Akkad

Définition

Joshua J. Mark
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 28 avril 2011
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Disponible dans ces autres langues: anglais, arabe, grec, persan, russe, espagnol, suédois
Map of the Akkadian Empire (by Nareklm, GNU FDL)
Carte de l'Empire Akkadien
Nareklm (GNU FDL)

Akkad était le siège de l'Empire akkadien (2334-2218 av. J.-C.), la première entité politique multinationale au monde, fondée par Sargon le Grand (r. de 2334 à 2279 av. J.-C.) qui unifia la Mésopotamie sous son règne et établit le modèle que les rois mésopotamiens ultérieurs suivirent ou tentèrent de surpasser. L'empire akkadien établit un certain nombre d'innovations qui deviendraient plus tard des normes.

Personne ne sait où se trouvait la ville d'Akkad, comment elle prit de l'importance, ni la façon précise dont elle disparut, mais elle fut le siège de l'Empire akkadien qui régnait sur une vaste étendue de la région de l'ancienne Mésopotamie. On sait qu'Akkad (également appelée Agadé) était une ville située le long de la rive occidentale de l'Euphrate, peut-être entre les villes de Sippar et de Kish (ou, peut-être, entre Mari et Babylone ou, même, ailleurs le long de l'Euphrate). Selon la légende, elle fut construite par le roi Sargon le Grand qui unifia la Mésopotamie sous le règne de son empire akkadien et établit la norme pour les futures formes de gouvernement en Mésopotamie.

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Sargon (ou ses scribes) prétendait que l'empire akkadien s'étendait du golfe Persique jusqu'à la mer Méditerranée et Chypre, en passant par le Koweït, l'Irak, la Jordanie et la Syrie (peut-être le Liban) actuels, et par la partie inférieure de l'Asie mineure (on prétend également qu'il s'étendait jusqu'en Crète, dans la mer Égée). Si la taille et l'étendue de l'empire basé à Akkad sont contestées, il ne fait aucun doute que Sargon le Grand créa bel et bien le premier empire multinational au monde.

Le roi d'Uruk et l'ascension de Sargon

La langue de la ville, l'akkadien, était déjà utilisée avant la naissance de l'empire akkadien (notamment dans la riche cité de Mari où de vastes tablettes cunéiformes ont contribué à définir les événements pour les historiens ultérieurs), et il est possible que Sargon ait restauré Akkad, plutôt que de la construire. Il convient également de noter que Sargon n'a pas été le premier souverain à unir les villes et les tribus disparates sous une même domination. Le roi d'Uruk, Lugal-zagesi, avait déjà accompli cette tâche sous son propre règne, mais à une échelle bien moindre, .

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Il fut vaincu par Sargon qui, améliorant le modèle que lui avait donné Uruk, fit de sa propre dynastie une entité plus grande et plus forte. L'historienne Gwendolyn Leick écrit : "D'après ses propres inscriptions, il [Sargon] a mené une vaste campagne au-delà de la Mésopotamie et s'est assuré l'accès à toutes les grandes routes commerciales, par mer et par terre" (8). Alors que Lugal-zagesi avait réussi à subjuguer les villes de Sumer, Sargon, lui, avait l'intention de conquérir le monde connu. L'historien Will Durant écrit :

À l'est et à l'ouest, au nord et au sud, le puissant guerrier marcha, conquérant l'Élam, lavant ses armes dans le golfe Persique en symbole de son triomphe, traversant l'Asie occidentale, atteignant la Méditerranée et établissant le premier grand empire de l'histoire. (121-122)

Akkadian Ruler
Souverain Akkadien
Sumerophile (Public Domain)

Cet empire stabilisa la région de la Mésopotamie et permit le développement de l'art, de la littérature, de la science, des progrès agricoles et de la religion. Selon la liste des rois sumériens, il y eut cinq souverains d'Akkad : Sargon, Rimush, Manishtusu, Naram-Sin (également connu sous le nom de Naram-Suen), et Shar-Kali-Sharri qui maintinrent la dynastie pendant 142 ans avant qu'elle ne s'effondre. Au cours de cette période, l'akkadien remplaça le sumérien comme lingua franca, sauf dans les services sacrés, et l'habillement, l'écriture et les pratiques religieuses akkadiennes s'infiltrèrent dans les coutumes des conquis de la région. La meilleure façon de comprendre l'essor et la chute d'Akkad (relativement parlant) est d'examiner les dirigeants de la ville et l'empire qu'ils géraient.

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Le règne de Sargon

Sargon le Grand fonda ou restaura la ville d'Akkad, conquit "les quatre coins de l'univers" et maintint l'ordre dans son empire.

Sargon le Grand fonda ou restaura la ville d'Akkad et régna de 2334 à 2279 avant notre ère. Il conquit ce qu'il appelait "les quatre coins de l'univers" et maintint l'ordre dans son empire grâce à des campagnes militaires répétées. La stabilité apportée par cet empire donna lieu à la construction de routes, à l'amélioration de l'irrigation, à l'élargissement de la sphère d'influence dans le commerce, ainsi qu'aux développements susmentionnés dans les arts et les sciences.

