Trébizonde

Définition

Jan van der Crabben
de Livius, traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 04 novembre 2011
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Disponible dans ces autres langues: anglais, espagnol
Trebizond Silver Drachma (by Kensai, Public Domain)
Drachme en argent de Trébizonde
Kensai (Public Domain)

Trébizonde ou Trapezous (Τραπεζοῦς) en grec était une cité grecque située sur la rive sud de la mer Noire, l'actuelle Trabzon. Selon l'auteur chrétien Eusèbe, écrivant plus d'un millénaire après les faits, Trébizonde fut fondée en 756 avant notre ère, dans le pays qui s'appelait Colchide. Ses premiers colons étaient originaires de Sinope (Xénophon, Anabasis, 4.8), une ville grecque située sur la rive sud de la mer Noire, à environ 400 kilomètres à l'ouest. Comme cette ville était une ramification de Milet, qui à son tour était considérée comme une colonie d'Athènes, le savant trapézien Cardinal Bessarion se vanterait encore d'être un Athénien à l'époque de la Renaissance.

Si l'on en croit Pausanias (Guide de la Grèce, 8.27.6), il y eut une deuxième vague d'immigrants en provenance du Péloponnèse, après la destruction de la ville par les Cimmériens vers 630 avant notre ère. Cette histoire peut être une invention tardive, destinée à expliquer pourquoi il y avait aussi une ville nommée Trapezus en Arcadie ; d'un autre côté, il peut s'agir de la véritable fondation de la ville, la première n'étant qu'une légende.

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Quoi qu'il en soit, la ville était un port très important et semble avoir joué un rôle central dans le commerce entre la Grèce et les civilisations de l'âge du fer d'Anatolie, en particulier Urartu. De nombreux objets en métal ont dû être expédiés en Grèce depuis Trébizonde, ce qui peut expliquer pourquoi tant de pièces d'art grec de style oriental ressemblent à des objets urartéens.

La ville ne s'enrichirait grâce à ses produits agricoles. Son acropole se trouve sur un affleurement des Paryadrès, une chaîne de montagnes parallèle au littoral ; il n'y a pratiquement pas de terrain plat qui aurait pu convenir à l'agriculture. Cependant, il y a un bon port (le seul à l'est d'Amisus), et il y a plusieurs routes à travers les montagne du Paryadrès.

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Les pentes des montagnes étaient couvertes de forêts, permettant à ses habitants de construire des navires et de produire du vin et du miel. Le thon est mentionné par Strabon, un géographe originaire de la proche Amasie (Géographie, 7.6.2). Les Chalybes, nom donné par les Grecs aux tribus des montagnes, étaient connus pour leur production de minerai de fer. Plus tard, nous entendrons parler d'autres tribus vivant dans les montagnes, les Mossynoeci et les Drilae.

Perses, Grecs et mercenaires

L'influence perse devait être réelle à la fin du sixième siècle avant Jésus-Christ, du moins en théorie, car la rive sud de la mer Noire est mentionnée par Hérodote d'Halicarnasse comme faisant partie des troisième et treizième districts fiscaux de l'empire achéménide. Plus tard, la ville pourrait avoir été l'une des villes de la Ligue de Délos.

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Au début du printemps 400 avant J.-C., les restes de l'armée de l'usurpateur perse Cyrus le Jeune, qui revenaient de leur expédition malheureuse contre Artaxerxès II Mnémon, arrivèrent à Trébizonde; les survivants offrirent des sacrifices aux dieux grecs. L'un de ses commandants, Xénophon, donna quelques informations sur la ville dans son Anabase, ville qu'il qualifia de "populeuse" (4.8.22). L'armée soutint les habitants de Trébizonde qui avaient des démêlés avec les Drilae (5.2) et les Mossynoeci (5.4).

Plusieurs années plus tard, en 368/367 avant J.-C., les habitants de Trapezus en Arcadie qui ne souhaitaient pas s'installer à Megalopolis, nouvellement fondée, émigrèrent à Trébizonde Pontique (Pausanias, Guide de la Grèce, 8.2.7). Une autre génération plus tard, la ville efut assignée à Eumène de Cardia, l'un des successeurs d'Alexandre le Grand (Arrien, Histoire de la succession d'Alexandre).

Dans la première moitié du 1er siècle avant J.-C., la ville faisait partie du royaume pontique de Mithradate VI, et son port était utilisé par la flotte du Pont.

Trébizonde romaine

Dans la première moitié du Ier siècle avant J.-C., la ville faisait partie du royaume pontique de Mithradate VI, et son port était utilisé par la flotte du Pont. Néanmoins, elle ne tarda pas à rejoindre les Romains, et fut offerte par Pompée le Grand au roi Deiotaros de Galatie. Au premier siècle de notre ère, les Romains reconnurent Trébizonde en tant que ville libre (Pline l'Ancien, Histoire naturelle, 6.4). Selon des légendes ultérieures, Saint-André devait expliquer le christianisme aux habitants de Trébizonde.

