Écriture Égyptienne Ancienne

Définition

Joshua J. Mark
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 16 novembre 2016
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Disponible dans ces autres langues: anglais, russe, espagnol
Fragment from pyramid of king Pepi I (by Osama Shukir Muhammed Amin, Copyright)
Fragment de la pyramide du roi Pepi I
Osama Shukir Muhammed Amin (Copyright)

L'écriture égyptienne ancienne est connue sous le nom de hiéroglyphes ("gravures sacrées") et s'est développée à un moment donné avant le début de la période dynastique (vers 3150 -2613 avant notre ère). Selon certains chercheurs, le concept de l'écriture fut d'abord développé en Mésopotamie et arriva en Égypte par le biais du commerce. Bien qu'il y ait certainement eu des échanges interculturels entre les deux régions, les hiéroglyphes égyptiens sont entièrement d'origine égyptienne ; il n'y a aucune preuve que les premiers écrits décrivent des concepts, des lieux ou des objets non égyptiens, et les premiers pictogrammes égyptiens n'ont aucune corrélation avec les premiers signes mésopotamiens. Le terme "hiéroglyphes" est un mot grec ; les Égyptiens appelaient leur écriture medu-netjer, "les mots du dieu", car ils croyaient que l'écriture leur avait été donnée par le grand dieu Thot.

Selon un ancien conte égyptien, au début des temps, Thot s'était créé lui-même et, sous la forme d'un ibis, avait pondu l'œuf cosmique qui contenait toute la création. Dans une autre histoire, Thoth émergea des lèvres du dieu soleil Râ à l'aube des temps, et dans une autre, il naquit des disputes des dieux Horus et Seth, représentant les forces de l'ordre et du chaos. Dans tous ces cas, cependant, la constante est que Thot était né avec une immense étendue de connaissances et, parmi les plus importantes, la connaissance du pouvoir des mots.

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Thot donna cette connaissance aux êtres humains gratuitement, mais c'était une responsabilité qu'il souhaitait qu'ils prennent au sérieux. Les mots pouvaient blesser, guérir, élever, détruire, condamner et même faire passer quelqu'un de la mort à la vie. L'égyptologue Rosalie David commente ce point :

Le but principal de l'écriture n'était pas décoratif, et elle n'était pas destinée à l'origine à un usage littéraire ou commercial. Sa fonction la plus importante était de fournir un moyen par lequel certains concepts ou événements pouvaient être amenés à l'existence. Les Égyptiens croyaient que si quelque chose était consigné par écrit, il pouvait être répété à plusieurs reprises par des moyens magiques. (199)

Thoth, Luxor Relief
Toth, relief de Louxor
Jon bodsworth (Copyright, fair use)

Ce concept n'est pas aussi étrange qu'il n'y paraît à première vue. Tout écrivain sait que l'on n'a souvent aucune idée de ce que l'on veut dire avant la fin du premier jet, et tout lecteur avide comprend la "magie" de découvrir des mondes inconnus à l'intérieur d'un livre et de faire en sorte que cette magie se reproduise chaque fois que le livre est ouvert. La référence de David aux "concepts ou événements" qui naissent de l'écriture est une notion commune aux écrivains. L'auteur américain William Faulkner déclara dans son discours de remise du prix Nobel qu'il écrivait "pour créer à partir des matériaux de l'esprit humain quelque chose qui n'existait pas auparavant" (1). Cette même motivation fut exprimée en des termes différents par de nombreux écrivains au cours des siècles, mais avant même qu'ils n'existent, les anciens Égyptiens avaient bien compris ce concept. Le grand don de Thot était la capacité non seulement de s'exprimer, mais aussi de pouvoir littéralement changer le monde grâce au pouvoir des mots. Cependant, avant que cela ne se produise, avant que le don ne puisse être pleinement utilisé, il devait être compris.

