Les thermes romains de Bath - Une plongée dans l'histoire ancienne de la Grande-Bretagne

Article

Wanda Marcussen
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 23 août 2019
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Disponible dans ces autres langues: anglais

Bath, la célèbre ville thermale du Somerset, en Angleterre, attire depuis des siècles des gens venus de près ou de loin pour profiter de ses sources et de ses bains curatifs. Aujourd'hui, la ville est connue pour sa magnifique architecture géorgienne et pour être la destination de l'élite fortunée des XVIIIe et XIXe siècles. Les riches et les puissants se rendaient dans cette belle ville pour boire l'eau chaude au goût étrange, mais l'utilisation de l'eau des sources chaudes a une histoire bien plus ancienne.

Au centre de la ville classée au patrimoine mondial de l'UNESCO, vous pouvez visiter les thermes romains. Vous y découvrirez comment la source d'eau chaude était vénérée et utilisée par les Romains qui conquirent la Grande-Bretagne en 43 de notre ère. Les Romains construisirent un temple et un complexe de bains en l'honneur de Minerve Sulis, un mélange romano-celtique de Sulis, la déesse celte de la guérison et de l'eau sacrée, et de Minerve, la déesse romaine de la sagesse. En quelques décennies, la ville d'Aquae Sulis se développa autour du complexe thermal et devint l'un des plus importants sites de cure et de pèlerinage de la partie occidentale de l'Empire romain. La visite des thermes romains, autrefois oubliés, vous donnera un aperçu de la longue histoire de la ville antique. C'est également l'un des endroits d'Angleterre où vous pourrez en apprendre beaucoup sur la vie, la religion et les changements dans la société de la Grande-Bretagne romaine.

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The Great Bath, UK
Le Grand bain, Bath, Royaume-Uni
simpologist (CC BY-NC-SA)

La visite du musée des thermes romains permet d'accéder aux vestiges de l'impressionnant complexe de bains antiques, ainsi qu'à la collection de pièces provenant des fouilles et des travaux de conservation du musée.

Les Romains et les îles britanniques

Pour les Romains, les îles lointaines à l'ouest étaient séparées du monde connu par le grand fleuve Océan, également connu sous le nom d'Oceanus, qui encerclait le monde. Les généraux et les empereurs romains qui explorèrent et conquirent ces terres inconnues étaient fiers de vaincre le grand Océan et les dangers contenus dans ses eaux bleues profondes.

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Jules César (100-44 av. J.-C.) fut le premier général romain à tenter de conquérir les habitants barbares et non civilisés des îles au 1er siècle avant notre ère. Il établit le premier contact entre les Romains et les différentes tribus britanniques vers 55 avant notre ère, mais celles-ci ne furent vaincues qu'en 43 de notre ère, lorsque Claude (r. de 41 à 54 de notre ère) régna en tant que quatrième empereur de Rome.

Le Grand Bain, le temple et la source sacrée étaient les principales attractions d'Aquae Sulis.

Quelques décennies seulement après la conquête de la majeure partie de l'île, l'impressionnant complexe de bains d'Aquae Sulis fut construit et utilisé par les Romains et les habitants de la région. La première mention des thermes date de l'an 76 de notre ère, et l'on pense que les bâtiments des thermes et du temple existaient déjà depuis un certain temps à cette époque. Les Romains découvrirent rapidement ce site sacré et curatif et le transformèrent en l'un des symboles de la civilisation romaine: le bain public.

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Dédié à la déesse locale Sulis, personnification de l'eau curative, le site était très probablement un bosquet sacré pour les habitants de la région et peut-être pour les mystérieux druides (considérés comme les sages - peut-être aussi des femmes - et les chefs spirituels des anciennes tribus britanniques, mais dont on sait peu de choses) pendant des siècles avant l'arrivée des Romains. Selon une ancienne légende, la source thermale curative aurait été découverte par le prince Bladud en 863 avant notre ère. Le prince avait été banni de son royaume car il souffrait de la lèpre et voyageait dans la campagne avec ses cochons. Lorsque les cochons, infectés par la même maladie, se roulèrent dans la boue dans la région connue aujourd'hui sous le nom de Bath, ils furent guéris de leurs infections et le prince découvrit les sources d'eau chaude et leurs pouvoirs de guérison. Il guérit de sa maladie, devint roi de son royaume légitime et fonda une ville à l'endroit où se trouvait l'eau curative.

