Droit Romain

Définition

Mark Cartwright
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 24 novembre 2013
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Disponible dans ces autres langues: anglais, italien, portugais, espagnol, Turc
Basilica, Pompeii (by Mary Harrsch, CC BY-SA)
Basilique de Pompéi
Mary Harrsch (CC BY-SA)

Le droit romain couvrait toutes les facettes de la vie quotidienne: le crime et la punition, la propriété foncière et immobilière, le commerce, les industries maritimes et agricoles, la citoyenneté, la sexualité et la prostitution, l'esclavage et la manumission, la politique, la responsabilité et les dommages aux biens, et la préservation de la paix. Nous pouvons étudier ces lois aujourd'hui grâce aux textes juridiques anciens, à la littérature, aux papyrus, aux tablettes de cire et aux inscriptions.

Le droit romain fut établi par divers moyens, par exemple par des statuts, des décisions du magistère, des édits de l'empereur, des décrets sénatoriaux, des votes de l'assemblée, des plébiscites et les délibérations d'experts juridiques. Il devint ainsi suffisamment polyvalent et flexible pour s'adapter aux circonstances changeantes du monde romain, de la politique républicaine à la politique impériale, du commerce local au commerce national, et de la politique étatique à la politique interétatique.

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Les sources historiques

L'une des sources les plus importantes sur le droit romain est le Corpus Iuris Civilis, compilé sous les auspices de Justinien Ier et couvrant, comme son nom l'indique, le droit civil. L'un de ses quatre livres, l'imposant Digeste, couvre tous les aspects du droit public et privé. Le Digeste fut produit en 533 de notre ère sous la supervision de Tribonien et constitue une synthèse d'environ 2000 volumes juridiques distincts. Ces sources originales furent écrites par d'éminents juristes ou experts juridiques tels que Gaius, Ulpien et Paul et font du Digeste l'un des textes les plus riches de l'Antiquité, car on y trouve un trésor d'informations historiques accessoires utilisées pour illustrer les différents points de droit, allant de l'espérance de vie aux chiffres des impôts.

Parmi les autres recueils de lois, citons le Codex Gregorianus (publié vers 292 de notre ère) et le Codex Hermogenianus (publié en 295 de notre ère), tous deux nommés d'après des juristes éminents du règne de Dioclétien et comprenant collectivement plus de 2 500 textes. Il y a aussi le Code Théodosien, une collection de plus de 2 700 lois compilées dans les années 430 de notre ère et complétées au cours des années suivantes et, enfin, le Codex Iustinianus (528-534 de notre ère) qui résume et étend les codes plus anciens.

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Il existe également des types spécifiques de documents juridiques qui ont survécu à l'Antiquité, tels que les documents du negotia qui révèlent des transactions commerciales de toutes sortes, depuis les loyers et les contrats de location jusqu'aux contrats décrivant le transfert de propriété. Les inscriptions, elles aussi, peuvent révéler les lois et leurs implications. Placées sur des monuments publics, elles annonçaient de nouvelles lois ou remerciaient ceux qui avaient aidé la partie concernée après une victoire au tribunal.

Les sources du droit

Une des caractéristiques du droit romain était l'attention particulière accordée à la précision du langage.

Le droit romain était cumulatif par nature, c'est-à-dire qu'une nouvelle loi pouvait être ajoutée au corpus juridique ou remplacer une loi précédente. Les lois (leges), les plébiscites, les décrets sénatoriaux (decreta), les affaires jugées (res iudicatae), la coutume, les édits (senatusconsulta) de l'empereur, des magistrats ou d'autres fonctionnaires supérieurs tels que les préteurs et les édiles pouvaient tous être des sources de droit romain.

