Architecture de Chine Ancienne

Définition

Mark Cartwright
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 24 octobre 2017
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Disponible dans ces autres langues: anglais, chinois, persan
Traditional Chinese Roof Tiles & Acroteria (by Splitbrain, CC BY-SA)
Tuiles et acrotères traditionnels chinois
Splitbrain (CC BY-SA)

Les enceintes fortifiées, les pavillons surélevés, les colonnes et les lambris en bois, les tuiles vernissées jaunes, les jardins paysagers et l'application minutieuse de l'urbanisme et de l'utilisation de l'espace sont autant de caractéristiques notables de l'architecture de la Chine ancienne, dont beaucoup jouent encore un rôle important dans l'architecture moderne de toute l'Asie de l'Est. Les architectes furent influencés par les idées de l'Inde et du bouddhisme qui y naquit, mais les bâtiments de la Chine ancienne restèrent remarquablement constants dans leur apparence fondamentale au fil des siècles, inspirant une grande partie de l'architecture des autres États voisins d'Asie de l'Est, en particulier dans l'ancien Japon et la Corée. Malheureusement, peu d'édifices de la Chine ancienne subsistent aujourd'hui, mais des reconstructions peuvent être faites à partir de modèles en argile, de descriptions dans des textes contemporains et de représentations dans l'art, comme les peintures murales et les récipients en bronze gravés.

Principales caractéristiques

L'architecture chinoise est restée remarquablement constante tout au long de l'histoire du pays. À partir de la région de la Terre Jaune, les mêmes types de matériaux et de structures ont été utilisés pendant des siècles. Le bois a toujours été préféré à la pierre, et les tuiles en céramique émaillée constituaient le matériau de prédilection pour les toits. Le bâtiment le plus typique, du moins pour les grandes structures destinées à l'élite ou à un usage public telles que les temples, les salles et les tours d'entrée, était construit sur une plate-forme surélevée faite de terre compactée et revêtue de briques ou de pierres. Les exemples les plus anciens datent de la dynastie Shang (c. 1600 - 1046 av. J.-C.) et, au fil du temps, ils s'agrandirent avec l'ajout de niveaux supplémentaires pour créer une impressionnante terrasse en gradins. Les exemples de fondations en terre des sites d'Erlitou, qui datent d'environ 1900 à environ 1550 avant notre ère, varient en taille de 300 mètres carrés à 9 600 mètres carrés et comprennent souvent des tuyaux d'évacuation souterrains en céramique.

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Les bâtiments chinois utilisent des couleurs vives : vermillon pour les piliers, jaune pour les tuiles vernissées et vert pour les éléments décoratifs tels que les consoles sous l'avant-toit.

Le type de bâtiment le plus courant est constitué de poteaux en bois régulièrement espacés, renforcés par des poutres transversales horizontales. Afin de mieux protéger le bâtiment des dommages causés par les tremblements de terre, on utilisait très peu de clous et les joints entre les pièces de bois s'emboîtaient à l'aide de tenons et de mortaises, ce qui leur conférait une plus grande flexibilité. Les poteaux de bois supportaient un toit de chaume dans l'architecture antérieure, puis un toit à pignon et un toit de tuiles dont les angles s'incurvaient légèrement vers l'extérieur et vers le haut aux coins. Au IIIe siècle de notre ère, les toits à croupe et à pignon sont courants. Il n'y a aucune trace de dôme dans l'architecture chinoise, ce qui n'est en tout cas pas nécessaire pour les structures en bois, bien que les tombes en pierre et en brique de différentes époques aient des portes voûtées et des toits en voûte ou en encorbellement.

Gate Towers, Chang'an
Tour de Chang'an
Unknown Artist (Public Domain)

Pour répartir le poids du toit sur les poteaux de bois qui le soutiennent et permettre au toit de s'étendre au-delà de la surface du bâtiment lui-même, on a créé le dougong, qui est un support reliant le sommet du poteau et la poutre horizontale du toit. Il est probable que la conception de toits dépassant les murs du bâtiment - une caractéristique si typique de l'architecture asiatique - ait d'abord été destinée à protéger les colonnes en bois et leurs bases de la détérioration due à l'exposition à la pluie. Dans le but de créer plus d'espace à l'intérieur du bâtiment, les colonnes ont été réduites et la structure du toit a été rendue plus complexe afin de répartir davantage le poids, en combinant des consoles avec des poutres en porte-à-faux et des poutres transversales sous les chevrons de la toiture. À l'extérieur, les bâtiments chinois arborent des couleurs vives : la peinture vermillon est appliquée sur les piliers et les balustrades, le jaune sur les tuiles vernissées et le vert sur les éléments décoratifs tels que les consoles sous les avant-toits.