Roman Sacred Spring
Source sacrée romaine
Wanda Marcussen (CC BY-NC-SA)

Il reste peu de traces des cultes préromains qui ont laissé trop peu d'empreintes de leurs pratiques spirituelles pour que nous puissions les étudier. On pense que la pratique consistant à construire des temples et à sculpter les dieux et déesses qu'ils vénéraient ne faisait pas partie de l'ancienne religion britannique. Ce changement de pratique religieuse est l'un des changements les plus visibles qui s'accrut avec l'arrivée des Romains sur l'île. La religion à proprement parler changea également, puisque les habitants adoptèrent les dieux romains. Toutefois, cette transformation se fit dans les deux sens, les Romains adoptant également les divinités locales ou les fusionnant, comme la déesse adorée à Aquae Sulis: Minerve Sulis. Les Romains qui découvrirent le site pensaient très probablement que la déesse locale détenait les mêmes pouvoirs que leur propre Minerve, la déesse de la sagesse, de la médecine, du commerce, de l'artisanat, de la poésie, des arts et, plus tard, de la guerre.

Les thermes antiques

En entrant dans le musée des thermes romains, la première chose sur laquelle vous posez les yeux est le Grand Bain, la plus grande attraction de cet immense complexe. Vous aurez d'abord une bonne vue de la piscine, aujourd'hui sans toit, en longeant les hauts murs et les terrasses construits pour permettre au public de visiter le site. Vous y trouverez des informations générales sur la découverte du bain au XVIIIe siècle et sur le musée. Des informations sont disponibles sur les panneaux d'information répartis dans le musée, mais un audioguide gratuit vous est aussi remis à l'entrée; il vous fournira des informations supplémentaires passionnantes.

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L'aspect le plus important de la ville était clairement sa signification curative et religieuse, ce qui est visible lorsque vous vous promenez dans le musée.

Comme nous l'avons mentionné, le complexe thermal fut construit vers le milieu du 1er siècle de notre ère, et le Grand Bain, ainsi que le temple et la source sacrée auraient été les principales attractions d'Aquae Sulis. La salle du Grand Bain était un merveilleux exemple de l'architecture et de l'ingénierie romaines, car le toit devait se trouver à 20 mètres au-dessus du bain. Il n'y a plus de toit aujourd'hui et l'eau est donc verte en raison des algues qui poussent à la lumière du soleil, ce qui n'aurait pas été le cas dans l'Antiquité. Vous pouvez également voir les statues des généraux et empereurs romains dont les politiques et stratégies eurent un impact sur les îles britanniques. Ces statues furent réalisées par le sculpteur britannique George Anderson Lawson (1832-1904) et sont placées sur la terrasse qui surplombe le bain.

Après avoir observé le Grand Bain depuis la terrasse, vous passez à la partie principale du site: la source d'eau chaude. La source d'eau chaude est ce qui rendait le site si important et si mystérieux pour les autochtones et les Romains, car l'eau de la source monte à un rythme de 1 170 000 litres par jour avec une température de 46°C. En observant l'eau, on peut voir les bulles d'humidité et de gaz quitter la surface, et il n'est pas difficile de comprendre pourquoi les anciens habitants y voyaient l'œuvre d'un monde surnaturel. Le pouvoir de guérison de l'eau était certainement un cadeau de la déesse Sulis.

Les Romains de Bretagne et le temple

La prochaine étape est la partie musée des thermes romains, où vous pourrez en apprendre davantage sur la vie des habitants d'Aquae Sulis et sur les personnes qui s'y rendaient de tout l'Empire romain pour se faire soigner par l'eau magique.

