Hannibal

Définition

Joshua J. Mark
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 29 mars 2018
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Disponible dans ces autres langues: anglais, espagnol, Turc
Hannibal Barca [Artist's Impression] (by Creative Assembly, Copyright)
Hannibal Barca [Impression d'artiste]
Creative Assembly (Copyright)

Hannibal (également connu sous le nom de Hannibal Barca, l. 247-183 av. JC) était un général carthaginois pendant la deuxième guerre punique entre Carthage et Rome (218-202 av. JC). Il est considéré comme l'un des plus grands généraux de l'Antiquité et ses tactiques sont encore étudiées et utilisées de nos jours. Son père était Hamilcar Barca (l. 275-228 av. JC), le grand général de la première guerre punique (264-241 av. JC).

Ces guerres opposaient les villes de Carthage, en Afrique du Nord, et de Rome, en Italie pour la suprématie dans la région méditerranéenne, et la deuxième guerre fut le résultat direct de la première. Hannibal prit le commandement des troupes après la mort de son père et les mena victorieusement à travers un certain nombre de batailles jusqu'à ce qu'il n'atteigne presque les portes de Rome; à ce moment-là, il fut arrêté dans sa course, non pas par les Romains, mais par manque de ressources pour prendre la ville.

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Il fut rappelé en Afrique pour défendre Carthage contre une invasion romaine, mais fut vaincu à la bataille de Zama en 202 av. JC par Scipion l'Africain (236-183 av. JC) et quitta Carthage. Il passa le reste de sa vie comme homme d'État, puis en exil volontaire à la cour de rois étrangers. Il mourut en 183 av. JC après avoir bu du poison.

Enfance

Bien qu'Hannibal soit sans conteste l'un des généraux les plus célèbres de l'Antiquité, il reste un personnage assez mystérieux. L'expert Philip Matyszak note :

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Il y a beaucoup de choses que nous ne savons pas sur cet homme, bien qu'il ait été l'un des plus grands généraux de l'Antiquité. Aucune biographie antique existante ne fait de lui son sujet principal, et Hannibal passe de la lumière à l'obscurité en fonction de l'importance que les autres auteurs accordent à ses actes et à son caractère. (24)

On ne sait rien de sa mère et, bien qu'il ait été marié à l'époque de certaines de ses plus grandes victoires, aucun document ne fait mention de sa femme, si ce n'est son nom, Imilce, et le fait qu'elle lui ait donné un fils. On ne sait pas ce qu'il en fut d'elle ou de son fils. L'histoire de la vie d'Hannibal est racontée en grande partie par ses ennemis, les Romains, à travers les historiens qui écrivirent sur les guerres puniques.

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LORSQU'IL ÉTAIT ENFANT, LE PÈRE D'HANNIBAL LUI ORDONNa DE "JURER QU'IL NE SERAIT JAMAIS UN AMI DE ROME".

L'historien grec Polybe (c. 208-125 av. JC) raconte que le père d'Hannibal l'invita à participer à une expédition en Espagne alors que le garçon n'avait encore que neuf ans. Hannibal accepta avec enthousiasme cette invitation mais, avant qu'il ne soit autorisé à se joindre à l'expédition, son père "prit Hannibal par la main et le conduisit à l'autel. Là, il ordonna à Hannibal de poser sa main sur le corps de la victime du sacrifice et de jurer qu'il ne serait jamais un ami de Rome" (3:11). Hannibal accepta volontiers ce serment - et ne l'oublia jamais.

Il accompagna son père en Espagne et apprit à combattre, à traquer et, surtout, à penser plus vite que son adversaire. Matyszak commente que "le concept moderne de l'adolescent, qui se situe entre l'enfant et l'adulte, n'existait pas dans le monde antique, et Hannibal se vit confier le commandement de troupes à un âge précoce" (23). Lorsque son père se noya, le commandement de l'armée passa à Hasdrubal le Beau (c. 270-221 av. JC), le gendre d'Hamilcar, et lorsque Hasdrubal fut assassiné en 221 av. JC, les troupes appelèrent unanimement à l'élection d'Hannibal comme leur commandant, même s'il n'avait que 25 ans à l'époque.

