstan contemporain. Les Sakas, à leur tour, se dirigèrent vers l'Empire parthe et les domaines grecs. Certains finirent par atteindre l'Inde et établirent une culture connue sous le nom d'Indo-Scythes.

Les Parthes réussirent à résister aux vagues de populations nomades qui suivirent, bien que difficilement. Cependant, les royaumes grecs de la région s'affaiblirent peu à peu sous la pression de la Parthie et des nouveaux arrivants nomades. Par conséquent, ils devinrent de plus en plus fracturés au cours du siècle suivant. L'autorité hellénistique dans la région finit par succomber aux avancées des Yuezhi, des (Indo-)Scythes et des (Indo-)Parthes vers l'an 10 de notre ère.

Le royaume indo-parthien était un domaine indépendant situé dans certaines parties du Pakistan, de l'Inde et de l'Afghanistan contemporains. Les historiens reconstituent son histoire principalement à partir de pièces de monnaie et de rares mentions dans les écrits anciens. Sa création remonte à Gondopharès Ier (r. de c. 19 à c. 46 de notre ère), qui se sépara de la domination parthe en 19 de notre ère.

Hindu Kush Mountain Range
Chaîne de l'Hindou-Kouch
Ninara (CC BY)

Le soutien politique en faveur de cette prise de pouvoir provenait peut-être de la relation de Gondopharès avec la noble maison de Souren parthe. En raison de leur influence significative, certains historiens appellent le royaume indo-parthien le royaume Souren. Après le règne de près de 30 ans de Gondopharès, ses successeurs ne purent empêcher la fragmentation du royaume. Ils réussirent néanmoins à garder le contrôle de la région du sud de l'Afghanistan jusqu'à sa conquête par les Sassanides en 225 de notre ère.

L'empire kouchan

La plupart de nos connaissances sur l'empire Kouchan proviennent de pièces de monnaie et de documents chinois. D'après ces sources, les Yuezhi finirent par s'installer dans la région de la Bactriane. Ils commencèrent par se fondre dans la population existante, faisant de la région une base pour leur expansion future.

Si, au départ, ces tribus peu unies n'avaient pas de gouvernement uniforme, l'une d'entre elles (appelée les Kouchans) devint plus dominante au fil du temps. Le terme d'Empire kouchan s'applique généralement depuis le règne de Kujula Kadphisès (r. de c. 30 à c. 80 de notre ère). Peu avant ou pendant son règne, la confédération des Yuezhi devint une unité politique.

Au cours de l'expansion vers l'est qui suivit, les Kouchans s'emparèrent de grandes parties des terres (indo-)parthes. Ils adoptèrent des éléments et des traditions de la culture hellénistique de Bactriane, ainsi que d'autres influences. À l'intérieur de leurs frontières, de nombreux systèmes de croyance existaient, allant du zoroastrisme aux cultes grecs, en passant par les religions iraniennes, l'hindouisme et le bouddhisme.

Kushan Empire
Empire kouchan
Asia Society (CC BY-NC-SA)

C'est principalement le bouddhisme qui prospéra dans l'Empire kouchan, notamment sous le patronage de Kanishka Ier le Grand (r. de c. 127 à c. 150 de notre ère). Sous sa direction, les Kouchans étendirent leur influence à diverses régions d'Asie, y compris l'Inde du Nord et peut-être même la Chine. À son apogée, l'empire kouchan était un point central du commerce interculturel entre l'Orient et l'Occident, reliant de grandes civilisations comme la Chine des Han et l'Empire romain par la route de la soie.

L'empire sassanide

L'empire sassanide renversa l'empire parthe et les restes des Indo-Parthes en 224 de notre ère. Nommés en hommage à un ancêtre de leur fondateur, Ardashir Ier (c. 180-241 de notre ère), les Sassanides ont utilisé tirèrent parti de l'état d'affaiblissement de la domination parthe. Cette situation était due à des conflits internes prolongés et à la guerre avec les Romains.