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Selon la tradition, la première source de droit romain était les Douze Tables, qui ne survivent que sous forme de citations dans des sources ultérieures. Suite à une initiative visant à rassembler en un seul endroit les lois civiles (ius civile) du début de la République et à mettre fin à la domination exclusive de la classe sacerdotale et patricienne en matière de droit, un code de droit régissant les relations entre les citoyens fut compilé, distinct du droit sacré (ius sacrum). Ce document était en fait un recueil de sentences concernant les droits des citoyens uniquement, toutes les autres parties relevant de la juridiction du chef de famille masculin (pater familias), qui disposait d'une liberté considérable dans le traitement des personnes dont il avait la charge, qu'elles aient été libres ou non.

Les Douze Tables devinrent d'une utilité limitée lorsque des problèmes juridiques qu'elles ne couvraient pas se présentèrent, par exemple, lorsque l'activité commerciale se développa, il devint nécessaire de fournir une couverture juridique des transactions et des accords commerciaux entre citoyens et non-citoyens et d'avoir des lois qui prenaient en compte le comportement et l'intention des parties impliquées. Ces relations devinrent l'objet de contrats et de dispositions telles que la stipulatio et, à partir de 242 avant J.-C., les litiges étaient présidés par un magistrat spécial (praetor peregrinus) spécifiquement chargé des litiges juridiques impliquant des étrangers et des relations entre Rome et les États étrangers, c'est-à-dire du droit international (ius gentium).

Roman Politicians
Hommes politiques romains
The Creative Assembly (Copyright)

Sous la République, l'accent était mis sur l'adaptation des lois existantes par les magistrats (ius honorarium) plutôt que sur la création d'une législation entièrement nouvelle. Cela se faisait en particulier dans l'édit annuel du préteur (codifié à partir de l'an 131 de notre ère), où les types de cas autorisés, les moyens de défense et les exceptions étaient décrits et où une évaluation était faite de la politique juridique de l'année précédente, en apportant les modifications juridiques nécessaires en conséquence. De cette façon, l'application des lois pouvait être adaptée alors que la loi elle-même restait inchangée. Ainsi, une série de formules de cas s'accumula pour donner une plus grande couverture juridique à la situation en constante évolution de la société romaine. Par exemple, la valeur d'une amende pouvait être augmentée afin de suivre le rythme de l'inflation, mais le principe juridique d'une amende pour une infraction particulière restait inchangé. De même, d'autres fonctionnaires, comme les gouverneurs et les tribunaux militaires, pouvaient "interpréter" la loi et l'appliquer au cas par cas, en fonction des circonstances particulières.

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À l'époque impériale, l'empereur jouait un rôle actif dans les affaires juridiques, notamment en réponse à des pétitions privées (libelli), mais il agissait généralement sur l'avis des personnes les plus qualifiées pour juger des questions juridiques, à savoir les juristes (voir ci-dessous). L'exemple le plus célèbre d'un empereur créant une nouvelle loi est sans doute l'édit de Caracalla de 212 de notre ère, qui accordait la citoyenneté romaine à tous les habitants libres de l'empire. L'empereur faisait également office de juge en cas de conflit entre le droit romain et le droit local des provinces qui était généralement conservé intact et, du moins en théorie, le problème futt éliminé par l'édit de Caracalla. Dans la pratique, les lois locales survécurent en tant que coutumes et ne furent généralement pas annulées, sauf si elles heurtaient les sensibilités romaines, par exemple celles concernant l'inceste et la polygamie.

À partir du règne d'Hadrien, les jugements et les déclarations de l'empereur se rassemblèrent dans les constitutions de l'empereur ou constitutiones princips. En outre, le Sénat pouvait également émettre des dispositions réglementaires (senatus consulta), par exemple concernant les jeux publics ou les droits de succession des femmes. Le droit législatif établi par le peuple par le biais d'assemblées publiques (comitia), bien que rare, pouvait également contribuer au corpus juridique mais était généralement limité aux questions cérémonielles telles que la décision sur les honneurs posthumes à accorder aux enfants des empereurs morts prématurément.