Traversée des Alpes et premières victoires

À la suite de la première guerre punique, le traité entre Carthage et Rome stipulait que Carthage pouvait continuer à occuper des régions en Espagne à condition de maintenir le tribut régulier qu'elle devait désormais à Rome et de rester dans certaines régions. En 219 av. JC, les Romains orchestrèrent un coup d'État dans la ville de Saguntum et installèrent un gouvernement hostile à Carthage et à ses intérêts. Hannibal marcha sur la ville en 218 av. JC, l'assiégea et s'en saisit. Les Romains, outrés, exigèrent de Carthage qu'elle leur remette son général. Le refus de Carthage marqua le début de la deuxième guerre punique.

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Map of Hannibal's Route into Italy
Carte de la route d'Hannibal en Italie
The Department of History, United States Military Academy (GNU FDL)

Hannibal décida de se battre contre les Romains et d'envahir le nord de l'Italie en 218 av. JC en traversant la chaîne de montagnes des Alpes. Il laissa son frère Hasdrubal Barca (c. 244-207 av. JC) à la tête des armées en Espagne et partit avec ses hommes pour l'Italie. En chemin, conscient de l'importance de rallier le peuple à sa cause, il se présenta comme un libérateur délivrant le peuple d'Espagne de l'emprise romaine.

Son armée s'accrut régulièrement avec de nouvelles recrues, jusqu'à ce qu'elle compte 50 000 fantassins et 9 000 cavaliers lorsqu'elle atteignit les Alpes. Il avait également avec lui un certain nombre d'éléphants qu'il avait trouvé très utiles pour terroriser l'armée romaine et sa cavalerie. En atteignant les montagnes, il fut contraint de laisser derrière lui ses engins de siège et un certain nombre d'autres équipements qui, selon lui, ralentiraient leur progression, puis il demanda à l'armée de commencer son ascension.

Les troupes et leur général durent affronter non seulement le mauvais temps et la pente, mais aussi des tribus hostiles qui vivaient dans les montagnes. Lorsqu'ils atteignirent l'autre côté, 17 jours plus tard, l'armée n'avait plus que 26 000 hommes au total et quelques éléphants. Malgré tout, Hannibal était confiant dans sa victoire et conduisit ses hommes dans les plaines d'Italie.

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Les Romains, quant à eux, n'avaient aucune idée des déplacements d'Hannibal. Ils n'avaient jamais envisagé qu'il ferait passer son armée par les montagnes pour les atteindre et pensaient qu'il était toujours quelque part en Espagne. Cependant, lorsque Rome apprit la manœuvre d'Hannibal, elle ne tarda pas à agir et envoya le général Scipion (père de Scipion l'Africain, qui l'accompagnait) pour l'intercepter. Les deux armées se rencontrèrent près du Tessin où les Romains furent vaincus et Scipion presque tué.

Carthaginian War Elephant
Éléphant de guerre carthaginois
The Creative Assembly (Copyright)

Hannibal vainquit ensuite ses ennemis au lac Trasimène et prit rapidement le contrôle du nord de l'Italie. Il n'avait pas de machines de siège ni d'éléphants pour s'emparer des villes et s'appuya donc sur son image de libérateur pour tenter de rallier les villes à sa cause. Il envoya alors un message à Carthage pour obtenir plus d'hommes et de matériel, notamment des engins de siège, mais sa demande fut rejetée. Le sénat carthaginois pensait qu'il pouvait gérer la situation sans dépenses supplémentaires de leur part et suggéra que ses hommes vivent du travail de la terre.