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En entrant dans le musée, on peut étudier certaines des premières découvertes faites sur le site. Il s'agit de pièces de monnaie datant d'avant la construction par les Romains de leur magnifique établissement de bains. Les tribus locales - les Dobunni et les Durotriges - jetaient ces pièces, ornées de bateaux, de têtes humaines et de chevaux à triple queue, dans la source sacrée en guise d'offrande à la déesse.

Sulis Minerva
Minerve Sulis
Wanda Marcussen (CC BY-NC-SA)

La plupart des découvertes de la période romaine sont des objets ayant appartenu aux soldats et aux artisans romains qui voyageaient avec l'armée. Les soldats furent naturellement les premiers Romains à s'installer et à développer ce qui allait devenir Aquae Sulis, et certaines de leurs pierres tombales sont exposées dans le musée, donnant au visiteur un aperçu de leur vie et de leur passé. Les vestiges d'une statue représentant un sanglier peuvent fournir des informations supplémentaires sur l'identité des premiers soldats d'Aquae Sulis. Le sanglier étant le symbole de la 20e légion, il est probable que les soldats de cette légion aient participé à la construction des thermes.

Avec la création des thermes, les pèlerins et les commerçants firent également le déplacement; ils s'installèrent ou finirent involontairement leurs jours à Aquae Sulis. L'exposition présente les restes d'un homme qui, pour une raison inconnue, parcourut un long chemin pour se rendre aux thermes. Le test ADN montre qu'il était probablement né dans la région du Levant, bien loin de la Grande-Bretagne de l'ancien monde romain. Avec tous les visiteurs des thermes et les nouveaux colons, la ville devait être ce que l'on appelle aujourd'hui une ville multiculturelle, où les cultures nouvelles, anciennes, proches et lointaines se rencontraient et fusionnaient.

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Roman Gorgon's Head - Bath
Tête de Gorgone romaine, Bath
Wanda Marcussen (CC BY-NC-SA)

L'aspect le plus important d'Aquae Sulis était sans conteste sa signification curative et religieuse, ce que l'on peut constater en parcourant le musée. L'un des objets les plus emblématiques et les plus mystérieux est le fronton du temple qui se trouvait à l'avant du temple de Minerve Sulis. Le fronton est une sculpture d'une tête de gorgone, que l'on pense être une "Méduse mâle" entourée de cheveux, d'ailes et peut-être de serpents. Les têtes de gorgones sont liées à Minerve et à son équivalent grec, Athéna, qui porte le symbole de la gorgone sur son bouclier et/ou son armure.

La théorie selon laquelle il s'agit d'une tête de gorgone protégeant le temple de Minerve Sulis est possible, mais personne ne sait avec certitude ce que les sculptures sont censées symboliser, et les débats sont toujours en cours parmi les universitaires. La sculpture fut réalisée à l'époque romaine, mais très probablement par des artisans locaux. Il n'est donc pas improbable que l'imagerie soit un mélange de mythologie et de symbolisme romain et celtique. En vous asseyant et en admirant la magnifique sculpture, qui est parfois éclairée dans ses couleurs d'origine, il est intriguant de spéculer sur la signification que le mystérieux homme gorgone avait pour les visiteurs du temple il y a près de 2000 ans.

Roman Curse Tablets
Tablettes de malédiction romaines
Wanda Marcussen (CC BY-NC-SA)

Les tablettes de malédiction et un masque religieux sont d'autres objets religieux de grand intérêt que l'on peut voir dans le musée. Le masque est fait d'étain et a été trouvé dans la canalisation de la source sacrée - il était peut-être utilisé par un prêtre lors de processions. Les tablettes de malédiction sont des messages écrits sur du plomb ou de l'étain et jetés dans la source sacrée. Les visiteurs demandaient l'aide de la déesse et Sulis était souvent invitée à punir un voleur connu ou inconnu qui avait dérobé les effets personnels de l'auteur de la tablette. En raison de leur importance historique, les tablettes sont inscrites au registre de la Mémoire du monde de l'UNESCO.