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Création de l'écriture

Même si Thot avait contribué à donner aux humains leur système d'écriture (et, pour les Égyptiens, "humanité" équivaut à "égyptien"), les Égyptiens de l'Antiquité avaient dû découvrir par eux-mêmes ce qu'était ce don et comment l'utiliser. Vers la fin de la période prédynastique en Égypte (c. 6000 - c. 3150 avant notre ère), ils commencèrent à utiliser des symboles pour représenter des concepts simples. L'égyptologue Miriam Lichtheim écrit que cette écriture primitive "se limitait aux notations les plus brèves destinées à identifier une personne ou un lieu, un événement ou une possession" (3). Il est fort probable que l'écriture ait d'abord servi au commerce, pour transmettre des informations sur les marchandises, les prix, les achats, entre un point et un autre. Cependant, la première preuve d'écriture égyptienne provient des tombes, sous la forme de listes d'offrandes, au début de la période dynastique.

Egyptian Hieroglyphics
Hiéroglyphes égyptiens
Jan van der Crabben (CC BY-NC-SA)

La mort n'était pas la fin de la vie pour les Égyptiens de l'Antiquité; elle n'était qu'une transition d'un état à un autre. Les morts vivaient dans l'au-delà et comptaient sur les vivants pour se souvenir d'eux et leur présenter des offrandes de nourriture et de boisson. Une liste d'offrandes était un inventaire des cadeaux dus à une personne particulière et inscrite sur le mur de sa tombe. Une personne qui avait accompli de grandes actions, occupé une position d'autorité élevée ou mené des troupes à la victoire sur le champ de bataille devait recevoir des offrandes plus importantes qu'une autre qui avait fait relativement peu de choses de sa vie. La liste était accompagnée d'une brève épitaphe indiquant qui était la personne, ce qu'elle avait fait et pourquoi elle devait recevoir de telles offrandes. Ces listes et épitaphes pouvaient parfois être très brèves, mais la plupart du temps, elles ne l'étaient pas et s'allongeaient au fur et à mesure que cette pratique se poursuivait. Lichtheim explique:

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La liste des offrandes s'est allongée jusqu'au jour où un esprit inventif s'est rendu compte qu'une courte prière pour les offrandes remplacerait efficacement cette liste complexe. Une fois que cette prière, qui existait peut-être déjà sous forme orale, fut mise par écrit, elle devint l'élément de base autour duquel s'organisèrent les textes et les représentations des tombes. De même, les listes toujours plus longues des rangs et des titres d'un fonctionnaire ont pris vie lorsque l'imagination a commencé à les étoffer par des récits, et l'Autobiographie est née. (3)

L'autobiographie et la prière devinrent les premières formes de la littérature égyptienne et furent créées à l'aide de l'écriture hiéroglyphique.

Développement et utilisation de l'écriture hiéroglyphique

Les hiéroglyphes se développèrent à partir des premiers pictogrammes. Les gens utilisaient des symboles, des images pour représenter des concepts tels qu'une personne ou un événement. Le problème avec un pictogramme, cependant, est que les informations qu'il contient sont assez limitées. On peut dessiner l'image d'une femme, d'un temple et d'un mouton, mais on n'a aucun moyen de relater leur lien. La femme vient-elle du temple ou y va-t-elle ? Le mouton est-il une offrande qu'elle conduit aux prêtres ou un cadeau qu'ils lui font ? La femme se rend-elle au temple ou promène-t-elle simplement une brebis dans les environs ? La femme et le mouton ont-ils un lien de parenté ? L'écriture pictographique primitive ne permettait pas de répondre à ces questions.

Les Égyptiens développèrent le même système que les Sumériens, mais ajoutèrent des logogrammes (symboles représentant des mots) et des idéogrammes à leur écriture.