The Curia
La Curie
Chris Ludwig (Copyright)

Sous le règne de Constantin Ier, les déclarations impériales étaient souvent faites par l'intermédiaire du questeur de l'empereur et le langage utilisé devenait de moins en moins technique, un argument souvent cité comme le début de la "vulgarisation" du droit romain. Cependant, en réalité, les écoles de droit se multiplièrent et les experts juridiques étaient toujours disponibles, tant pour le questeur que pour le public, afin de délibérer sur les points de droit les plus fins laissés ambigus par cette nouvelle approche moins technique de la formulation de la législation.

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Un élément important du droit romain était constitué par les juristes (iurisprudentes), des experts juridiques qui soumettaient les lois, règles et institutions écrites à un examen intellectuel et à une discussion afin d'en extraire les principes juridiques fondamentaux qu'elles contenaient, puis appliquaient et testaient ces principes sur des cas spécifiques hypothétiques afin de les appliquer ensuite à la nouvelle législation. Les juristes constituaient une élite puisqu'ils étaient probablement moins de 20 à un moment donné et leur qualification pour ce rôle était leur connaissance approfondie du droit et de son histoire. À l'époque impériale, ils étaient intégrés à la bureaucratie générale qui servait l'empereur. Les juristes avaient également une sorte de monopole sur les connaissances juridiques, car il n'était pas possible d'étudier le droit dans le cadre du programme éducatif habituel avant le milieu du IIe siècle de notre ère. Les juristes écrivirent également des traités juridiques, dont l'un des plus influents est le DeIure Civili de Q. Mucius Scaevola au 1er siècle avant Jésus-Christ.

Bien que les juristes aient souvent été issus des échelons supérieurs de la société et qu'ils s'intéressaient, peut-être inévitablement, aux questions les plus pertinentes pour cette élite, ils se préoccupaient également de deux principes sociaux fondamentaux dans leurs délibérations : l'équité (aequitas) et l'aspect pratique (utilitas). En outre, en raison de leur monopole intellectuel, les juristes étaient beaucoup plus indépendants de la politique et de la religion que ce n'était généralement le cas dans les sociétés anciennes. À partir du IIIe siècle de notre ère, cependant, le système des juristes fut remplacé par une intervention plus directe des gouvernants, notamment de l'empereur lui-même. Peu à peu, le nombre d'experts juridiques proliféra et les juristes en vinrent à ressembler davantage aux avocats modernes, consultés par quiconque avait besoin de conseils juridiques. Contrairement aux avocats modernes, cependant, et du moins en principe, ils offraient leurs services gratuitement.

Le défendeur et le plaignant devaient se représenter eux-mêmes à l'audience, car il n'existait pas de système de représentation légale.

Aspects pratiques

Dans la pratique, les litiges étaient très souvent évités par la prestation de serment ou insiurandum des parties mais, à défaut d'un tel accord, une procédure judiciaire suivait, le plaignant convoquant le défendeur au tribunal (affaires civiles : iudicia publica ou pour les affaires de droit pénal : quaestiones). La première étape de la plupart des affaires juridiques consistait en la comparution des parties concernées devant un magistrat qui déterminait le problème juridique en question et rejetait l'affaire pour cause d'intervention juridique (denegatio actiomis) ou désignait un fonctionnaire (iudex datus) pour entendre et juger l'affaire. Lorsque les deux parties acceptaient l'évaluation du magistrat, l'affaire était entendue par l'iudex, qui prenait une décision au nom de l'État. Le défendeur et le plaignant devaient se représenter eux-mêmes à l'audience car il n'existait pas de système de représentation légale. Si le défendeur perdait un procès civil, il y avait une condemnatio et il devait payer une somme d'argent (litis aestimatio), généralement décidée par l'iudex, qui pouvait couvrir la valeur originale des biens ou les dommages subis par le demandeur.

