Mur d'Hadrien

Définition

Joshua J. Mark
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 15 novembre 2012
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Disponible dans ces autres langues: anglais, afrikaans, indonésien, italien, espagnol
Hadrian's Wall (by zoonabar, CC BY)
Mur d'Hadrien
zoonabar (CC BY)

Le mur d'Hadrien (connu dans l'Antiquité sous le nom de Vallum Hadriani ou Vallum Aelium) est un ouvrage frontalier défensif situé dans le nord de la Grande-Bretagne et datant de 122 de notre ère. Le mur s'étendait d'une côte à l'autre sur une longueur de 120 km. Bien que l'on pense généralement que le mur ait été construit pour marquer la frontière entre la Grande-Bretagne et l'Écosse, ce n'est pas le cas; personne ne connaît le réel motif de sa construction, mais il ne délimite pas une frontière entre deux pays.

Alors que le mur marquait tout simplement la frontière nord de l'Empire romain en Grande-Bretagne à l'époque, les théories concernant l'objectif d'un projet de construction aussi gigantesque vont de la limitation de l'immigration au contrôle de la contrebande, en passant par les mesures visant à tenir les populations indigènes à distance au nord du mur. Le mur continua à être utilisé jusqu'à ce qu'il ne soit abandonné au début du Ve siècle de notre ère.

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Objectif

L'efficacité militaire de la muraille a été remise en question par de nombreux spécialistes au fil des ans, en raison de sa longueur et de l'emplacement des fortifications le long du tracé. L'argument est que si le mur avait été construit en tant que barrière défensive, il aurait été construit différemment et à un autre endroit. Les professeurs Scarre et Fagan écrivent à ce sujet:

Les archéologues et les historiens ont longtemps débattu de la question de savoir si le mur d'Hadrien était une barrière militaire efficace... Quelle qu'ait pu être son efficacité militaire, il était clairement un symbole puissant de la puissance militaire romaine. Le biographe d'Hadrien remarque que l'empereur fit construire le mur pour séparer les Romains des barbares. De la même manière, les empereurs chinois construisirent la Grande Muraille pour séparer la Chine des peuples barbares des steppes au nord. Dans les deux cas, outre leur fonction militaire, les barrières physiques servaient, aux yeux de leurs bâtisseurs, à renforcer la division conceptuelle entre civilisés et non-civilisés. Elles faisaient partie de l'idéologie de l'empire. (Civilisations anciennes, 313)

L'idée que le mur d'Hadrien fut construit pour retenir ou contrôler d'une manière ou d'une autre les populations du nord ne semble donc pas aussi probable que celle qu'il fut construit en tant que démonstration de force.

Cela semble être la meilleure explication du motif sous-jacent à la construction du mur d'Hadrien. Les Romains étaient confrontés à des soulèvements en Grande-Bretagne depuis leur conquête de la région. Bien que le premier contact de Rome avec la Grande-Bretagne ait eu lieu lors des expéditions de Jules César en 55/54 avant notre ère, Rome n'avait entamé aucune conquête systématique avant l'an 43 de notre ère, sous l'empereur Claude (r. de 41 à 54 de notre ère).

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La révolte de Boadicée des Icènes en 60/61 de notre ère entraîna le massacre de nombreux citoyens romains et la destruction de grandes villes (dont Londinium, l'actuelle Londres) et, selon l'historien Tacite (56-117 de notre ère), démontrait pleinement la barbarie des Bretons dans l'esprit des Romains.

Les forces de Boadicée furent vaincues à la bataille de Watling Street par le général Caius Suetonius Paulinus en 61 de notre ère. À la bataille du Mont Graupius, dans la région de l'actuelle Écosse, le général romain Cnaeus Julius Agricola remporta une victoire décisive sur les Calédoniens de Calgacos en 83 de notre ère. Ces deux engagements, ainsi que le soulèvement dans le nord en 119 de notre ère (réprimé par le gouverneur et général romain Quintus Pompeius Falco), prouvèrent que les Romains étaient à la hauteur de la tâche de gérer les populations indigènes de Grande-Bretagne.