Les Sumériens de l'ancienne Mésopotamie avaient déjà rencontré ce problème d'écriture et créé une écriture avancée vers 3200 av. J.-C. dans la ville d'Uruk. La théorie selon laquelle l'écriture égyptienne s'était développée à partir de l'écriture mésopotamienne est en fait fortement remise en question par ce développement, car si les Égyptiens avaient appris l'art de l'écriture des Sumériens, ils auraient dépassé le stade des pictogrammes et commencé par la création sumérienne de phonogrammes - des symboles qui représentent le son. Les Sumériens apprirent à étoffer leur langage écrit au moyen de symboles représentant directement ce langage. Ainsi, s'ils souhaitaient transmettre une information spécifique concernant une femme, un temple et un mouton, ils pouvaient écrire : "La femme a apporté le mouton en offrande au temple", et le message était clair.

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Les Égyptiens développèrent ce même système mais ajoutèrent des logogrammes (symboles représentant des mots) et des idéogrammes à leur écriture. Un idéogramme est un "signe sensoriel" qui transmet clairement un certain message par le biais d'un symbole reconnaissable. Le meilleur exemple d'idéogramme est probablement le signe moins: on reconnaît qu'il signifie une soustraction. L'emoji est un exemple moderne, familier à tous ceux qui ont l'habitude d'envoyer des SMS ; en plaçant l'image d'un visage rieur à la fin d'une phrase, on fait comprendre au lecteur que l'on plaisante ou que l'on trouve le sujet amusant. Le phonogramme, le logogramme et l'idéogramme constituent la base de l'écriture hiéroglyphique. Rosalie David explique :

Il existe trois types de phonogrammes dans les hiéroglyphes: les signes unilitères ou alphabétiques, où un hiéroglyphe (image) représente une seule consonne ou valeur sonore; les signes bilitères, où un hiéroglyphe représente deux consonnes; et les signes trilitères, où un hiéroglyphe représente trois consonnes. L'alphabet égyptien compte vingt-quatre signes hiéroglyphiques et ce sont les phonogrammes les plus couramment utilisés. Mais comme il n'y a jamais eu de système purement alphabétique, ces signes étaient placés à côté d'autres phonogrammes (bilittéraux et trilittéraux) et d'idéogrammes. Les idéogrammes étaient souvent placés à la fin d'un mot (épelé en phonogrammes) pour en préciser le sens et, lorsqu'ils sont utilisés de cette façon, on les appelle des "déterminatifs". Cela aide de deux façons : l'ajout d'un déterminatif aide à clarifier le sens d'un mot particulier, puisque certains mots semblent similaires ou identiques les uns aux autres lorsqu'ils sont épelés et écrits uniquement dans les phonogrammes ; et parce que les déterminatifs se trouvent à la fin du mot, ils peuvent indiquer où un mot se termine et où un autre commence. (193)

Egyptian Stela of Horemheb
Stèle égyptienne d'Horemheb
Osama Shukir Muhammed Amin (Copyright)

Un exemple moderne de la façon dont les hiéroglyphes étaient écrits serait un message texte dans lequel un emoji d'un visage en colère est placé après l'image d'une école. Sans avoir à utiliser de mots, on peut transmettre le concept de "Je déteste l'école" ou "Je suis en colère contre l'école". Si l'on voulait rendre son problème plus clair, on pouvait placer l'image d'un enseignant ou d'un camarade de classe avant l'idéogramme du visage en colère ou une série d'images racontant l'histoire d'un problème avec un enseignant. Les déterminanatifs étaient importants dans l'écriture, notamment parce que les hiéroglyphes pouvaient être écrits de gauche à droite ou de droite à gauche, de bas en haut ou de haut en bas. Les inscriptions sur les portes des temples, les portes des palais et les tombes vont dans la direction qui convient le mieux au message. La beauté de l'œuvre finale était la seule considération du sens de lecture de l'écriture. L'égyptologue Karl-Theodor Zauzich note :