Les ruses d'Hannibal et la bataille de Cannes

La stratégie d'Hannibal consistant à se présenter comme un libérateur fonctionna et un certain nombre de villes choisirent de se ranger à ses côtés contre Rome, tandis que ses victoires sur le terrain continuaient de gonfler ses rangs de nouvelles recrues. Après la bataille de la Trébie (218 av. JC), où il vainquit de nouveau les Romains, il se retira pour l'hiver dans le nord, où il élabora ses plans pour la campagne de printemps et mit au point diverses stratégies pour éviter d'être assassiné par des espions dans son camp ou des tueurs à gages envoyés par les Romains. Polybe écrit comment Hannibal,

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se fit faire un ensemble de perruques, chacune d'entre elles le faisant ressembler à un homme d'un âge différent. Il en changeait constamment, modifiant à chaque fois son habillement pour l'adapter à son apparence. Ainsi, il était difficile à reconnaître, non seulement par ceux qui le voyaient brièvement, mais même par ceux qui le connaissaient bien. (3:78)

Le printemps venu, Hannibal lança un nouvel assaut, détruisant l'armée romaine commandée par Gaius Flaminius et une autre commandée par Servilius Geminus.

Les Romains envoyèrent alors le général Quintus Fabius Maximus (c. 280-203 av. JC) contre Hannibal, qui employa une nouvelle tactique pour épuiser Hannibal en le gardant constamment en mouvement et en déséquilibre. Fabius se fit connaître sous le nom de "Cunctator" (Temporisateur) en refusant d'affronter Hannibal directement et en retardant tout engagement face à face; il préférait plutôt placer ses armées de façon stratégique pour empêcher Hannibal d'attaquer ou de se retirer d'Italie. La stratégie de Fabius fut si efficace qu'il faillit prendre Hannibal au piège.

Hannibal prit le temps d'apprendre à connaître son ennemi, ses forces, ses faiblesses, et savait que Varron était impatient de se battre et trop confiant dans sa réussite.

Il avait retranché les Carthaginois près de Capoue où la retraite était bloquée par la rivière Volturne. Il semblait qu'Hannibal devait soit se battre pour s'en sortir, soit se rendre, mais une nuit, les Romains virent une ligne de torches partir de l'emplacement du camp carthaginois vers une zone qu'ils savaient être tenue par une forte garnison des leurs.

Il semblait clair qu'Hannibal essayait de s'échapper du piège. Les généraux de Fabius l'encouragèrent à monter une attaque de nuit pour soutenir la garnison et écraser l'ennemi entre eux, mais Fabius refusa, estimant que la garnison en place pourrait facilement empêcher Hannibal de s'échapper et tiendrait jusqu'au matin. Cependant, lorsque la garnison se mobilisa pour aller à la rencontre d'Hannibal, elle ne trouva que du bétail avec des torches attachées à leurs cornes et l'armée d'Hannibal s'était enfuie par le col que les Romains avaient laissé sans surveillance.

La tactique de Fabius, qui consistait à refuser de rencontrer Hannibal en combat ouvert, commençait à fatiguer les Romains qui exigeaient une action directe. Ils nommèrent un général plus jeune, Minucius Rufus (dates inconnues), comme co-commandant car Rufus était persuadé de pouvoir vaincre Hannibal et ramener la paix dans la région. Fabius comprit cependant qu'Hannibal n'était pas un adversaire ordinaire et refusa toujours de s'engager. Il donna à Rufus la moitié de l'armée et l'invita à faire de son mieux. Rufus attaqua Hannibal près de la ville de Gerione et fut si sévèrement battu que Fabius dut le sauver, lui et ce qui restait de ses troupes, de l'anéantissement total. Par la suite, Fabius démissionne de son poste et Rufus disparaît de l'histoire.

