Thèbes (Égypte)

Définition

Joshua J. Mark
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 24 février 2016
X
translations icon
Disponible dans ces autres langues: anglais, grec, persan, espagnol, ourdou
Avenue of the Sphinxes, Thebes (by sdhaddow, CC BY-NC-SA)
Avenue des Sphinx, Thèbes
sdhaddow (CC BY-NC-SA)

Thèbes était la capitale de l'Égypte pendant la période du Nouvel Empire (vers 1570-c.1069 avant J.-C.) et devint un important centre de culte du dieu Amon (également connu sous le nom d'Amen ou Amun). Son nom sacré était P-Amen ou Pa-Amen, ce qui signifie "la demeure d'Amon".

Elle était également connue des Égyptiens sous le nom de Ouaset (la ville du sceptre) et était construite de part et d'autre du Nil, la ville principale sur la rive est et la vaste nécropole sur la rive ouest. Cette position sur le fleuve est évoquée dans le livre biblique de Nahum 3:8, lorsque le prophète avertit Ninive de sa destruction prochaine, affirmant que même la grande Thèbes "située au milieu des fleuves, les eaux l'entourant" n'était pas à l'abri de la colère de Dieu. Le nom biblique de la ville est No-Amon ou No (Ézéchiel 30:14,16, Jérémie 46:25, Nahum 3:8), en référence à sa renommée en tant que centre de culte pour Amon (bien que ce nom soit également associé à la ville de Xois en Basse-Égypte). Les Grecs l'appelaient Thebai, du grec copte Ta-opet (le nom du grand temple de Karnak), qui devint par la suite "Thèbes" - le nom sous lequel nous la connaissons.

Supprimer la pub
Advertisement

La ville couvrait 93 km² et se situe à environ 675 km au sud du Caire actuel. De nos jours, Louxor et Karnak occupent le site de l'ancienne Thèbes, et ses environs abritent certains des sites archéologiques les plus importants d'Égypte, comme la Vallée des Rois, la Vallée des Reines, le Ramesseum (temple de Ramsès II), le temple de Ramsès III et le grand complexe de temples de la reine Hatchepsout.

Vers 3200 avant J.-C., Thèbes devint très importante, en grande partie grâce à la popularité croissante du culte du dieu Amon, et était connue pour sa richesse et sa grandeur. Au 8e siècle avant J.-C., bien après que Thèbes ait connu des jours meilleurs, le poète grec Homère écrivait encore à propos de la ville dans son Iliade: "...dans la Thèbes égyptienne, les tas de lingots précieux brillent, la Thèbes aux cent portes" et les Grecs appelaient la ville Diospolis Magna ("la grande cité des dieux").

Supprimer la pub
Advertisement

Pendant la période amarnienne (1353-1336 avant J.-C.), Thèbes était la plus grande ville du monde avec une population d'environ 80 000 habitants. À la même époque, Akhénaton déplaça la capitale de Thèbes vers sa ville construite sur mesure d'Akhetaton, afin de séparer radicalement son règne de celui de ses prédécesseurs ; son fils, Toutânkhamon, ramena la capitale à Thèbes après son accession au trône. Les puissants prêtres d'Amon consolidèrent leur pouvoir au point que, pendant la 20e dynastie (vers 1190-1069 avant J.-C.), ils purent régner en tant que pharaons depuis la ville.

Thèbes demeura un important centre de culte et un lieu de pèlerinage tout au long de l'histoire de l'Égypte, même après le déplacement de la capitale à Pi-Ramsès (près de l'ancienne ville d'Avaris) par Ramsès II (1279-1213 avant J.-C.). Pendant la période ramesside, les prêtres d'Amon gouvernaient depuis Thèbes tandis que le pharaon gouvernait depuis Pi-Ramsès. La ville continua de s'agrandir, en particulier le temple d'Amon, tout au long de cette période. Elle fut saccagée par les Assyriens en 666 avant J.-C., reconstruite et finalement détruite par Rome au 1er siècle de notre ère.

Supprimer la pub
Advertisement

La Thèbes des débuts

À l'époque de l'Ancien Empire (c. 2316-2181 avant J.-C.), la ville était un petit comptoir commercial en Haute-Égypte contrôlé par des clans locaux. Au cours de la Première Période Intermédiaire (2181-2040 avant J.-C.), la royauté était centrée à Memphis jusqu'à ce que les dirigeants ne déplacent la capitale à Hérakléopolis. Cependant, ils y étaient tout aussi inefficaces que dans l'ancienne capitale, ce qui encouragea les magistrats locaux de Thèbes à se soulever contre le gouvernement central. La ville commença à devenir plus puissante sous la direction de puissants gouverneurs tels qu'Antef I (c. 2125 avant J.-C.), Montuhotep I (c. 2115 avant J.-C.) et Antef II (vers 2112-2063 avant J.-C.) qui s'établirent en tant que royaux. Antef II se déclara même véritable roi d'Égypte, en opposition aux rois d'Hérakléopolis.