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Cicero Denounces Catiline
Cicéron condamne Catilina
Cesare Macari (Public Domain)

Les sanctions pour les crimes étaient conçues comme des mesures dissuasives plutôt que correctives et pouvaient inclure des amendes (multae), la prison, la fustigation, la confiscation des biens, la perte de la citoyenneté, l'exil, le travail forcé ou la peine de mort (poena capitis). Les peines pouvaient également varier en fonction du statut du défendeur, à savoir s'il s'agissait d'un homme, d'une femme ou d'un esclave. Comme on pouvait s'y attendre, les hommes d'un statut social élevé recevaient généralement des peines plus clémentes. La sévérité de la peine pouvait également dépendre de facteurs tels que la préméditation, la provocation, la fréquence et l'influence de l'alcool.

Dans de nombreux cas, notamment au civil, si un défendeur décédait avant la fin de la procédure, son héritier pouvait être tenu de prendre sa place. Sous la république, il n'y avait pas de véritable moyen d'appel en droit romain, mais à l'époque impériale, les parties mécontentes pouvaient faire appel à l'empereur ou à un haut fonctionnaire et la décision initiale pouvait être annulée ou renversée. Cependant, tout appel non motivé pouvait être sanctionné.

Conclusion

L'un des plus grands avantages du droit romain et de ses systèmes juridiques est peut-être qu'au fur et à mesure que l'empire s'étendait et que les populations se diversifiaient, le droit et la protection des citoyens agissaient comme une force contraignante sur les communautés et favorisaient l'attente que les droits des citoyens (et même, avec le temps, ceux des non-citoyens) soient défendus et qu'un système soit mis en place pour redresser les torts. En outre, les Romains nous ont transmis non seulement de nombreux termes juridiques encore utilisés aujourd'hui dans le domaine du droit et des sciences juridiques, mais aussi leur passion et leur expertise pour une terminologie juridique précise et exacte afin d'éviter toute ambiguïté ou même toute mauvaise interprétation de la loi, une approche que tous les documents juridiques modernes tentent d'imiter.

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Questions & Réponses

Quel est le concept de droit romain ?

Le concept du droit romain était que tous les citoyens sont protégés par des lois écrites qui couvrent tous les crimes et tous les aspects de la vie quotidienne. Ce corpus de lois écrites s'enrichissait constamment de nouvelles décisions des tribunaux, de statuts, de plébiscites, de décrets sénatoriaux, de coutumes et d'édits de l'empereur, de magistrats ou d'autres hauts fonctionnaires.

Qui faisait les lois romaines ?

Les lois romaines étaient élaborées par une variété d'individus et de groupes dans un système qui permettait à la loi de refléter les changements de la société. Les décisions des tribunaux, des magistrats et des experts juridiques pouvaient modifier les lois. Les décrets du Sénat romain et de l'empereur pouvaient être transformés en lois. Les votes de l'assemblée populaire et des plébiscites pouvaient également se traduire par de nouvelles lois.

Quel est l'héritage du droit romain ?

L'héritage du droit romain est un désir de créer des lois formulées avec précision qui couvrent tous les aspects de la vie d'un citoyen au sein de l'État. Le droit romain a fait naître chez les citoyens l'espoir que leurs droits seraient protégés et qu'il existait un système permettant de redresser les torts.

Bibliographie

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Mark Cartwright
Mark est un auteur, chercheur, historien et éditeur à plein temps. Il s'intéresse particulièrement à l'art, à l'architecture et à la découverte des idées que toutes les civilisations peuvent nous offrir. Il est titulaire d'un Master en Philosophie politique et est le Directeur de Publication de WHE.

Citer cette ressource

Style APA

Cartwright, M. (2013, novembre 24). Droit Romain [Roman Law]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-10987/droit-romain/

Style Chicago

Cartwright, Mark. "Droit Romain." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le novembre 24, 2013. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-10987/droit-romain/.

Style MLA

Cartwright, Mark. "Droit Romain." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 24 nov. 2013. Web. 22 avril 2024.

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