Hannibal marcha ensuite vers le dépôt de ravitaillement romain de Cannes, qu'il prit facilement, et donna ensuite à ses hommes le temps de se reposer. Les Romains envoyèrent les deux consuls Lucius Aemilius Paulus (mort en 216 av. JC) et Caius Terentius Varro (alias Varron en poste vers 218-200 av. JC), avec une force de plus de 80 000 hommes, contre sa position; Hannibal avait moins de 50 000 hommes sous son commandement. Comme toujours, Hannibal prit le temps d'apprendre à connaître son ennemi, ses forces et ses faiblesses, et savait que Varron était impatient de se battre et trop confiant dans sa réussite. Comme les deux consuls s'échangeaient le commandement de l'armée, Hannibal eut l'avantage que le plus ambitieux et le plus téméraire des deux, Varron, détienne l'autorité suprême le premier jour de la bataille.

Hannibal disposa son armée en arc de cercle, plaçant son infanterie légère gauloise à l'avant et au centre, l'infanterie lourde derrière elle et la cavalerie légère et lourde sur les ailes. Les Romains sous le commandement de Varron étaient placés en formation traditionnelle pour marcher vers le centre des lignes de l'ennemi et les briser. Varron pensait faire face à un adversaire identique à tous ceux que les légions romaines avaient vaincu par le passé et était persuadé que la force de l'armée romaine briserait la ligne carthaginoise; c'était précisément la conclusion à laquelle Hannibal espérait qu'il en arriverait.

Battle of Cannae - Initial Deployment
Bataille de Cannes - Déploiement initial
The Department of History, United States Military Academy (Public Domain)

Lorsque l'armée romaine avança, le centre de la ligne carthaginoise commença à céder, si bien qu'il semblait que Varron avait eu raison et que le centre allait se briser. Les forces carthaginoises reculèrent de manière régulière, attirant les Romains de plus en plus loin dans leurs lignes, puis l'infanterie légère se déplaça de part et d'autre de la formation en croissant et l'infanterie lourde avança vers l'avant. Au même moment, la cavalerie carthaginoise engagea la cavalerie romaine et la mit en déroute, plombant ainsi sur l'arrière de l'infanterie romaine.

Les Romains, toujours dans leur formation traditionnelle avec leurs tactiques bien rodées, continuèrent d'avancer, mais ils ne firent que pousser ceux qui étaient en première ligne vers la machine à tuer de l'infanterie lourde carthaginoise. La cavalerie carthaginoise avait maintenant fermé l'espace derrière et les forces de Rome étaient complètement encerclées. Sur les 80 000 soldats romains qui prirent part à la bataille ce jour-là, 44 000 furent tués tandis qu'Hannibal perdit environ 6 000 hommes. Ce fut une défaite dévastatrice pour Rome, qui entraîna la défection d'un certain nombre de cités-États italiennes au profit d'Hannibal et la déclaration de Philippe V de Macédoine (r. 221-179 av. JC) en faveur d'Hannibal et le début de la première guerre macédonienne avec Rome.

Battle of Cannae - Destruction of the Roman Army
Bataille de Cannes- Destruction de l'armée romaine
The Department of History, United States Military Academy (Public Domain)

Le peuple de Rome se mobilisa pour défendre leur ville, qu'ils pensaient être la prochaine cible d'Hannibal. Les vétérans et les nouvelles recrues refusèrent d'être payés afin de défendre la ville. Hannibal, cependant, ne pouvait pas attaquer Rome car il lui manquait des engins de siège et des renforts pour son armée. Carthage refusa de lui accorder ces équipements nécessaires parce que le sénat ne voulait pas faire d'efforts ni dépenser d'argent.

Le commandant de la cavalerie d'Hannibal, Maharbal, encouragea Hannibal à attaquer quand même, persuadé qu'ils pouvaient gagner la guerre à ce moment où l'armée romaine était en déroute et le peuple en panique. Lorsqu'Hannibal refusa, Maharbal lui dit : "Tu sais comment remporter une victoire, Hannibal, mais tu ne sais pas comment l'utiliser." Hannibal avait pourtant raison, ses troupes étaient épuisées après Cannes et il n'avait ni éléphants ni engins de siège pour prendre la ville. Il n'avait même pas assez d'hommes pour réduire la ville en l'encerclant pour un long siège. Si Carthage avait envoyé les hommes et le matériel demandés à ce moment-là, l'histoire aurait été écrite très différemment; mais elle ne le fit pas.

