Dynastie des Mamikonian

Définition

Mark Cartwright
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 01 mars 2018
X
translations icon
Disponible dans ces autres langues: anglais
Vardan Mamikonian (by Центральный банк Республики Армения, Public Domain)
Vardan Mamikonian
Центральный банк Республики Армения (Public Domain)

Les Mamikonian étaient un clan puissant qui joua un rôle influent dans les affaires politiques et militaires de l'Arménie à partir du 1er siècle avant notre ère. Ils se sont particulièrement distingués entre 428 et 652 dans la moitié de l'Arménie gouvernée par l'empire sassanide, lorsque les vice-rois marzpan représentaient le roi perse. L'une des figures les plus célèbres de la dynastie fut Vardan Mamikonian, tombé lors de la bataille d'Avarayr, en 451 de notre ère, contre la Perse pour défendre l'indépendance culturelle et religieuse de l'Arménie.

Chute de la dynastie des Arsacides

La dynastie des Arsacides régna sur l'Arménie à partir de l'an 12 de notre ère et réussit à maintenir son équilibre sur la corde raide diplomatique entre les grandes puissances qu'étaient Rome et la Perse pendant quatre siècles. Au Ve siècle de notre ère, cependant, l'empire sassanide commença à étendre son influence dans des régions auparavant disputées entre les deux empires. L'Arménie avait déjà été officiellement divisée entre la Perse et l'Empire romain d'Orient (Byzantin) en 387 de notre ère. Le dernier souverain arsacide fut Artachès IV (ou Artaxias IV, r. de 422 à 428), car la couronne arménienne, incapable de réprimer les factions pro-persanes et anti-chrétiennes à la cour, fut abolie par la Perse dans sa moitié du pays (parfois appelée Persarménie). En 428 de notre ère, les marzpans furent installés, un poste plus élevé que celui de satrape et plus proche de celui de vice-roi. Représentant le roi sassanide, les marzpans disposaient d'une autorité civile et militaire totale en Arménie, et le système ne changea pas jusqu'au milieu du VIIe siècle de notre ère.

Supprimer la pub
Advertisement
Les Mamikonian avaient été particulièrement performants sur le plan militaire grâce à leur capacité à lever des forces de cavalerie de 3 000 chevaliers.

La dynastie qui régnait désormais sur l'Arménie était celle des Mamikonian, dont le cœur se trouvait dans la province septentrionale de Tayk. Leur premier membre connu est Mancéus, qui défendit Tigranocerta en 69 avant notre ère contre les attaques romaines. Clan puissant depuis longtemps, les Mamikonian étaient particulièrement performants sur le plan militaire grâce à leur capacité à lever des forces de cavalerie de 3 000 chevaliers. À la fin du IVe siècle de notre ère, le poste héréditaire de grand maréchal (sparapet), qui dirigeait les forces armées de l'Arménie, était généralement occupé par un seigneur mamikonian. Parmi les autres familles nobles, les Mamikonian n'étaient que les deuxièmes en importance après la famille royale arsacide elle-même, et deux de leurs membres avaient même été régents: Mushegh et Manuel Mamikonian.

Après la chute de la maison régnante des Arsacides, les Mamikonian se retrouvèrent à dominer la politique et les affaires militaires arméniennes dans les limites imposées par leurs suzerains perses. L'un des premiers princes mamikonian les plus puissants fut Hamazasp, qui épousa Sahakanyush, la fille du premier évêque Sahak, vers 439 de notre ère. Ce mariage unifia les familles féodales et ecclésiastiques les plus importantes d'Arménie et les vastes territoires des Mamikonian avec ceux des descendants de saint Grégoire l'Illuminateur (mort vers 330 de notre ère). Au cours des trois siècles suivants, sept princes mamikonian régneraient sur l'Arménie.

Supprimer la pub
Advertisement

Armenian Marzpanate
Marzpanat arménien
armenica.org (CC BY-SA)

Règne des Sassanides

Heureusement pour l'Arménie, la Perse sassanide, tout en choisissant chaque vice-roi au pouvoir, laissa en grande partie tranquilles les deux institutions clés de l'État arménien: les nakharars et l'Église. Les premiers étaient des princes locaux dont les rangs et les titres étaient basés sur les clans héréditaires de l'ancienne Arménie, et qui gouvernaient leurs propres terres étendues comme des fiefs semi-autonomes. Certains princes changèrent de loyauté envers les Perses, se convertissant même au zoroastrisme, en échange d'impôts et d'autres privilèges sous le nouveau régime.