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L'idée que le mur d'Hadrien ait été construit pour retenir ou contrôler les peuples du nord ne semble pas aussi probable que celle qu'il ait été construit en tant que démonstration de force. La politique étrangère d'Hadrien se résumait à "la paix par la force" et le mur aurait été une illustration impressionnante de ce principe. De même que Jules César avait construit son célèbre pont sur le Rhin en 55 avant notre ère pour montrer que lui, et donc Rome, pouvait aller où ils voulaient et faire ce qu'ils voulaient, Hadrien aurait peut-être fait construire son mur dans le même but.

Hadrian's Wall Gate
Porte du mur d'Hadrien
phault (CC BY)

Origine et construction

Hadrien (né Publius Aelius Hadrianus, 76-138 de notre ère, r. de 117 à 138) fut l'un des empereurs les plus actifs de l'histoire de l'Empire romain. Hadrien visita presque toutes les provinces de l'empire au cours de son règne et inspecta en personne et approuva les sites qu'il voulait voir utilisés pour ses projets. Il vint en Grande-Bretagne en 122 de notre ère et fut accueilli dans le nord par le gouverneur Falco, avec lequel il aurait visité la région du mur dont la construction avait peut-être déjà commencé.

Les projets de construction d'Hadrien, notamment en Grèce, sont légendaires et son penchant pour les monuments ambitieux est illustré par le mur éponyme. L'ouvrage fut commencé en pierre (contrairement à d'autres fortifications qui avaient commencé en bois) à l'est et se poursuivit vers l'ouest à travers un terrain accidenté pour créer un impressionnant reflet de la puissance de Rome.

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À l'origine, le mur mesurait 3 mètres de large et 6 mètres de haut à l'est de la rivière Irthing, le tout en pierre, et 6 mètres de large et 3,5 mètres de haut à l'ouest de la rivière, en pierre et en gazon, et s'étendait sur 120 km sur toute la largeur du territoire. Cet ambitieux projet de construction fut réalisé en six ans grâce au travail des légions romaines stationnées en Grande-Bretagne. Les plans pour la construction du mur étaient en place avant la visite d'Hadrien en Grande-Bretagne en 122 de notre ère et, peut-être, la construction avait-elle déjà commencé avant la date traditionnelle attribuée aux premiers travaux sur le mur, peut-être dès 118 de notre ère.

Vallum Hadriani (Hadrian’s wall), c. 122 CE
Vallum Hadriani (mur d'Hadrien), vers 122 de notre ère
Simeon Netchev (CC BY-NC-SA)

Fortifications défensives

Il y avait entre 14 et 17 fortifications le long du mur et un Vallum (un fossé construit à dessein avec des remblais) qui courait parallèlement au mur. Le Vallum mesurait 6 mètres de large sur 3 mètres de profondeur et était flanqué de grands monticules de terre bien tassée. C'est cette composition du site qui donna lieu à l'interprétation traditionnelle de la muraille comme un ouvrage défensif construit pour repousser les invasions venant du nord. Ces fortifications étaient occupées par des troupes romaines et il a été établi que ces soldats durent se battre contre les indigènes de la frontière lors d'escarmouches. Le spécialiste Nigel Rodgers commente:

Environ 15 000 auxiliaires furent déployés le long ou autour du mur. La plupart d'entre eux n'étaient pas répartis le long du mur, mais concentrés dans des camps de 500 ou 1 000 hommes, tels que les Housesteads, d'où ils sortaient pour affronter les intrus. Le mur n'était pas une frontière hermétique, mais il contrôlait la circulation et impressionnait les autochtones. Des forts tels que High Rochester, à 48 km au nord, constituaient des postes avancés, tandis que de puissants renforts pouvaient être appelés depuis la forteresse légionnaire de York, au sud. (177)

Hadrian's Wall Milecastle 37
Fortin 37 du mur d'Hadrien
Carole Raddato (CC BY-SA)

Il est donc clair que le mur avait un aspect défensif, mais cela ne semble pas avoir été son but premier. La construction du Vallum ne semble même pas avoir été faite dans un but défensif. Les chercheurs Lesley et Roy A. Adkins notent que le Vallum "servait probablement de marqueur de frontière, empêchant les civils de s'approcher" (98). Cette affirmation est conforme au consensus croissant des chercheurs selon lequel le mur aurait été conçu davantage comme un geste symbolique, une déclaration spectaculaire de la puissance de Rome, que comme une ligne de défense ou un moyen de limiter sérieusement l'immigration illégale.