Autres campagnes et la bataille de Zama

Parmi les guerriers romains qui survécurent à Cannes se trouvait l'homme qui allait être connu sous le nom de Scipion l'Africain. Le père et l'oncle de Scipion, deux des anciens commandants, avaient été tués en combattant Hasdrubal Barca en Espagne et, lorsque le sénat romain demanda un général pour défendre la ville contre Hannibal, tous les commandants les plus probables refusèrent, croyant, après Cannes, qu'un tel commandement était tout simplement une mission suicide. Scipion, âgé de 24 ans seulement à l'époque, se porta volontaire. Il quitta Rome avec seulement 10 000 fantassins et 1 000 cavaliers pour affronter les forces bien plus importantes d'Hannibal.

Scipion commença par l'Espagne - et non l'Italie - dans le but de soumettre Hasdrubal en premier et d'empêcher les renforts d'atteindre l'Italie. Il s'empara d'abord de la ville de Carthago Nova et enchaîna ensuite d'autres victoires. En 208 av. JC, il vainquit Hasdrubal à la bataille de Baecula en utilisant la même tactique qu'Hannibal à Cannes.

HASDRUBAL, RECONNAISSANT QUE L'ESPAGNE ÉTAIT UNE CAUSE PERDUE, TRAVERSA LES ALPES POUR REJOINDRE HANNIBAL EN ITALIE POUR UNE ATTAQUE UNIE CONTRE ROME.

Hasdrubal, reconnaissant que l'Espagne était une cause perdue, traversa les Alpes pour rejoindre Hannibal en Italie pour une attaque unie contre Rome. Cependant, lors de la bataille du Métaure en 207 av. JC, l'armée d'Hasdrubal fut vaincue par les Romains de Gaius Claudius Nero (c. 237-199 av. JC); Hasdrubal fut tué et ses forces dispersées. Nero avait engagé Hannibal au sud, mais il s'éclipsa pendant la nuit, vainquit Hasdrubal et revint sans qu'Hannibal ne s'en aperçoive. La première fois qu'Hannibal apprit la défaite d'Hasdrubal, ce fut lorsqu'un contingent romain jeta la tête de son frère aux sentinelles de son camp.

Scipion, toujours en Espagne, demanda au sénat romain de l'argent et du matériel pour attaquer Carthage, ce qui, assurait-il, obligerait Carthage à rappeler Hannibal d'Italie pour défendre la ville. Le sénat romain refusa et Scipion leur fit honte en levant sa propre armée et en faisant appel au soutien du peuple romain. Le sénat cèda alors et lui confia le commandement de la Sicile d'où il pourrait lancer son invasion de l'Afrique du Nord.

Hannibal, pendant ce temps, fut contraint de poursuivre sa stratégie précédente consistant à frapper Rome dans des engagements rapidement orchestrés et à essayer de gagner des cités-états à sa cause, sans pouvoir prendre aucune ville d'assaut. Matyszak écrit :

Sur le terrain, Hannibal resta inégalé. En 212 et 210, il affronta les Romains et les vainquit. Mais il comprenait maintenant que la blessure que Rome avait reçue à Cannes n'était pas mortelle. Le flux des défections vers le côté carthaginois se ralentit puis s'arrêta. (39)

En Espagne, les Carthaginois avaient été vaincus par Scipion mais Hannibal n'en savait rien; il savait seulement que son frère avait été tué mais pas que l'Espagne était sous contrôle romain.