La seconde institution, l'Église chrétienne fondée en Arménie vers 314 de notre ère, ne fut pas interdite et écrasée. Elle fut plutôt indirectement attaquée par les Sassanides à travers leur promotion active du zoroastrisme, l'envoi de missionnaires de Perse et la réduction des privilèges fiscaux pour les propriétés foncières de l'Église. Les institutions proprement dites des églises et des monastères, tout comme les nakharars, furent largement autorisées à conserver leurs terres et leurs revenus, à maintenir un profil bas et à vivre pour se battre un autre jour.

Supprimer la pub
Advertisement

Les choses se précipitèrent avec la succession du roi perse Yazdgard II vers 439 avant notre ère et de son premier ministre Mihr-Narseh. Les souverains sassanides soupçonnaient depuis longtemps les chrétiens arméniens de n'être que des espions de Byzance en territoire perse, mais ces deux personnages étaient des partisans zélés du zoroastrisme et l'épée à double tranchant de la politique et de la religion était sur le point de réduire l'Arménie à sa plus simple expression. Les obligations fiscales de l'Église furent accrues, des évêques plus favorables aux Perses furent nommés et une délégation de nobles et de membres du clergé invités en Perse fut même contrainte de se convertir à la religion perse sous peine de mort. Un affrontement militaire semblait inévitable, et il eut lieu en 451 de notre ère, lors de la bataille d'Avarayr (ou bataille d'Avaraïr), lorsque les Arméniens affrontèrent une imposante armée perse.

Bataille d'Avarayr

La bataille fut précédée par des manifestations sporadiques de rébellion ouverte: des temples zoroastriens furent incendiés et des prêtres furent même tués. Il y eut également une petite victoire arménienne contre une petite force perse au cours de l'été 450 de notre ère. La crise atteignit son paroxysme en mai ou juin 451 de notre ère, dans la plaine d'Avarayr (Iran moderne). Les quelque 6 000 Arméniens étaient dirigés par Vardan Mamikonian, le fils d'Hamazasp, et présentaient un véritable front uni de l'aristocratie et de l'Église anti-persane. Malheureusement pour les Arméniens, l'aide de l'Empire byzantin ne fut pas au rendez-vous, malgré l'envoi d'une ambassade à cet effet. Il n'est peut-être pas surprenant que le marzpan Vasak Siuni, soutenu par les Perses, n'ait pas non plus participé à la bataille.

Battle of Avarayr
Bataille d'Avarayr
Karapet Berkretsi (Public Domain)

Les Perses, largement supérieurs en nombre à leurs adversaires et alignant, en plus de leurs troupes ordinaires, un corps d'élite d'"Immortels" et une foule d'éléphants de guerre, remportèrent la bataille assez facilement et massacrèrent leurs adversaires; "martyrs" serait le terme utilisé par l'Église arménienne par la suite. En effet, la bataille devint un symbole de résistance et Vardan, qui mourut sur le champ de bataille, fut même élevé au rang de saint. Des rébellions mineures se poursuivirent au cours des décennies suivantes et les Mamikonian, en particulier, poursuivirent une politique de résistance prudente contre le contrôle culturel perse. Cette stratégie s'avérerait payante puisqu'en 484 de notre ère, le traité de Nvarsak fut signé entre les deux États, accordant à l'Arménie une plus grande autonomie politique et une plus grande liberté de pensée religieuse. Les Arméniens furent aidés en cela par les désastres militaires que subirent les Sassanides sur leurs frontières orientales et par le fait que les Perses étaient particulièrement occupés par l'autre côté de leur empire.

Supprimer la pub
Advertisement

En fin de compte, Avarayr fut alors, et est toujours, considérée comme une victoire morale pour l'Arménie chrétienne. Sur le plan politique, les Mamikonian remportèrent également un franc succès, puisque Vahan, le neveu de Vardan, fut nommé marzpan en 485 de notre ère. Pendant son règne de dix ans, l'Arménie prospéra, comme en témoignent les nombreux projets de construction de l'époque, en particulier la cathédrale de Dvin et de nombreuses basiliques impressionnantes. Le commerce était également florissant, et la ville d'Artachat fut confirmée comme point d'échange entre les empires byzantin et perse dans un édit byzantin de 562 avant notre ère.