Les souverains thébains firent la guerre aux rois d'Hérakléopolis pour la suprématie et pour unir le pays sous une seule domination. Montuhotep II (2061-2010 avant J.-C.), un prince thébain, finit par l'emporter vers 2055 avant J.-C. en battant les rois d'Hérakliopolis et en unifiant l'Égypte sous la domination thébaine. La victoire de Montouhotep II éleva ses dieux, dont le principal était Amon, au-dessus de ceux de la Basse-Égypte. Cette divinité, qui était un dieu local de la fertilité, devint l'être suprême et le créateur de l'univers.

On pensait que Thèbes elle-même avait été formée par les mains d'Amon, puisée dans les eaux du Nil, tout comme le monticule primordial du ben-ben s'était élevé des eaux tourbillonnantes du chaos lors de la création du monde. Dans l'histoire originale de la création, le dieu Atoum ou se dressa sur le ben-ben et commença le travail de création. Amon était une combinaison d'Atoum, le dieu créateur, et de Rê, le dieu du soleil et, comme ce seigneur suprême s'était tenu sur la première terre sèche au début de la création, Thèbes était considérée comme son lieu sacré sur terre et, peut-être, le ben-ben original sur lequel il se tenait au début des temps.

Supprimer la pub
Advertisement

Amun, Ramesses II, & Mut
Amon, Ramsès II et Mout
Mark Cartwright (CC BY-NC-SA)

La vénération d'Amon donna naissance à la trinité connue sous le nom de Triade thébaine d'Amon, Mout et Khonsou qui sera vénérée dans la ville pendant des siècles. Amon représentait le soleil et la force créatrice ; Mout était son épouse, symbolisée par les rayons du soleil et l'œil qui voit tout ; Khonsou était la lune, le fils d'Amon et de Mout, connu sous le nom de Khonsou le Miséricordieux, le destructeur des mauvais esprits et le dieu de la guérison. Ces trois divinités de Haute-Égypte sont issues des anciens dieux Ptah, Sekhmet et Khons de Basse-Égypte, qui continuèrent à être vénérés sous leurs noms d'origine en Basse-Égypte, mais dont les attributs furent transférés aux divinités Amon, Mout et Khonsou de Thèbes.

La popularité de ces dieux contribua directement au développement, à la richesse et au statut de Thèbes. La construction du temple de Karnak, dédié au culte de la triade, commença à peu près à cette époque (vers 2055 avant J.-C.), et le temple ne cessa de croître en taille et en splendeur au cours des 2 000 années suivantes, à mesure que de nouveaux détails étaient ajoutés. Il reste la plus grande structure religieuse jamais construite au monde. Les prêtres d'Amon, qui administraient les rites du temple, finirent par devenir si puissants qu'ils menacèrent l'autorité du pharaon et, à la troisième période intermédiaire (1069-525 avant J.-C.), les prêtres d'Amon gouvernèrent la Haute-Égypte depuis Thèbes.

Les Hyksôs

Le statut de Thèbes s'accrut au cours de la deuxième période intermédiaire (1640-1532 avant J.-C.) lorsque les princes thébains s'opposèrent aux mystérieux Hyksôs qui régnaient sur la région du Delta. Les Hyksôs étaient un peuple d'origine et d'ethnie inconnues (bien que de nombreuses théories aient prétendu pouvoir les identifier) qui avait soit envahi l'Égypte, soit migré dans la région et pris progressivement le pouvoir. Ils contrôlaient fermement l'Égypte vers 1650 avant J.-C. et étaient considérés par les historiens égyptiens ultérieurs comme des étrangers oppresseurs, même si les preuves suggèrent qu'ils introduisirent de nombreuses innovations et améliorations dans la culture (le char figurant parmi les plus notables).