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Les temples bouddhistes suivaient la même formule de base que celle décrite ci-dessus. Bien qu'aucun ne subsiste aujourd'hui, on peut en voir des exemples dans le complexe du temple Horyuji du VIIe siècle de notre ère et dans le complexe Kofukuji, tous deux situés près de Nara au Japon, qui ont fidèlement copié l'architecture des temples de Chang'an, la capitale des Tang. La plupart des temples ont été construits selon une orientation précise et les bâtiments ont été érigés sur une plate-forme surélevée d'au moins un mètre de hauteur. Les bâtiments annexes étaient disposés symétriquement autour du temple principal qui pouvait avoir plus d'un étage, ce qui est rare dans l'architecture chinoise.

La preuve la plus tangible de l'influence de l'Inde sur l'architecture chinoise est la pagode. Dérivé du stupa, les architectes chinois ont rendu la structure de la pagode beaucoup plus grandiose et ont ajouté beaucoup plus d'étages, souvent jusqu'à douze. Cependant, les tours n'avaient qu'une fonction d'exposition et les différents étages n'étaient pas destinés à une utilisation réelle, d'où la réduction de la taille pour chaque étage successif et l'absence d'accès à ces derniers. Les balustrades souvent ajoutées à chaque étage n'étaient qu'une partie de l'illusion que chaque étage était accessible.

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Les pagodes étaient construites en bois autour d'une colonne centrale en bois, et ce n'est que plus tard que la pierre et la brique ont été utilisées, bien que le bois ait fait son retour lorsqu'on s'est rendu compte qu'il était possible d'atteindre une plus grande hauteur avec ce matériau. Il est probable que les pagodes aient été recouvertes d'un enduit à la chaux pour imiter les structures en pierre copiées en Inde. La pagode a également donné l'idée des tours monumentales destinées à marquer les tombes. Il s'agit généralement de structures carrées à plusieurs étages, souvent dotées de fenêtres à chaque niveau, là encore pour donner l'illusion de l'accessibilité et n'ayant aucune fonction particulière, si ce n'est celle d'impressionner l'observateur à distance. La pagode tombale de Xuan Zang, dans la province du Henan, datant du 8e siècle de notre ère, en est un bon exemple.

Pagoda, Tianning Temple
Pagode, temple de Tianning
BabelStone (CC BY-SA)

Dans l'ensemble, l'architecture chinoise est restée remarquablement constante. L'une des rares évolutions a consisté à simplifier les poutres du toit pour alléger la structure et à augmenter la hauteur des piliers de soutien pour obtenir une proportion plus élégante de la hauteur par rapport à la largeur. Les toits sont également beaucoup plus courbés aux angles. Un autre changement a été l'ajout éventuel de tuiles décoratives et de figures telles que des dragons aux extrémités et aux crêtes des toits. Le poids supplémentaire de ces ajouts au toit a été supporté par une meilleure conception des supports de toit et le regroupement de quatre supports sur une colonne, l'utilisation de poutres en porte-à-faux plus nombreuses et l'utilisation de chapiteaux de colonne plus larges.

L'urbanisme

Les Chinois accordaient une importance particulière à l'urbanisme, comme en témoignent leurs deux capitales les plus anciennes, Luoyang et Chang'an. Dans ces villes, de larges avenues et des rues secondaires plus petites se croisaient à angle droit pour créer un tapis de rectangles précis. L'ensemble de la zone, soit quelque 8 000 hectares pour les plus grandes villes, était entouré d'un mur en pente pouvant atteindre 10 mètres de haut. Des portes à tour donnaient accès à la ville, Luoyang, par exemple, en comptait 12.

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L'emplacement des différents bâtiments était souvent déterminé en fonction de la géographie environnante. De nombreux bâtiments importants et palais royaux étaient alignés sur un axe nord-sud, l'entrée principale étant orientée vers le sud. Si un bâtiment était composé de plusieurs parties reliées par des cours intermédiaires, celles-ci étaient toutes alignées sur le même axe, l'une derrière l'autre. Les structures moins importantes étaient construites sur les côtés est et ouest des bâtiments principaux.