Comme en politique, les chrétiens arméniens durent trouver leur propre chemin entre l'est et l'ouest.

Le zèle de l'Arménie pour le christianisme la rapprocha de l'Empire byzantin et plusieurs souverains mamikonian bénéficièrent du patronage de l'empereur à Constantinople en recevant le titre honorifique de Prince d'Arménie. Cependant, les Églises arménienne et byzantine divergeaient souvent sur des questions de dogme. Le désaccord avec les décrets du concile de Chalcédoine, en 451 de notre ère, ouvrit une brèche qui n'a jamais été refermée. Puis le concile de Dvin, vers 554, déclara l'adhésion de l'Église arménienne à la doctrine du monophysisme (le Christ n'a qu'une seule nature et non deux), rompant ainsi avec le duophysisme de l'Église romaine. Comme en politique, les chrétiens arméniens durent trouver leur propre chemin entre l'Est et l'Ouest.

Moïse de Khorène

L'historien Moïse de Khorène est un autre personnage important de la période des Mamikonian. Largement connu comme le père de l'histoire arménienne, son Histoire des Arméniens rassemble des textes anciens, des traditions orales et les embellissements de l'auteur, et est devenu la source historique de base de l'histoire arménienne depuis qu'il fut compilé dans la seconde moitié du 5e siècle de notre ère (bien que certains historiens considèrent que Moïse aurait vécu à une période allant jusqu'au 8e siècle). L'ouvrage, du moins pour les érudits occidentaux, est notoirement incohérent et contient de nombreuses inventions, mais son effet global n'est pas contesté : il a contribué à créer un sentiment d'histoire continue et d'appartenance à une nation pour le peuple arménien.

Supprimer la pub
Advertisement

Déclin et successeurs

À la fin du VIe siècle, l'Arménie redevint un point de discorde entre la Perse et l'Empire byzantin, et un nouveau partage fut établi, qui vit Byzance acquérir les deux tiers de l'Arménie. Mais le pire était encore à venir. En 627, l'empereur byzantin Héraclius (r. de 610 à 641) mena une guerre de grande envergure contre les Sassanides et l'Arménie fut prise entre deux feux. Cette campagne mit fin au contrôle sassanide de l'Arménie, mais la domination byzantine fut de courte durée en raison de la montée en puissance spectaculaire d'une nouvelle puissance dans la région, le califat Rashidun, qui conquit la capitale sassanide Ctésiphon en 637.

L'Arménie fut conquise par les Arabes entre 640 et 650, après avoir joué pendant des décennies, comme si souvent auparavant, le rôle de pion stratégique dans une bataille d'empires entre les Arabes et l'Empire byzantin. L'Arménie fut officiellement annexée en tant que province du califat omeyyade en 701. Bien que les Mamikonian soient restés un clan important - plusieurs de leurs chefs ayant servi de points de ralliement pour d'importantes rébellions au VIIIe siècle - leur position au premier plan de la politique arménienne finit par être usurpée par une nouvelle dynastie, les Bagratouni (ou Bagratides), qui s'imposèrent même, à la fin du IXe siècle, en tant famille royale d'Arménie.

This article was made possible with generous support from the National Association for Armenian Studies and Research and the Knights of Vartan Fund for Armenian Studies.

Vous aimez l'Histoire?

Abonnez-vous à notre newsletter hebdomadaire gratuite!

Supprimer la pub
Publicité

Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Mark Cartwright
Mark est un auteur, chercheur, historien et éditeur à plein temps. Il s'intéresse particulièrement à l'art, à l'architecture et à la découverte des idées que toutes les civilisations peuvent nous offrir. Il est titulaire d'un Master en Philosophie politique et est le Directeur de Publication de WHE.

Citer cette ressource

Style APA

Cartwright, M. (2018, mars 01). Dynastie des Mamikonian [Mamikonian Dynasty]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-16839/dynastie-des-mamikonian/

Style Chicago

Cartwright, Mark. "Dynastie des Mamikonian." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le mars 01, 2018. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-16839/dynastie-des-mamikonian/.

Style MLA

Cartwright, Mark. "Dynastie des Mamikonian." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 01 mars 2018. Web. 28 avril 2024.

Adhésion