Battle of Zama
Bataille de Zama
Sailko (CC BY-SA)

À cette époque, Scipion était déjà prêt à envahir l'Afrique du Nord et son plan allait fonctionner exactement comme il l'avait prévu. En 205 av. JC, il fit débarquer ses forces et s'allia avec le roi numide Masinissa. Il s'empara rapidement de la ville carthaginoise d'Utica et marcha vers Carthage. Hannibal fut rappelé d'Italie pour faire face à cette menace et les deux forces se rencontrèrent sur le terrain en 202 av. JC à la bataille de Zama.

Scipion avait étudié attentivement la tactique d'Hannibal, de la même manière qu'Hannibal avait toujours pris soin de connaître son ennemi et de penser plus vite que ses adversaires. Il n'avait cependant aucune expérience de l'affrontement avec Scipion et ne le connaissait qu'en tant que jeune général qui avait réussi à vaincre Hasdrubal en Espagne. Scipion semblait se conformer aux attentes d'Hannibal lorsqu'il disposa ses forces en formation traditionnelle en un groupe apparemment serré.

Hannibal était certain de pouvoir disperser facilement ces Romains avec une charge d'éléphants, mais Scipion utilisa sa ligne de front comme écran pour un type de formation très différent: au lieu de la configuration serrée présentant un front horizontal à travers la ligne (la formation qu'Hannibal voyait de sa position), il disposa ses troupes en rangées verticales derrière la ligne de front. Lorsque Hannibal lança sa charge d'éléphants, la ligne de front de Scipion s'écarta tout simplement et les éléphants coururent sans provoquer aucun dégât dans les allées entre les troupes romaines qui ensuite tuèrent leurs maîtres les firent faire demi-tour aux éléphants pour qu'ils aillent écraser les rangs des Carthaginois; Hannibal fut vaincu et la deuxième guerre punique prit fin.

The Battle of Zama - Elephant Charge
Bataille de Zama - Charge des éléphants
Mohammad Adil (CC BY-SA)

Dernières années et héritage

Après la guerre, Hannibal accepta un poste de premier magistrat de Carthage, où il se montra aussi performant qu'en tant que chef militaire. Les lourdes amendes imposées par Rome à Carthage vaincue, destinées à paralyser la ville, furent facilement payées grâce aux réformes initiées par Hannibal. Les membres du sénat, qui avaient refusé de lui envoyer de l'aide lorsqu'il en avait besoin en Italie, l'accusèrent de trahir les intérêts de l'État en ne prenant pas Rome lorsqu'il en avait eu l'occasion, mais Hannibal resta fidèle aux intérêts de son peuple jusqu'à ce que les sénateurs inventent de nouvelles accusations et dénoncent Hannibal à Rome en affirmant qu'il faisait à nouveau de Carthage une puissance afin de défier les Romains. Les raisons exactes de cette décision ne sont pas claires, si ce n'est leur déception à son égard après la défaite de Zama et une simple jalousie à l'égard de ses capacités.

À Rome, Scipion devait également faire face aux problèmes posés par son propre sénat qui l'accusait de sympathiser avec Hannibal en le graciant et en le libérant, d'accepter des pots-de-vin et de mal gérer les fonds. Scipion défendit Hannibal en tant qu'homme honorable et empêcha les Romains d'envoyer une délégation demandant son arrestation, mais Hannibal comprit que ce n'était qu'une question de temps avant que ses propres compatriotes ne le livrent et il fuit donc la ville en 195 av. JC pour Tyr, puis se rendit en Asie mineure où il fut nommé consultant d'Antiochos III (le Grand, r. 223-187 av. JC) de l'Empire séleucide.

Antiochos, bien sûr, connaissait la réputation d'Hannibal et ne voulait pas risquer de placer un homme aussi puissant et populaire à la tête de ses armées. Il le garda donc à la cour jusqu'à ce que la nécessité ne le pousse à nommer Hannibal amiral de la marine dans une guerre contre Rhodes, l'un des alliés de Rome. Hannibal était un marin inexpérimenté, tout comme son équipage, et il fut vaincu même si, à son grand mérite, il fut proche de la victoire. Lorsqu'Antiochos fut vaincu par les Romains à Magnésie en 189 av. JC, Hannibal savait qu'il serait livré à Rome dans le cadre des conditions et prit à nouveau la fuite.