Chang'an Street Plan
Plan Urbain de Chang'an
Jason22 (CC BY-SA)

La relation entre les bâtiments et entre les pièces à l'intérieur de ces bâtiments était également importante pour les Chinois. L'architecture pouvait être utilisée pour exprimer les hiérarchies sociales et politiques, comme l'explique l'historien M. E. Lewis :

Dès les premiers temps, le pouvoir politique chinois s'est articulé autour de l'autorité de l'intérieur sur l'extérieur. Les temples, les palais et les maisons de la Chine primitive et de son histoire étaient entourés de murs à l'extérieur, et les premiers bâtiments que l'on rencontrait après avoir franchi la porte étaient les bâtiments publics où les hommes menaient leurs affaires. C'est là que les "initiés", c'est-à-dire les membres d'une famille ou le souverain et sa maison, recevaient les personnes venant de l'extérieur. Au fur et à mesure qu'un visiteur se dirigeait vers l'arrière, les bâtiments devenaient plus "intérieurs" et privés, et leur accès était plus restreint. Dans un complexe résidentiel, ces bâtiments sont les chambres privées des hommes et des femmes de la maison. Dans un palais impérial, ces bâtiments étaient les quartiers d'habitation de l'empereur, qui, sous la dynastie Han, devinrent le lieu de la cour intérieure. (163)

Dans les palais impériaux des dynasties successives, le passage de l'extérieur à l'intérieur impliquait la traversée d'un certain nombre de cours intermédiaires, et à chaque nouveau périmètre, des fonctionnaires rencontraient et contrôlaient le visiteur, le droit d'accès devenant de plus en plus limité. Ce n'est donc pas pour rien que le palais de l'empereur finit par être baptisé "Cité interdite", ce qui eut pour conséquence que "le pouvoir et le prestige étaient marqués par la capacité à se déplacer toujours plus à l'intérieur du saint des saints qu'était la présence impériale" (Lewis, 164). Les palais royaux, immenses et impressionnants, dominèrent alors la capitale et devinrent le symbole de la présence mais aussi de l'invisibilité de l'empereur chinois.

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Architecture domestique

Les petites maisons privées des anciens Chinois étaient généralement construites en boue séchée, en pierres brutes et en bois. Les maisons les plus anciennes sont carrées, rectangulaires ou ovales. Elles avaient des toits de chaume (en pailles ou en fagots de roseaux) soutenus par des poteaux de bois dont les trous de fondation sont souvent encore visibles. Des vestiges de maisons excavées sur des sites de la période néolithique Yangshao (5000-3000 av. J.-C.) indiquent que les maisons étaient construites avec un sous-sol. Les maisons de Banpo, dans le Shaanxi, étaient enfoncées à 60 ou 70 cm sous la surface du sol, mais d'autres exemples ailleurs (par exemple à Anyang) se trouvaient jusqu'à trois mètres sous le sol. Les villages sont souvent constitués d'un groupe de cinq habitations construites autour d'une cour commune. Certaines maisons sont assez grandes, mesurant 16 x 15 mètres. L'intérieur est équipé d'un foyer et de surfaces surélevées pour les lits, le sol étant parfois recouvert d'argile blanche ou jaune, et de nombreuses fosses de stockage. Dans les régions sujettes aux inondations, comme la partie inférieure du fleuve Yangtze, les maisons étaient construites sur pilotis. Les maisons surélevées de ce type sont représentées sur des récipients en bronze gravés.

Han Dynasty Farm Model
Maquette de ferme de la dynastie Han
Mark Cartwright (CC BY-NC-SA)

Les bâtiments plus récents ont des colonnes reposant sur des bases en pierre ou en bronze qui sont placées un peu plus bas que le niveau du sol, souvent au-dessus d'une fosse remplie de gravier. Les toits inclinés en tuiles de terre cuite sont simples et les tuiles sont perforées ou munies de boutons pour faciliter leur emboîtement. Il est possible de reconstituer leur conception à partir des modèles de bâtiments en argile généralement laissés dans les tombes de la dynastie Han (206 av. J.-C. - 220 ap. J.-C.). Ces modèles représentent souvent de modestes bâtiments agricoles construits autour d'une petite cour intérieure et parfois d'un enclos adjacent pour les animaux.