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Le conflit entre Rome et les Parthes se déroula principalement en Syrie, mais l'importance stratégique de l'Arménie fit que les Romains occupèrent la majeure partie de l'Anatolie. Cela fit de Trébizonde une ville importante car elle était l'un des rares ports de la côte nord de cette région. C'était un nœud crucial entre les limes (zones frontalières) le long du Rhin et les limes le long de l'Euphrate.

Sous le règne de Néron (53-68 de notre ère), la ville servit de base de ravitaillement pour la campagne arménienne de Corbulo (Tacite, Annales, 13.39) ; son importance stratégique fut, l'année des quatre empereurs, reconnue par Anicetus, l'un des partisans de Vitellius (Tacite, Histoires, 3.47) ; et Vespasien développa la région, en construisant une route à travers le col de Zigana qui était défendu par la forteresse légionnaire de Satala, base du XVI Flavia et, plus tard, du XV Apollinaris. Enfin, c'est Hadrien qui améliora le port (Arrien, Périple de la mer Noire). Les vestiges ont été identifiés.

Lors de la crise de 193 de notre ère, Trébizonde, devint une ville florissante, soutint Pescennius Niger, et fut par conséquent punie par le vainqueur de la guerre civile, Septime Sévère. La ville resta prospère et attira les attaques des Wisigoths (en 257 de notre ère) et des Perses sassanides (en 258 de notre ère) sous le règne de Valérien. Selon Zosime, une double muraille et une garnison de 10 000 soldats supplémentaires ne suffirent pas à empêcher sa prise.

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Aqueduct & Fortifications of Trebizond
Aqueduc et fortifications de Trébizonde
NeoRetro (CC BY-SA)

Trébizonde dans l'Antiquité tardive

Les murs de la ville furent réparés par Dioclétien (284-305 de notre ère), et Trébizonde reçut une nouvelle garnison : la Première Légion Pontique. Cela semble s'être produit au cours de la première décennie du règne de Dioclétien. L'unité est mentionnée dans une dédicace (CIL, 3, 6746) que l'on peut dater de 297-305 de notre ère et qui se trouvait encore dans cette ville lorsque fut composée la Notitia Dignitatum, une liste des magistères et des unités militaires romaines datant du début du Ve siècle de notre ère.

Le règne de Dioclétien et de Galère, son césar, fut le théâtre de féroces persécutions contre les chrétiens. A Trébizonde, Eugène, Candide, Valerien et Aquilas furent torturés à mort. A propos de ce dernier, on sait qu'il détruisit une statue de Mithra sur une colline dominant la ville, et qu'il devint le saint patron de Trébizonde. Un autre sanctuaire de Mithra devait servir de crypte à l'église de Panaghia Theoskepastos. La force motrice de la lutte chrétienne contre le culte de Mithra avait été Grégoire le Thaumaturge, originaire de la ville voisine de Néocésarée.

Sous le règne de Constantin, la ville appartenait au diocèse d'Orient. Elle fut représentée par son évêque, Domnus, lors du concile de Nicée. Nous savons que le prince Hannibalien fonda une église dédiée à la Vierge ; peu de temps après, Ammien Marcellin appela Trébizonde "une ville célèbre" (Histoire de Rome, 22.8.16). Le monastère de Sumela, au sud de la ville, fut peut-être construit à cette époque, mais il est peut-être un peu plus jeune.

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Sous le règne de Justinien, l'aqueduc fut amélioré (Procope, Sur les bâtiments, 3.7) et nommé en l'honneur du martyr Eugène. Une inscription prouve que les murs furent également réparés. Le monastère de Sumela aussi fut restauré.

Trébizonde byzantine

Sous les empereurs byzantins, Trébizonde connut le déclin, bien qu'elle ait été l'un des endroits où les marchands musulmans venaient faire des affaires avec les commerçants byzantins. À partir de 824, c'était la capitale du thème (district militaire) de Chaldée.

Cependant, après la prise de Constantinople par les chevaliers de la quatrième croisade, la dynastie impériale de Byzance, les Comnènes, s'enfuit à Trébizonde, faisant d'elle la capitale de l'empire de Trébizonde. La ville se rendit aux Ottomans en 1461, ce qui marqua la fin de l'Empire byzantin.

Il reste peu de choses de la ville antique et médiévales, à l'exception des ruines du palais des Comnènes et de l'église médiévale de Sainte-Sophie, la réponse de Trébizonde à l'église du même nom à Constantinople. Après la prise de pouvoir par les Ottomans, des artistes et des savants de la ville comme le cardinal Bessarion se rendirent en Italie, emportant avec eux de précieux manuscrits. La ville antique constitua ainsi un lien important entre la culture antique, qui se perpétua dans l'art et l'érudition byzantins, et la Renaissance européenne.

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Bibliographie

Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Citer cette ressource

Style APA

Livius, . (2011, novembre 04). Trébizonde [Trebizond]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-10425/trebizonde/

Style Chicago

Livius, . "Trébizonde." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le novembre 04, 2011. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-10425/trebizonde/.

Style MLA

Livius, . "Trébizonde." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 04 nov. 2011. Web. 18 avril 2024.

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