L'empire akkadien créa le tout premier système postal où des tablettes d'argile inscrites en écriture cunéiforme akkadienne étaient enveloppées dans des enveloppes extérieures d'argile marquées du nom et de l'adresse du destinataire et du sceau de l'expéditeur. Ces lettres ne pouvaient être ouvertes que par la personne à qui elles étaient destinées, car il n'y avait aucun moyen d'ouvrir l'enveloppe d'argile, sauf en la brisant.

Afin de maintenir sa présence dans tout son empire, Sargon plaça de façon stratégique ses meilleurs hommes de confiance aux postes de pouvoir dans les différentes villes. Les "citoyens d'Akkad", comme les appelle un texte babylonien ultérieur, étaient les gouverneurs et les administrateurs de plus de 65 villes différentes. Sargon plaça aussi sa fille, Enheduanna, en tant que grande prêtresse d'Inanna à Ur et, à travers elle, semble avoir été capable de manipuler les affaires religieuses et culturelles à distance. Enheduanna est reconnue aujourd'hui comme le premier écrivain connu par son nom et, d'après ce que l'on sait de sa vie, elle semble avoir été une prêtresse très compétente et puissante en plus de créer ses impressionnants hymnes à Inanna.

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Les successeurs de Sargon : Rimush et Manishtusu

Sargon régna pendant 56 ans et, après sa mort, son fils Rimush (r. de 2279 à 2271 av. J.-C.) lui succéda en conservant étroitement la politique de son père. Les villes se rebellèrent après la mort de Sargon, et Rimush passa les premières années de son règne à rétablir l'ordre. Il fit campagne contre l'Élam, qu'il vainquit, et affirma dans une inscription avoir ramené de grandes richesses à Akkad. Il ne régna que neuf ans avant de mourir et son frère Manishtusu (r. de 2271 à 2261 av. J.-C.) lui succéda. Selon certaines hypothèses, Manishtusu aurait provoqué la mort de son frère pour accéder au trône.

L'histoire se répéta après la mort de Rimush, et Manishtusu dut réprimer des révoltes généralisées dans tout l'empire avant de s'atteler à la gouvernance de ses terres. Il développa le commerce et, selon ses inscriptions, s'engagea dans le commerce à longue distance avec Magan et Meluhha (que l'on pense être la haute Égypte et le Soudan). Il entreprit également de grands projets de construction dans tout l'empire et on pense qu'il ordonna la construction du temple d'Ishtar à Ninive qui était considéré comme une pièce d'architecture très impressionnante.

En outre, il entreprit une réforme agraire et, d'après ce que l'on sait, améliora l'empire de son père et de son frère. L'obélisque de Manishtusu, décrivant la répartition des parcelles de terre, peut être vu aujourd'hui au musée du Louvre, à Paris. Sa mort est quelque peu mystérieuse mais, selon certains experts, dont Leick, "Manishtusu a été tué par ses courtisans avec leurs sceaux cylindriques", bien qu'aucun motif précis n'ait été avancé pour ce meurtre (111).

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Naram-Sin : le plus grand des rois akkadiens

Naram-Sin (également Naram-Suen) succéda à son père, Manishtusu, et régna de 2261 à 2224 avant notre ère. Comme son père et son oncle avant lui, Naram-Sin dut réprimer des rébellions dans tout l'empire avant de pouvoir commencer à gouverner, mais une fois qu'il commença, l'empire prospéra sous son règne. Au cours des 36 années de son règne, il étendit les frontières de l'empire, maintint l'ordre à l'intérieur, augmenta le commerce et fit personnellement campagne avec son armée au-delà du golfe Persique et, peut-être même, jusqu'en Égypte.

La stèle de la victoire de Naram-Sin (actuellement conservée au Louvre) célèbre la victoire du monarque akkadien sur Satuni, roi des Lullubi (une tribu des monts Zagros) et représente Naram-Sin gravissant la montagne en piétinant les corps de ses ennemis, à l'image d'un dieu. Comme son grand-père, il se proclama "roi des quatre quarts de l'univers" mais, plus audacieux, il commença à écrire son nom avec un signe qui le désignait comme un dieu au même titre que n'importe quel dieu du panthéon mésopotamien.

Victory Stele of Naram-Sin
Stèle de la victoire de Naram-Sin
Jan van der Crabben (CC BY-NC-SA)

Malgré son règne spectaculaire, considéré comme l'apogée de l'Empire akkadien, les générations suivantes l'associeront à La malédiction d'Agadé, un texte littéraire (du genre Naru Literature mésopotamienne) attribué à la troisième dynastie d'Ur mais qui pourrait avoir été écrit plus tôt. Il raconte l'histoire fascinante d'un homme qui tente d'arracher une réponse aux dieux par la force, et cet homme est Naram-Sin. Selon le texte, le grand dieu sumérien Enlil retira son plaisir de la ville d'Akkad et, ce faisant, interdit aux autres dieux d'entrer dans la ville et de l'honorer de leur présence.