Les maisons privées chinoises des cités impériales comportaient plusieurs pièces communicantes, le bâtiment étant protégé de la rue par un haut mur.

Il existe des preuves de l'existence d'alternatives à l'architecture courante en bois et en briques de boue séchée. Les espaces muraux entre les colonnes de bois peuvent dans certains cas avoir été remplis de panneaux de bois laqués plutôt que de boue. Ces panneaux étaient sculptés et incrustés; des exemples subsistants ont été trouvés à Xiaotun. Par ailleurs, les tombes du Henan des IIe et Ier siècles avant notre ère étaient construites en briques d'argile creuses, tout comme les murs de fortification et les tours de guet de l'époque, et il semble raisonnable de supposer que le même matériau était utilisé dans une partie de l'architecture domestique, même si le bois était préféré.

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Dans les villes impériales, les maisons privées chinoises comportaient plusieurs pièces reliées entre elles et l'ensemble du bâtiment était protégé de la rue par un haut mur. Le chauffage était assuré par des canalisations souterraines. Les maisons situées dans les zones plus rurales et les régions plus chaudes possédaient des pièces donnant directement sur la rue ou les champs.

Architecture troglodytique

Les sanctuaires rupestres chinois se composent généralement d'une seule salle rectangulaire creusée profondément dans la paroi rocheuse et de nombreuses niches creusées dans les murs. On accède à la façade par un escalier taillé dans la roche ou en bois, et de nombreuses grottes sont reliées entre elles par des passerelles et des auvents.

Les grottes de Longmen sont peut-être le groupe le plus célèbre. Elles consistent en des centaines de sanctuaires et de sculptures, principalement bouddhistes, créés à partir du Ve siècle de notre ère. Situées près de l'ancienne capitale Luoyang, les grottes furent sculptées, utilisées et agrandies par plusieurs dynasties chinoises, notamment les Wei du Nord et les Tang. Creusé dans les falaises de calcaire qui bordent la rivière Luo, le site abrite des sanctuaires rupestres, des sculptures de personnages plus grands que nature et d'innombrables inscriptions d'éloges funèbres et de prières. Les figures sculptées dans la paroi rocheuse de Longmen peuvent atteindre une hauteur de plus de 17 mètres et représentent des bouddhas, des bodhisattvas et des figures de démons gardiens.

Un autre groupe impressionnant de sanctuaires et de sculptures bouddhistes se trouve dans les grottes de Yungang, près de la ville moderne de Datong. Également créées par les Wei du Nord, le premier groupe des 53 grottes du site fut sculpté dans les falaises de grès avant même les grottes de Longmen, entre 460 et 494 de notre ère. Le site compte plus de 50 000 images bouddhiques.

La Grande Muraille

La réalisation architecturale la plus célèbre des anciens Chinois est sans aucun doute la Grande Muraille de Chine, construite en grande partie sous le règne de l'empereur Qin Shi Huangti dans les dernières décennies du IIIe siècle avant notre ère. La muraille incorpore de nombreux tronçons de murs défensifs plus anciens et fut agrandie à nouveau sous la dynastie Han, en utilisant de la pierre et des briques. S'étendant sur quelque 5 000 kilomètres, de la province du Gansu à l'est jusqu'à la péninsule de Liaodong (non sans interruptions), elle était destinée à protéger la frontière septentrionale de la Chine contre les invasions des tribus nomades des steppes. Des tours de guet carrées furent construites à intervalles réguliers, et une communication rapide entre elles était possible grâce à l'espace dont disposaient les conducteurs de chars pour longer le sommet des murs.

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Mark Cartwright
Mark est un auteur, chercheur, historien et éditeur à plein temps. Il s'intéresse particulièrement à l'art, à l'architecture et à la découverte des idées que toutes les civilisations peuvent nous offrir. Il est titulaire d'un Master en Philosophie politique et est le Directeur de Publication de WHE.

Citer cette ressource

Style APA

Cartwright, M. (2017, octobre 24). Architecture de Chine Ancienne [Ancient Chinese Architecture]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-16293/architecture-de-chine-ancienne/

Style Chicago

Cartwright, Mark. "Architecture de Chine Ancienne." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le octobre 24, 2017. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-16293/architecture-de-chine-ancienne/.

Style MLA

Cartwright, Mark. "Architecture de Chine Ancienne." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 24 oct. 2017. Web. 29 avril 2024.

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