Supprimer la pub
Advertisement

The Rams of Amon
Les Béliers d'Amon
Dreef (Copyright)

Les Thébains et les Hyksôs respectaient une trêve qui interdisait les hostilités mais ne garantissait pas des relations amicales entre les deux. Les Hyksôs passaient devant Thèbes pour commercer avec les Nubiens au sud et les Thébains les ignoraient jusqu'à ce que le souverain hyksôs Apophis (également connu sous le nom d'Apopi) n'insulte Seqenenrê Tâa de Thèbes en 1560 avant J.-C. et que la trêve ne soit rompue. Les armées thébaines sous les ordres de Tâa attaquèrent les villes hyksôs. Lorsque Tâa mourut au combat, son fils Ouadjkheperrê Kames prit le commandement des armées et rasa leur forteresse d'Avaris. Après sa mort, son frère Ahmosis Ier prit le commandement et s'empara de la ville reconstruite d'Avaris, la capitale des Hyksôs. Ahmosis Ier chassa les Hyksôs d'Égypte et récupéra les terres qu'ils gouvernaient auparavant. Thèbes fut célébrée comme la ville qui avait libéré le pays et fut élevée au rang de capitale du pays.

Nouveau Royaume


Lorsque l'Égypte se stabilisa, la religion et les centres religieux prospérèrent, notamment à Thèbes.

L'Égypte étant à nouveau stabilisée, la religion et les centres religieux prospérèrent, et aucun ne le fit plus que Thèbes. Les sanctuaires, les temples, les bâtiments publics et les terrasses de Thèbes étaient inégalés pour leur beauté et leur splendeur. Il fut écrit que toutes les autres villes étaient jugées "sur le modèle de Thèbes". La puissance et la beauté du grand dieu Amon devaient se refléter pleinement dans la ville sainte de Thèbes et chaque projet de construction cherchait à surpasser le précédent pour proclamer la gloire de ce dieu.

Les Touthmosides de la XVIIIe dynastie (1550-1307 av. J.-C.) prodiguèrent leurs richesses à Thèbes et firent de la capitale égyptienne la ville la plus glorieuse d'Égypte. Les travaux se poursuivirent sur le temple de Karnak, mais d'autres temples et monuments s'élevèrent également. La plupart des plus grands monuments de la Thèbes antique furent construits, rénovés ou améliorés au cours de cette période, entre 1550 et 1069 avant J.-C., avec une brève interruption pendant la période amarnienne.

Vous aimez l'Histoire?

Abonnez-vous à notre newsletter hebdomadaire gratuite!

La période amarnienne

Sous le règne d'Akhenaton (initialement connu sous le nom d'Amenhotep IV, 1353-1336 avant J.-C.), les prêtres d'Amon à Thèbes étaient devenus si puissants qu'ils possédaient plus de terres que le pharaon et plus de richesses que la couronne. Les chercheurs pensent que cette situation incita peut-être Amenhotep IV à adopter le monothéisme et à proclamer l'Aton - le disque solaire - divinité suprême. En niant l'existence d'autres dieux, Akhenaton coupa la source de la richesse et du pouvoir des prêtres. Le culte de tous les autres dieux, à l'exception de l'Aton, fut proscrit, les icônes et les statues sacrées furent détruites et les temples d'Amon fermés. Amenhotep IV changea son nom en Akhenaton (qui signifie "succès pour Aton"), et avec sa proclamation du "seul vrai dieu, Aton", Thèbes fut abandonnée pour El-Amarna et la nouvelle ville d'Akhetaton.

Si le véritable motif de la réforme religieuse d'Akhenaton était d'écraser les prêtres d'Amon et d'absorber leur pouvoir, cela fonctionna à merveille; il n'y avait désormais qu'un seul vrai dieu dont la volonté était interprétée par Akhenaton seul. Si cette nouvelle croyance fonctionna bien pour le pharaon et la famille royale, le peuple égyptien lui était très mécontent. Le culte des nombreux dieux traditionnels de l'Égypte était un aspect important de la vie quotidienne dans tout le pays, et nombreux étaient ceux, outre les prêtres, qui perdirent leur emploi lorsque le monothéisme d'Akhenaton devint la religion du pays. Tous les marchands qui vendaient des objets et des charmes religieux, tous les artisans qui les fabriquaient, tous les scribes qui écrivaient des sorts ou des prières, se retrouvaient sans emploi à moins qu'ils ne consacrent leurs efforts à promouvoir la religion du pharaon.