Sous leur autorité, la région connut une résurgence de la culture iranienne. Parmi les nombreux faits notables, le zoroastrisme redevint la religion d'État. Certaines sources affirment également que c'est sous la domination sassanide que le terme "Afghan" ou "Abgan" apparut pour la première fois pour décrire les ancêtres tribaux des Pachtounes d'aujourd'hui.

Les Kouchans finirent par céder la place aux Sassanides. Peu après ou pendant le règne de Vasudeva Ier (r. de c. 191 à 232 de notre ère), généralement considéré comme le dernier "Grand Kouchan", l'Empire kouchan se divisa en plusieurs parties. Cette fragmentation et l'agitation générale sur le continent asiatique eurent de profondes répercussions sur les interactions commerciales entre l'Ouest et l'Est et par conséquent sur la prospérité des Kouchans.

Sassanian King
Roi sassanide
Metropolitan Museum of Art (Copyright)

L'Empire sassanide subjugua les Kouchans occidentaux au milieu du IIIe siècle de notre ère, très probablement sous la direction de Chapour Ier (r. de 240 à 270 de notre ère). Il installa des nobles connus sous le nom de Kouchano-Sassanides ou Kushanshahs (rois des Kushans) comme gouverneurs vassaux. Les Kouchans orientaux resteront au pouvoir jusqu'à ce que les Gupta venus d'Inde ne les vainquent au 4e siècle de notre ère.

Les Sassanides se considéraient comme les successeurs des Perses achéménides, mais en réalité, leur pouvoir était ténu. Des vassaux régnaient sur des régions éloignées, ce qui désunissait le pouvoir politique et laissait la voie libre à de potentiels rivaux. Plusieurs découvertes de pièces de monnaie impliquent, par exemple, que les Kouchano-Sassanides tentèrent de se rebeller. On ne sait pas mesurer avec exactitude le succès de cette tentative. Les pertes subies contre l'Empire romain, d'autres révoltes et les pillages commis par les Arabes du nord compliquèrent davantage encore la situation des Sassanides.

Nouvelles incursions nomades en provenance du Nord

Tous ces défis façonnèrent le règne de Chapour II (r. de 309 à 379) qui remporta d'importants succès contre les Arabes et les Romains. Il s'efforça également d'assurer fermement le contrôle de son empire sur les régions des Kouchano-Sassanides. La montée en puissance de nouvelles incursions nomades compliqua ce dernier objectif. À partir de 350 de notre ère, de nombreux documents mentionnent des attaques venues du nord en direction des régions entourant la Bactriane. Les envahisseurs nomades portent différents noms dans les documents historiques, tels que Xionites, Kidarites, ou Huns Kidarites. Cependant, les documents disponibles sur leurs origines et sur le fait que ces tribus n'aient été qu'une ou plusieurs ne sont pas clairs.

Shapur II
Chapour II
The Trustees of the British Museum (CC BY-NC-SA)

En général, le terme Kidarites se rapporte le plus souvent à ce peuple nomade. Leurs relations avec les Sassanides étaient compliquées étant donné qu'ils étaient périodiquement soit ennemis, soit alliés. Selon les archives chinoises, les Kidarites établirent leur domaine à Balkh vers le milieu ou la fin du 4ème siècle de notre ère, remplaçant ainsi les Kouchano-Sassanides.

Outre les Kidarites, d'autres peuples tribaux entrèrent dans l'histoire de l'Afghanistan entre le IVe et le VIe siècle de notre ère. Là encore, les preuves disponibles par le biais des pièces de monnaie, des écritures et des documents écrits laissent une image peu claire. Certaines sources indiquent que les Kidarites consolidèrent leur pouvoir en Afghanistan, se déplacèrent vers le sud-est de l'Inde et entrèrent en conflit avec les Guptas. D'autres supposent que des peuples nomades appelés les Alkhons les chassèrent dans cette direction en prenant le contrôle des régions autour de Balkh et de Kaboul.

De grandes parties de l'Afghanistan étaient désormais entre les mains de tribus nomades qui poussaient encore plus loin vers l'Inde et défiaient les Guptas.