Le placement des hiéroglyphes les uns par rapport aux autres était régi par des règles esthétiques. Les Égyptiens ont toujours essayé de regrouper les signes dans des rectangles équilibrés. Par exemple, le mot "santé" s'écrivait avec les trois consonnes s-n-b. Celles-ci n'auraient pas été écrites [dans un rectangle]. Un Égyptien n'aurait pas écrit ces signes [de manière linéaire], car le groupe aurait été laid, il aurait été considéré comme "incorrect". L'écriture "correcte" consistait à regrouper les signes dans un rectangle... Le travail de construction était quelque peu allégé par le fait que les hiéroglyphes individuels pouvaient être agrandis ou réduits selon les besoins du groupe et que certains signes pouvaient être placés horizontalement ou verticalement. Les scribes inversaient même l'ordre des signes s'il leur semblait qu'un rectangle plus équilibré pouvait être obtenu en les écrivant dans le mauvais ordre. (4)

L'écriture pouvait être facilement lue en reconnaissant la direction dans laquelle les phonogrammes étaient orientés. Les images d'une inscription sont toujours tournées vers le début de la ligne de texte; si le texte doit être lu de gauche à droite, les visages des personnes, des oiseaux et des animaux seront tournés vers la gauche. Ces phrases étaient assez faciles à lire pour ceux qui connaissaient la langue égyptienne, mais pas pour les autres. Zauzich note que "nulle part parmi tous les hiéroglyphes, on ne trouve un seul signe représentant le son d'une voyelle" (6). Les voyelles étaient placées dans une phrase par le lecteur qui comprenait la langue parlée. Zauzich écrit :

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Ceci est moins compliqué qu'il n'y paraît. Par exemple, n'importe lequel d'entre nous peut lire une publicité composée presque entièrement de consonnes :

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De la même manière, les anciens Égyptiens étaient capables de lire les hiéroglyphes en reconnaissant les "lettres" manquantes dans une phrase et en les appliquant.

Autres écritures

Les hiéroglyphes étaient composés d'un "alphabet" de 24 consonnes de base qui transmettaient un sens, mais de plus de 800 symboles différents pour exprimer ce sens avec précision, qui devaient tous être mémorisés et utilisés correctement. Zauzich répond à la question qui peut immédiatement venir à l'esprit :

On peut se demander pourquoi les Égyptiens ont développé un système d'écriture compliqué utilisant plusieurs centaines de signes alors qu'ils auraient pu utiliser leur alphabet d'une trentaine de signes et rendre leur langue beaucoup plus facile à lire et à écrire. Ce fait déconcertant a probablement une explication historique: les signes à une consonne n'ont été "découverts" qu'après que les autres signes aient été utilisés. Comme l'ensemble du système d'écriture était alors établi, il ne pouvait être abandonné, pour des raisons religieuses spécifiques. Les hiéroglyphes étaient considérés comme un don précieux de Thot, le dieu de la sagesse. Cesser d'utiliser un grand nombre de ces signes et changer tout le système d'écriture aurait été considéré à la fois comme un sacrilège et une perte immense, sans compter qu'un tel changement aurait vidé d'un seul coup tous les textes anciens de leur sens. (11)

Malgré tout, les hiéroglyphes exigeaient manifestement beaucoup de travail de la part d'un scribe et c'est pourquoi une autre écriture plus rapide fut développée peu de temps après, connue sous le nom de hiératique ("écriture sacrée"). L'écriture hiératique utilisait des caractères qui étaient des versions simplifiées des symboles hiéroglyphiques. L'écriture hiératique apparut au début de la période dynastique en Égypte, après que l'écriture hiéroglyphique était déjà bien développée.