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Naram-Sin ne sait pas ce qu'il a bien pu faire pour encourir ce déplaisir. Il prie, demande des signes et des présages et tombe dans une dépression de sept ans en attendant une réponse du dieu. Finalement, fatigué d'attendre, il rassemble son armée et marche sur le temple d'Enlil à l'Ekur dans la ville de Nippur qu'il détruit. Il "plante ses pelles contre ses racines, ses haches contre les fondations jusqu'à ce que le temple, comme un soldat mort, tombe prostré" (Leick, 106).

Cette attaque, bien sûr, provoque la colère non seulement d'Enlil mais aussi des autres dieux qui envoient les Gutiens, "un peuple qui ne connaît aucune inhibition, aux instincts humains mais à l'intelligence canine et aux traits simiesques" (Leick, 106) pour envahir Akkad et la dévaster. Après l'invasion des Gutiens, la famine est généralisée, les morts pourrissent dans les rues et les maisons, la ville est en ruine et c'est ainsi, selon le conte, que prend fin la ville d'Akkad et l'empire akkadien, victime de l'arrogance d'un roi face aux dieux.

Il n'existe cependant aucune trace historique de Naram-Sin réduisant par la force l'Ekur de Nippur ou détruisant le temple d'Enlil et on pense que La Malédiction d'Agadé est une pièce beaucoup plus tardive écrite pour exprimer " un souci idéologique de la bonne relation entre les dieux et le monarque absolu " (Leick, 107) dont l'auteur choisit Akkad et Naram-Sin comme sujets en raison de leur statut, alors légendaire. Selon les archives historiques, Naram-Sin honorait les dieux, fit placer sa propre image à côté de la leur dans les temples et fut remplacé par son fils, Shar-Kali-Sharri qui régna de 2223 à 2198 avant notre ère.

Third Dynasty of Ur, c.2050 - 1950 BCE
Troisième dynastie d'Ur, vers 2050 - 1950 avant notre ère
Simeon Netchev (CC BY-NC-SA)

Le déclin d'Akkad

Le règne de Shar-Kali-Sharri fut difficile dès le début car il dut lui aussi déployer beaucoup d'efforts pour réprimer les révoltes après la mort de son père mais, contrairement à ses prédécesseurs, il semble ne pas avoir été capable de maintenir l'ordre et ne put empêcher de nouvelles attaques de l'extérieur contre l'empire. Leick écrit :

Malgré ses efforts et ses campagnes militaires réussies, il n'a pas été en mesure de protéger son État de la désintégration et, après sa mort, les sources écrites se sont taries dans une période d'anarchie et de confusion accrues. (159)

Il est intéressant de savoir que "son projet de construction le plus important fut la reconstruction du temple d'Enlil à Nippur" et peut-être que cet événement, couplé à l'invasion des Gutiens et à la famine généralisée, donna naissance à la légende ultérieure qui se développa dans La malédiction d'Agadé. Shar-Kali-Sarri mena une guerre presque continuelle contre les Élamites, les Amorites et les envahisseurs gutiens, mais c'est l'invasion gutienne qui a été le plus souvent attribuée à l'effondrement de l'empire akkadien et à l'âge sombre de la Mésopotamie qui s'ensuivit.

Des études récentes affirment cependant que c'est probablement le changement climatique qui provoqua la famine et, peut-être, la perturbation du commerce, affaiblissant l'empire au point que le type d'invasions et de rébellions qui, par le passé, étaient écrasées, ne purent plus être réprimées aussi facilement. Les deux derniers rois d'Akkad après la mort de Shar-Kali-Sharri, Dudu et son fils Shu-Turul, ne régnèrent que sur les environs de la ville et sont rarement mentionnés en association avec l'empire. Tout comme pour l'essor de la ville d'Akkad, sa chute est un mystère et tout ce que l'on sait aujourd'hui, c'est qu'il existait autrefois une telle ville dont les rois régnèrent sur un vaste empire, le premier empire du monde, avant de sombrer dans la mémoire et la légende.

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Joshua J. Mark
Auteur indépendant et ex-Professeur de Philosophie à temps partiel au Marist College de New York, Joshua J. Mark a vécu en Grèce et en Allemagne, et a voyagé à travers l'Égypte. Il a enseigné l'histoire, l'écriture, la littérature et la philosophie au niveau universitaire.

Citer cette ressource

Style APA

Mark, J. J. (2011, avril 28). Akkad [Akkad and the Akkadian Empire]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-363/akkad/

Style Chicago

Mark, Joshua J.. "Akkad." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le avril 28, 2011. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-363/akkad/.

Style MLA

Mark, Joshua J.. "Akkad." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 28 avril 2011. Web. 20 avril 2024.

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