Les Hephtalites

Un autre groupe de tribus revêtant une importance particulière était les Hephthalites, parfois appelés Huns blancs. Ils firent leur entrée dans l'histoire de l'Afghanistan vers 442 de notre ère. Après des conflits initiaux avec les Sassanides, il semble qu'ils aient formé une alliance temporaire. Péroz Ier (r. de 459 à 484) se serait largement appuyé sur le soutien des Hephtalites pour sortir vainqueur des luttes de pouvoir internes aux Sassanides. En outre, cette alliance joua un rôle essentiel dans la reconquête des anciennes provinces des Kouchano-Sasanides auprès du peuple nomade au pouvoir.

En 467 de notre ère, la plupart des régions perdues étaient de nouveau sous le contrôle des Sassanides. Les Hephtalites obtinrent des terres en récompense de leur soutien. Mais cela semble avoir été insuffisant car un conflit ouvert éclata quelques années plus tard entre les anciens alliés. Après une décennie de guerre, les Huns blancs portèrent un coup fatal aux Sassanides lors de la bataille de Hérat en 484 de notre ère. Cette victoire décisive entraîna la quasi destruction des forces sassanides et la mort de Péroz Ier.

White Hun (Huna) Empire
Empire des Huns blancs
John Huntington (CC BY-NC-SA)

Les Hephtalites pillèrent et subjuguèrent de grandes parties du domaine sassanide oriental au cours des années suivantes. Selon certaines sources, un autre peuple tribal, les Huns nezak, en profita pour s'installer dans la région du Zaboulistan, dans le sud de l'Afghanistan. De grandes parties de l'Afghanistan étaient désormais entre les mains de tribus nomades qui poussaient encore plus loin vers l'Inde et défiaient les Guptas. Mais contrairement aux souverains précédents, les Héphtalites ne semblent avoir eu qu'un impact limité sur la culture de la région.

La fin du règne des Hephtalites fut due aux forces combinées d'un ancien ennemi revitalisé et d'un nouveau groupe de gens des steppes. L'Empire sassanide avait retrouvé sa force et sa confiance au milieu du VIe siècle, après des conflits fructueux contre les Byzantins. Au nord de la rivière Oxus, ils trouvèrent un allié sûr dans le premier khaganat turc, établi par les nomades goktürk.

Leurs forces combinées portèrent un coup fatal aux Héphtalites. En conséquence, les régions de ces derniers au nord de la rivière Oxus passèrent aux mains des Goktürk. Le territoire au sud repassa sous le contrôle des Sassanides. Les Hephtalites restants se divisèrent en petits royaumes et ne pourraient plus jamais exercer quelque domination que ce soit en Afghanistan.

L'évolution culturelle au fil des siècles

Les connaissances sur l'évolution culturelle avant l'apparition des documents écrits sont rares. Diverses découvertes impliquent des échanges avec des cultures voisines, comme les Harrapans. Les régions riches en minéraux de l'Afghanistan permettaient l'échange de matériaux comme l'or, l'argent, le cuivre et le lapis-lazuli contre des céréales, du coton ou des produits similaires. Les cultures ultérieures, telles que les BMAC, firent preuve d'un grand sens artistique et de compétences en matière de travail du métal en produisant des figurines complexes et des poteries peintes.

L'usage de l'écriture apparut à partir de la domination perse. Cependant, on soupçonne qu'elle soit apparue encore plus tôt. Les Achéménides mirent également en œuvre divers aspects de gestion dans leurs dominions, tels qu'un système fiscal, des réformes juridiques et la division des zones administratives. Les arts et l'architecture présentaient un mélange unique de l'héritage et des cultures iraniennes sous la domination perse.

Fragment from a Buddhist Temple in Afghanistan
Fragment d'un temple bouddhiste en Afghanistan
James Blake Wiener (CC BY-NC-SA)

La culture hellénistique joua un rôle important dans l'histoire ancienne de l'Afghanistan après les conquêtes d'Alexandre. De multiples civilisations incorporèrent la langue, les écritures et la monnaie grecques jusqu'à longtemps après le déclin de la puissance hellénique. Les édits grecs de Kandahar d'Ashoka (qui enseignent des préceptes moraux) et la présentation de sujets bouddhistes dans un style gréco-romain dans le nord du sous-continent indien en sont des exemples. Les pièces de monnaie de style hellénique étaient encore utilisées bien plus tard, par exemple par les Kouchans et les Hephtalites.