Amun & Tutankhamun
Amon et Toutânkhamon
Mark Cartwright (CC BY-NC-SA)

Après la mort d'Akhenaton, son fils Toutânkhaton ("image vivante d'Aton") monta sur le trône et changea son nom en Toutânkhamon ("image vivante d'Amon") et restaura les anciens dieux et leurs temples. La capitale revint à Thèbes et il y eut un regain d'intérêt pour les projets de construction, peut-être pour se racheter auprès des dieux qui avaient été négligés, ce qui produisit des temples et des sanctuaires encore plus glorieux. La rive ouest de Thèbes devint une vaste et magnifique nécropole au cours des années et des siècles suivants, et les complexes mortuaires de Deir-El Bahari (comme celui de la reine Hatchepsout) inspiraient la crainte par leur symétrie et leur grandeur.

Horemheb (1320-1292 avant J.-C.), son général, lui succéda. Il pensait que les anciens dieux d'Égypte avaient été irrités par l'insulte faite à leur honneur par le roi hérétique. Il encouragea les projets de construction à Thèbes (et ailleurs) et détruisit toute iconographie liée au culte d'Aton ou à la famille royale de la période amarnienne. Il nomma Ramsès Ier en tant que successeur, et celui-ci fonda la 19e dynastie.

Valley of the Kings (Artist's Impression)
La Vallée des Rois (impression d'artiste)
Mohawk Games (Copyright)

Déclin et héritage

Ramsès II déplaça la capitale de Thèbes vers un nouveau site près de la ville d'Avaris appelé Pi-Ramsès où il construisit un grand palais pour distinguer son règne de ceux qui l'avaient précédé. Il agit peut-être ainsi simplement parce qu'il n'y avait rien d'important à ajouter à la grandeur de Thèbes et qu'il était un pharaon qui avait besoin de marquer les esprits. La prospérité et la beauté d'Avaris s'accrurent tandis que Thèbes déclinait en puissance, mais cette situation fut temporaire. Les prêtres d'Amon, qui pouvaient agir à leur guise si loin de la sphère des pharaons d'Avaris, acquirent d'importantes terres qui leur permirent d'amasser de plus en plus de richesses et de pouvoir. À l'époque ramesside, ils régnaient sur Thèbes en tant que pharaons et les dirigeants actuels d'Avaris ne pouvaient rien y faire.

La ville déclina au cours de la troisième période intermédiaire, mais elle était toujours aussi impressionnante. Le culte continu du populaire Amon et la beauté légendaire de la ville garantirent à Thèbes une place spéciale dans le cœur des Égyptiens. Le pharaon nubien Tanoutamon (alias Tantanami) fit de Thèbes sa capitale au VIIe siècle avant J.-C., se rattachant ainsi à la gloire du passé, mais son règne fut de courte durée. Le roi assyrien Assurbanipal envahit l'Égypte en 667 avant J.-C., puis une seconde fois en 666 avant J.-C., achevant le travail qu'il avait laissé inachevé auparavant, et mit Thèbes à sac, chassant Tanoutamon d'Égypte et laissant la ville en ruines.

Les Assyriens décrétèrent que Thèbes devait être restaurée et reconstruite par la main-d'œuvre égyptienne pour compenser leur résistance à la domination assyrienne. La ville se rétablit peu à peu et le culte d'Amon se poursuivit jusqu'à l'arrivée de Rome, où elle fut détruite par l'armée romaine au 1er siècle de notre ère. Par la suite, elle resta en ruines, peuplée seulement de quelques personnes habitant les bâtiments laissés vacants après le départ des Romains.

À l'époque de l'historien Strabon (c. 63 avant J.-C. - 24 de notre ère), la ville n'était plus qu'une attraction touristique faite de ruines antiques et de rues vides. Thèbes conserva cependant son statut légendaire et continua à être vénérée par ceux qui se souvenaient de sa gloire passée. En tant que site de la Vallée des Rois, de la Vallée des Reines, du grand temple de Karnak et de ceux de Louxor, Thèbes reste un lien vital avec la culture égyptienne ancienne et la vitalité de son histoire jusqu'à nos jours.

Supprimer la pub
Publicité

Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Joshua J. Mark
Auteur indépendant et ex-Professeur de Philosophie à temps partiel au Marist College de New York, Joshua J. Mark a vécu en Grèce et en Allemagne, et a voyagé à travers l'Égypte. Il a enseigné l'histoire, l'écriture, la littérature et la philosophie au niveau universitaire.

Citer cette ressource

Style APA

Mark, J. J. (2016, février 24). Thèbes (Égypte) [Thebes (Egypt)]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-259/thebes-egypte/

Style Chicago

Mark, Joshua J.. "Thèbes (Égypte)." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le février 24, 2016. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-259/thebes-egypte/.

Style MLA

Mark, Joshua J.. "Thèbes (Égypte)." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 24 févr. 2016. Web. 24 avril 2024.

Adhésion