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Hieratic Book of the Dead of Padimin
Livre hiératique des morts de Padimin
Osama Shukir Muhammed Amin (Copyright)

Les hiéroglyphes continuèrent à être utilisés tout au long de l'histoire de l'Égypte dans toutes les formes d'écriture, mais devinrent principalement l'écriture des monuments et des temples. Les hiéroglyphes, regroupés dans leurs rectangles magnifiquement formés, se prêtaient à la grandeur des inscriptions monumentales. Le hiératique fut d'abord utilisé dans les textes religieux, puis dans d'autres domaines tels que l'administration des affaires, les textes magiques, les lettres personnelles et commerciales et les documents juridiques tels que les testaments et les dossiers judiciaires. Le hiératique était écrit sur des papyrus ou des ostraca et exercé sur la pierre et le bois. Il évolua vers une écriture cursive vers 800 av. J.-C. (connue sous le nom de "hiératique anormal"), puis fut remplacé vers 700 av. J.-C. par l'écriture démotique.

L'écriture démotique ("écriture populaire") était utilisée dans tous les types d'écriture, tandis que les hiéroglyphes restaient l'écriture des inscriptions monumentales dans la pierre. Les Égyptiens appelaient la démotique sekh-shat, "écriture pour les documents", et elle devint l'écriture la plus populaire pour les 1000 années suivantes dans toutes sortes d'œuvres écrites. L'écriture démotique semble être née dans la région du delta de Basse-Égypte et se répandit vers le sud au cours de la 26e dynastie de la troisième période intermédiaire (c.1069-525 avant notre ère). L'écriture démotique continua à être utilisée pendant la dernière période de l'Égypte ancienne (525-332 av. J.-C.) et la dynastie ptolémaïque (332-30 av. J.-C.) jusqu'à l'Égypte romaine, où elle fut remplacée par l'écriture copte.

Rosetta Stone Detail, Demotic Text
Détail de la pierre de Rosette, texte démotique
Osama Shukir Muhammed Amin (Copyright)

Le copte était l'écriture des coptes, des chrétiens égyptiens, qui parlaient des dialectes égyptiens mais écrivaient en alphabet grec avec quelques ajouts de l'écriture démotique. Comme la langue grecque comportait des voyelles, les Coptes les incorporèrent dans leur écriture pour que le sens soit clair pour tous, quelle qu'ait été sa langue maternelle. L'écriture copte fut utilisée pour copier et préserver un certain nombre de documents importants, notamment les livres du Nouveau Testament chrétien, et servit également de clé aux générations suivantes pour comprendre les hiéroglyphes.

Perte et découverte

Il a été dit que la signification des hiéroglyphes s'était perdue au cours des dernières périodes de l'histoire égyptienne, les gens ayant oublié comment lire et écrire les symboles. En réalité, les hiéroglyphes étaient encore utilisés jusqu'à la dynastie ptolémaïque et ne tombèrent en désuétude qu'avec l'apparition de la nouvelle religion chrétienne au début de la période romaine. L'utilisation des hiéroglyphes connut des ratés tout au long de l'histoire du pays, mais l'art ne fut vraiment perdu que lorsque le monde représenté par l'écriture changea. L'écriture copte continuant à être utilisée dans le nouveau paradigme de la culture égyptienne, l'écriture hiéroglyphique tomba dans l'oubli. Au moment de l'invasion arabe du 7e siècle, personne en Égypte ne savait ce que signifiaient les inscriptions hiéroglyphiques.

Lorsque les nations européennes commencèrent à explorer le pays au 17e siècle, elles ne savaient pas plus que les musulmans que les hiéroglyphes étaient une langue écrite. Au 17e siècle, les hiéroglyphes furent accusés d'être des symboles magiques et cette pensée fut principalement encouragée par le travail de l'érudit et polymathe allemand Athanasius Kircher (1620-1680). Kircher suivit l'exemple des écrivains de la Grèce antique qui n'avaient pas non plus compris la signification des hiéroglyphes et croyaient qu'il s'agissait de symboles. Prenant leur interprétation comme un fait et non comme une conjecture, Kircher insista sur une interprétation où chaque symbole représentait un concept, de la même manière que le signe de la paix moderne serait compris. Ses tentatives de déchiffrer l'écriture égyptienne finirent donc par échouer car il opérait à partir d'un modèle erroné.