Roman Religious Mask - Bath
Masque religieux romain, Bath
Wanda Marcussen (CC BY-NC-SA)

En continuant à marcher dans le musée, vous entrez dans le site qui était la cour du temple. Même si le site est aujourd'hui en ruines, il n'est pas difficile d'imaginer à quoi devait ressembler ce lieu sacré à l'époque de son apogée.

De chaque côté de la cour, deux temples se faisaient face: l'un était dédié à Luna, la déesse de la lune, et l'autre à Sol, le dieu du soleil. La sculpture du fronton du temple de Luna est encore conservée et peut être admirée au musée. Sur la sculpture, la lune est clairement visible derrière sa tête et elle tient également une sorte de bâton. Ce bâton ressemble au bâton d'Asclépios, ce qui a conduit certains universitaires à suggérer que son temple servait de lieu de guérison pour les malades et les blessés.

Goddess Luna Pediment
Fronton de la déesse Luna
Wanda Marcussen (CC BY-NC-SA)

Au centre de la cour se trouvait l'autel sacrificiel. L'autel est encore partiellement debout, sculpté avec certains des anciens dieux et déesses. À Aquae Sulis, c'est là que se déroulait le culte public. Les cérémonies de sacrifices d'animaux se déroulaient sur ces pierres d'autel. En passant devant l'autel, vous verrez le site où se trouvait autrefois le temple de Minerve Sulis. C'était le bâtiment le plus important de la cour du temple. Le temple n'était pas accessible au grand public - seul le prêtre de Minerve Sulis pouvait y pénétrer - mais la statue dorée de la déesse était probablement visible par la porte ouverte. La statue en bronze doré de Minerve Sulis devait revêtir une grande importance pour les personnes qui vivaient et se rendaient sur le site de guérison. La tête de cette statue dorée est tout ce qu'il en reste, car elle fut délibérément détachée du corps à un moment donné de l'Antiquité. Mais elle est magnifique.

Roman Sacrificial Altar - Bath
Autel sacrificiel romain, Bath
Wanda Marcussen (CC BY-NC-SA)

En retournant dans le complexe des bains depuis le niveau du sol, vous pourrez voir le Grand Bain de plus près. Vous pouvez également visiter les autres salles du bain : l'apodyterium (vestiaire), le tepidarium (salle chaude), le caldarium (salle la plus chaude), des salles avec des bains plus petits, une salle avec une grande piscine, et enfin, une salle pour les traitements et les massages. À l'époque romaine, les femmes, les hommes, les riches et les pauvres marchaient dans ces salles et nageaient dans ces piscines. Imaginer leur vie, les interactions qui s'y déroulaient et la relation des Romains de Bretagne avec la source sacrée et la déesse n'a d'autre limite que l'imagination du visiteur.

Caldarium - Bath
Caldarium, Bath
Wanda Marcussen (CC BY-NC-SA)

Avant de partir, n'oubliez pas de prendre votre dose d'eau curative qui attire les pèlerins depuis des millénaires. À la sortie, une fontaine permet de goûter à l'eau. Bien qu'elle soit tiède et peu agréable à boire, elle pourrait guérir toutes vos maladies, comme le prétendent les légendes, et cela vaut certainement la peine d'essayer.

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Bibliographie

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Wanda Marcussen
Wanda a étudié les relations internationales avec une spécialisation en histoire à l'université d'Oslo et elle prépare actuellement un master en histoire environnementale au Trinity College de Dublin.

Citer cette ressource

Style APA

Marcussen, W. (2019, août 23). Les thermes romains de Bath - Une plongée dans l'histoire ancienne de la Grande-Bretagne [The Roman Baths in Bath- A Deep Dive into Britain’s Ancient History]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-1427/les-thermes-romains-de-bath---une-plongee-dans-lhi/

Style Chicago

Marcussen, Wanda. "Les thermes romains de Bath - Une plongée dans l'histoire ancienne de la Grande-Bretagne." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le août 23, 2019. https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-1427/les-thermes-romains-de-bath---une-plongee-dans-lhi/.

Style MLA

Marcussen, Wanda. "Les thermes romains de Bath - Une plongée dans l'histoire ancienne de la Grande-Bretagne." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 23 août 2019. Web. 27 avril 2024.

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