Hannibal Barca Bust
Buste d'Hannibal Barca
Carole Raddato (CC BY-SA)

À la cour du roi Prusias de Bithynie en 183 av. JC, alors que Rome le poursuivait toujours, Hannibal choisit de mettre fin à sa vie plutôt que d'être pris par ses ennemis. Il dit: " Mettons fin à cette vie, qui causa tant d'effroi aux Romains ", puis il but du poison. Il avait 65 ans. À la même époque, à Rome, les accusations portées contre Scipion l'avaient tellement dégoûté qu'il se retira dans son domaine à l'extérieur de la ville et laissa dans son testament l'ordre d'y être enterré plutôt qu'à Rome. Il mourut la même année qu'Hannibal, à l'âge de 53 ans.

Hannibal devint une légende de son vivant et, des années après sa mort, les mères romaines continuaient à effrayer leurs enfants réticents en leur disant "Hannibal ad Porto" (Hannibal est à la porte). Sa campagne à travers les Alpes, impensable même à son époque, lui valut l'admiration de ses ennemis et une renommée durable.

Les stratégies d'Hannibal, si bien apprises par Scipion, furent incorporées aux tactiques romaines et Rome les utilisera systématiquement à bon escient après la bataille de Zama. Après la mort d'Hannibal et de Scipion, Carthage continua à poser des problèmes à Rome, ce qui aboutit à la troisième guerre punique (149-146 av. JC), au cours de laquelle Carthage fut détruite.

L'historien Ernle Bradford écrit que la guerre d'Hannibal contre les Romains,

peut être considérée comme le dernier effort des anciens peuples orientaux et sémitiques pour empêcher la domination du monde méditerranéen par un État européen. Son échec est dû à l'immense résistance des Romains, tant dans leur constitution politique que dans leur armée. (210)

S'il y a une part de vérité dans ces propos, la défaite finale d'Hannibal fut provoquée par la faiblesse de son propre peuple pour le luxe, la richesse et la facilité, autant que par le refus romain de se rendre après Cannes. Il ne fait aucun doute, comme le note également Bradford, que si Hannibal "avait combattu contre n'importe quelle autre nation du monde antique... ses victoires écrasantes les auraient mis à genoux et conduits à une capitulation rapide" (210), mais la cause de la défaite d'Hannibal est tout autant la faute de l'élite carthaginoise qui refusa de soutenir le général et ses troupes qui se battaient pour leur cause.

Il n'existe aucune trace de Carthage accordant à Hannibal une quelconque reconnaissance pour ses services en Italie et il fut plus honoré par le pardon et la défense de Scipion que par une quelconque action de la part de ses propres compatriotes. Malgré cela, il continua à faire de son mieux pour son peuple tout au long de sa vie et resta fidèle au vœu qu'il avait fait dans sa jeunesse; jusqu'à la fin, il resta un ennemi de Rome et son nom restera dans les mémoires comme le plus grand adversaire de Rome pendant des générations - et même jusqu'à nos jours.

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Joshua J. Mark
Auteur indépendant et ex-Professeur de Philosophie à temps partiel au Marist College de New York, Joshua J. Mark a vécu en Grèce et en Allemagne, et a voyagé à travers l'Égypte. Il a enseigné l'histoire, l'écriture, la littérature et la philosophie au niveau universitaire.

Citer cette ressource

Style APA

Mark, J. J. (2018, mars 29). Hannibal [Hannibal]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-406/hannibal/

Style Chicago

Mark, Joshua J.. "Hannibal." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le mars 29, 2018. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-406/hannibal/.

Style MLA

Mark, Joshua J.. "Hannibal." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 29 mars 2018. Web. 15 avril 2024.

Adhésion