Rosetta Stone
Pierre de Rosette
Trustees of the British Museum (Copyright)

De nombreux autres chercheurs tentèrent de déchiffrer la signification des symboles de l'Égypte ancienne sans succès entre les travaux de Kircher et le XIXe siècle, mais ils n'avaient aucune base pour comprendre ce sur quoi ils travaillaient. Même lorsqu'il semblait que les symboles suggéraient un certain modèle, comme celui que l'on trouve dans un système d'écriture, il n'y avait aucun moyen de reconnaître la signification de ces modèles. Cependant, en 1798, lorsque l'armée de Napoléon envahit l'Égypte, la pierre de Rosette fut découverte par l'un de ses lieutenants, qui reconnut son importance potentielle et la fit envoyer à l'institut d'Égypte au Caire. La pierre de Rosette est une proclamation en grec, en hiéroglyphes et en démotique datant du règne de Ptolémée V (204-181 av. J.-C.). Les trois textes transmettent les mêmes informations, conformément à l'idéal ptolémaïque d'une société multiculturelle ; que l'on lise le grec, les hiéroglyphes ou le démotique, on est en mesure de comprendre le message de la pierre.

Les travaux de déchiffrage des hiéroglyphes à l'aide de la pierre furent retardés jusqu'à ce que les Anglais ne battent les Français lors des guerres napoléoniennes et que la pierre soit transportée du Caire en Angleterre. Une fois sur place, les savants se mirent à essayer de comprendre l'ancien système d'écriture, mais ils travaillaient toujours à partir de la compréhension antérieure que Kircher avait avancée de manière si convaincante. Le polymathe et érudit anglais Thomas Young (1773-1829) en vint à penser que les symboles représentaient des mots et que les hiéroglyphes étaient étroitement liés aux écritures démotiques et, plus tard, coptes. Ses travaux furent repris par son collègue, parfois rival, le philologue et érudit Jean-François Champollion (1790-1832).

Champollion's notes from the Rosetta Stone
Les notes de Champollion tirées de la pierre de Rosette
Priscila Scoville (CC BY-NC-SA)

Le nom de Champollion est à jamais lié à la pierre de Rosette et au déchiffrement des hiéroglyphes en raison de la célèbre publication de son travail en 1824 qui démontra de manière concluante que les hiéroglyphes égyptiens étaient un système d'écriture composé de phonogrammes, de logogrammes et d'idéogrammes. La controverse entre Young et Champollion sur la question de savoir qui avait fait les découvertes les plus significatives et qui méritait la plus grande reconnaissance se reflète dans le même débat qui se poursuit de nos jours entre les chercheurs. Il semble toutefois évident que les travaux de Young jetèrent les bases sur lesquelles Champollion put s'appuyer, mais c'est la percée de Champollion qui finit par déchiffrer l'ancien système d'écriture et ouvrir la culture et l'histoire égyptiennes au monde.

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Joshua J. Mark
Auteur indépendant et ex-Professeur de Philosophie à temps partiel au Marist College de New York, Joshua J. Mark a vécu en Grèce et en Allemagne, et a voyagé à travers l'Égypte. Il a enseigné l'histoire, l'écriture, la littérature et la philosophie au niveau universitaire.

Citer cette ressource

Style APA

Mark, J. J. (2016, novembre 16). Écriture Égyptienne Ancienne [Ancient Egyptian Writing]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-15434/ecriture-egyptienne-ancienne/

Style Chicago

Mark, Joshua J.. "Écriture Égyptienne Ancienne." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le novembre 16, 2016. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-15434/ecriture-egyptienne-ancienne/.

Style MLA

Mark, Joshua J.. "Écriture Égyptienne Ancienne." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 16 nov. 2016. Web. 22 avril 2024.

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