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Le mur d'Hadrien et le mur d'Antonin

Le Vallum fut construit après la construction du mur et des forts, comme en témoignent son écart par rapport aux ruines existantes et l'indication claire de chaussées traversant le fossé à des intervalles correspondant à des sites de fortification établis. Lorsque le mur d'Antonin fut construit plus au nord (vers 142 de notre ère par l'empereur Antonin le Pieux), le Vallum semble avoir été partiellement comblé pour faciliter le passage. Le mur d'Antonin fut construit après l'abandon du mur d'Hadrien en tant qu'avant-poste et fut placé plus au nord, dans l'Écosse actuelle, entre le Firth of Forth et le Firth of Clyde.

Le mur d'Antonin fut peut-être construit dans le même but que le mur d'Hadrien, mais on pense qu'il fonctionna de manière plus pragmatique que la construction précédente. On pense que le mur d'Hadrien avait été enduit et blanchi pour qu'il soit un phare brillant de la puissance de Rome, visible à des distances considérables. Le mur d'Antonin ne suggère pas la même grandeur ni, malgré les nombreuses fortifications le long de son tracé, la même intention dans sa conception et sa construction.

Sous le règne de l'empereur Marc Aurèle (r. de 161 à 180 de notre ère), les légions romaines furent ramenées du mur d'Antonin au mur d'Hadrien et les garnisons furent fortifiées dans le but de maintenir les frontières de l'Empire. Le grand monument d'Hadrien, qui témoignait de la puissance de Rome, resta une affirmation impressionnante jusqu'en 410 de notre ère, date à laquelle les légions romaines quittèrent la Grande-Bretagne. L'activité autour et le long du mur semble s'être poursuivie, comme en témoignent les découvertes archéologiques, mais la présence romaine disciplinée après 410 n'est pas attestée le long des deux murs ni dans l'ensemble de la Grande-Bretagne.

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Conclusion

Après le retrait des Romains, de larges portions du mur furent emportées pour des projets de construction personnels par les habitants locaux, mais les ruines du mur semblent avoir été utilisées par les forces bretonnes qui en assuraient la garnison. Aux VIe et VIIe siècles, des pierres du mur furent utilisées jusque dans le royaume de Northumbrie et certaines apparaissent dans l'abbaye de Monkwearmouth-Jarrow. Au cours des siècles suivants, le mur continua à être démantelé pour d'autres projets. D'énormes sections furent enlevées pour fournir un pavage aux troupes britanniques qui se dirigeaient vers le nord sur des pistes boueuses pour réprimer la rébellion jacobite de 1745.

Le mur d'Hadrien aurait pu disparaître complètement sans les efforts d'un homme, l'antiquaire John Clayton (1792-1890) qui, en 1834, commença à acheter les terres entourant le mur afin de le préserver. Les fouilles de Clayton et son enthousiasme pour le site permirent de conserver intacts les vestiges du mur d'Hadrien qui, en 1987, fut déclaré site du patrimoine mondial par l'UNESCO. Aujourd'hui, il est sous la responsabilité de la commission English Heritage et est entretenu en grande partie par des bénévoles qui reconnaissent son immense importance historique.

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Joshua J. Mark
Auteur indépendant et ex-Professeur de Philosophie à temps partiel au Marist College de New York, Joshua J. Mark a vécu en Grèce et en Allemagne, et a voyagé à travers l'Égypte. Il a enseigné l'histoire, l'écriture, la littérature et la philosophie au niveau universitaire.

Citer cette ressource

Style APA

Mark, J. J. (2012, novembre 15). Mur d'Hadrien [Hadrian's Wall]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-11580/mur-dhadrien/

Style Chicago

Mark, Joshua J.. "Mur d'Hadrien." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le novembre 15, 2012. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-11580/mur-dhadrien/.

Style MLA

Mark, Joshua J.. "Mur d'Hadrien." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 15 nov. 2012. Web. 27 avril 2024.

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