L'architecture grecque se répandit également dans le monde entier grâce aux efforts d'urbanisation rapide. Jusqu'à aujourd'hui, vous pouvez trouver des ruines de bâtiments et de styles helléniques classiques, tels que les colonnes doriques, ioniques et corinthiennes. Les influences orientales et indiennes se sont mêlées, en particulier au sein des royaumes gréco-bactriens et indo-grecs. La ville d'Aï Khanoum en est un bon exemple. Ses vestiges présentent des bâtiments de style hellénique classique, tels qu'un gymnase, un théâtre ou plusieurs temples. Le palais royal, quant à lui, présente une combinaison distincte d'architecture perse et grecque.

Les développements culturels à venir résultaient souvent de la synthèse d'éléments helléniques et de différents éléments locaux. Les Parthes, par exemple, poursuivirent la tradition de frappe de monnaie des puissances dominantes précédentes et réutilisèrent de nombreux bâtiments existants, mais apportèrent leur propre contribution à d'autres aspects de la vie quotidienne. Les vêtements, l'architecture et les arts portaient des marques évidentes de leurs origines nomades. Naturellement, la culture du cheval joua un rôle essentiel au sein de leur empire. L'élevage de chevaux de qualité supérieure n'était pas seulement un signe de pouvoir pour l'élite, mais aussi un élément crucial de la puissance militaire de l'armée parthe.

Sous le règne des Kouchans, une étonnante variété culturelle prévalait, et pas seulement en ce qui concerne les religions pratiquées. Dans leur royaume, l'art gréco-romain côtoyait des pièces aux influences clairement asiatiques (occidentales). Des bijoux et des décorations opulentes, ainsi que des objets métalliques, des céramiques et des textiles finement travaillés, témoignaient du statut social. Grâce à un état d'esprit libéral général et à sa situation sur des routes commerciales essentielles, l'empire favorisa également le développement de diverses avancées philosophiques et scientifiques.

Ce mécénat se poursuivit sous le règne des Sassanides. De plus, les Sassanides considéraient la renaissance de la culture perse comme leur plus grand devoir. La combinaison des caractéristiques achéménides avec des éléments parthes et helléniques est un signe distinctif de l'art sassanide. Les textiles, les peintures et les autres objets d'artisanat étaient ornés de couleurs vives. Les tissus et les tapis, en particulier, faisaient partie des produits sassanides les plus admirés. Nombre de ces aspects serviront plus tard de base à l'art musulman.

Perspectives

Au milieu du VIe siècle, l'Afghanistan contemporain traversa une période de turbulences. L'impact des nomades indo-européens semblait brisé et les Sassanides reprirent le contrôle. Mais moins de 100 ans plus tard, l'un des développements les plus cruciaux allait se produire. Armés et dotés d'une foi inébranlable, les premiers Arabes devinrent la puissance dominante. Grâce à leur influence, les enseignements du prophète Mahomet se répandirent, faisant de l'islam la religion dominante de l'Afghanistan jusqu'à nos jours.

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Bibliographie

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Ralf Rotheimer
Ralf is interested in how history and mythology still shape our lives today. As a freelance author, he has written various articles about mythology and history's impact on pop culture in Germany's largest web-magazine for fiction.

Citer cette ressource

Style APA

Rotheimer, R. (2022, août 08). Afghanistan Ancien [Ancient Afghanistan]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-20939/afghanistan-ancien/

Style Chicago

Rotheimer, Ralf. "Afghanistan Ancien." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le août 08, 2022. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-20939/afghanistan-ancien/.

Style MLA

Rotheimer, Ralf. "Afghanistan Ancien." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 08 août 2022. Web. 24 avril 2024.

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