Femmes Royales de l'Empire Moghol

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Article

Patit Paban Mishra
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 31 octobre 2022
Disponible dans ces autres langues: anglais, espagnol
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Les empereurs moghols ne sont pas les seuls à avoir laissé une trace indélébile dans l'histoire du sous-continent indien, mais aussi les reines et les princesses. Les contributions de ces dernières à l'art, l'architecture, la littérature, la cuisine, le raffinement et les institutions administratives ont été remarquables. L'impact de ces femmes se fait encore sentir aujourd'hui dans la vie des habitants de l'Inde, du Bangladesh et du Pakistan.

Mumtaz Mahal
Mumtaz Mahal
Unknown Artist (Public Domain)

L'empire moghol

La dynastie moghole, établie par Zahiruddin Mohammad Babur (r. de 1526 à 1530), se poursuivit avec toute sa splendeur et sa gloire jusqu'à Aurangzeb (1618-1707). Un déclin commença après le règne des Grands Moghols. Celui-ci vit la désintégration de l'Empire moghol, et le dernier empereur, Bahadur Shah Zafar (r. de 1837 à 1857), n'était souverain que de nom. La victoire de Babur contre le dernier souverain de la dynastie chancelante des Lodi, le 21 avril 1526, lors de la première bataille de Panipat, changea le cours de l'histoire indienne.

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Une culture composite se développa grâce à l'amalgame de l'ancien et du nouveau. Les dames aristocratiques mogholes ne menaient pas une vie isolée dans les murs cloîtrés du harem. Elles jouaient un rôle précis dans les différentes facettes de la vie sociale et politique. À commencer par Aisan Daulat Begum, petite-fille maternelle de Babur, les dames mogholes telles que l'auteur de Humayun Nama Gulbadan Banu Begum (fille de Babur et sœur de Humayun), Maham Anaga (mère adoptive d'Akbar), Mah Chuchak Begum (belle-mère d'Akbar), Nur Jahan (reine de Jahangir), Mumtaz Mahal (reine de Shah Jahan), Jahanara Begum ainsi que Roshanara Begum (fille de Shah Jahan) ont influencé la politique, la culture et la société de l'époque.

Les femmes royales mogholes étaient activement engagées dans la politique du harem et de la cour.

À l'heure où le port du hijab par les femmes musulmanes en Inde fait l'objet d'un débat passionné englobant des polémiques idéologiques et religieuses, il est intéressant de revenir sur le passé concernant le statut des femmes musulmanes dans l'Inde moghole. Le présent est entrelacé avec le passé, les deux se complétant mutuellement. Dans l'Inde contemporaine, une partie de la société impose un code vestimentaire strict aux femmes musulmanes. En le juxtaposant au statut des femmes musulmanes environ 400 ans plus tôt, les lecteurs obtiendraient une vision contrastée. Il serait intéressant de connaître les activités des reines et princesses mogholes. Étaient-elles indépendantes dans leur processus de pensée ? Quelle était leur contribution à la société de l'époque ? Partageaient-elles le pouvoir au sein de l'administration moghole ? Y avait-il une émancipation des femmes dans l'Inde médiévale ?

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Mughal India c. 1707
Inde moghole vers 1707
Simeon Netchev (CC BY-NC-ND)

Le statut des femmes

Les femmes royales mogholes ont joué un rôle important dans la consolidation et le maintien de la stature de l'Empire moghol en Asie du Sud. Leurs contributions dans les sphères politique, économique, culturelle et religieuse ont permis de renforcer l'Empire, en plus de la prospérité des souverains. Alors que les hommes célèbres de la famille royale moghole bénéficient de l'attention et de l'appréciation, la vie, les activités, les réalisations et les contributions des femmes royales mogholes ont rarement reçu l'attention nécessaire de la part des chercheurs. Leur rôle en politique était remarquable, car elles étaient activement engagées dans la politique du harem et de la cour. Leurs idées ont eu un impact considérable sur les dirigeants, et nombre d'entre elles ont même dirigé l'Empire dans les coulisses, et ce, au nom des dirigeants.

Les dames royales comprenaient souvent leur pouvoir et constituaient de formidables groupes de pression.

Outre ces femmes royales, l'espace du zenana (les quartiers des femmes d'une maison) a également été négligé par les chercheurs. À sa place, le harem a été dépeint comme un lieu d'indulgence uniquement sensuelle, où des milliers de femmes nubiles étaient retenues captives et menaient une vie cloîtrée d'objets sexuels dans une atmosphère de jalousie et de frustration. Les conspirations autour de la succession au trône étaient monnaie courante. Cependant, la vérité est un peu plus complexe et étonnamment différente.

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Le quartier des femmes était un espace multiculturel, pas seulement pour les épouses des souverains. Il était destiné aux parents cherchant asile dans d'autres royaumes, aux veuves de généraux importants, aux servantes portugaises et anglaises, aux femmes soldats faisant office de gardes, aux parents non mariés, aux grands-mères et tantes respectées, aux princesses Rajput et à leurs enfants, aux préposés et aux commerçantes de toutes sortes. Les femmes les plus haut placées de l'ère moghole menaient une vie très sophistiquée faite de luxe, d'esthétique et de pouvoir consultatif spécifique. Certaines femmes nobles de la maison impériale sont décrites comme aussi puissantes que leurs époux, jouant parfois des rôles plus décisifs dans le gouvernement et agissant en tant que mécènes des arts, des sciences et de la littérature. Ces dames royales avaient souvent conscience de leur pouvoir et constituaient de formidables groupes de pression.

Mughal Coin of Nur Jahan
Pièce moghole de Nur Jahan
Drnsreedhar1959 (CC BY-SA)

Les récits persans contemporains décrivent principalement les histoires de la cour qui relatent les activités les plus marquantes de la vie des empereurs. Bien que ces documents mentionnent les femmes royales dans des contextes spécifiques comme faisant partie du récit le plus significatif, les descriptions distinctes et détaillées de leurs vies sont absentes. Si les mémoires de Babar et de Jahangir mentionnent les femmes royales qui leur sont apparentées, il reste à trouver des détails sur ces dames.

Vous trouverez ci-dessous de courtes biographies de quatre femmes royales mogholes importantes. Il s'agit de :

  • Nur Jahan (vers 1577-1645)
  • Mumtaz Mahal (1593-1631)
  • Bégum Jahanara (1614-81)
  • Bégum Roshanara (1617-71)

Nur Jahan

La femme la plus influente à l'époque de l'empereur moghol Jahangir (r. de 1605 à 1627), Mehrunnissa, vit le jour à Kandahar de l'immigrant perse Mirza Ghiyas Baig (Itmatuddaulah) et d'Asmat Begum. En 1607, elle travailla dans le harem après la mort de son mari, Quli Khan. Jahangir la rencontra pour la première fois en 1611 et s'en éprit. Baptisée Nur Mahal ou "Lumière du palais" après son mariage avec l'empereur, elle reçut cinq ans plus tard le titre de Nur Jahan ("Lumière du monde").

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Portrait of Nur Jahan
Portrait de Nur Jahan
LACMA (Public Domain)

La reine Nur Jahan, dame intelligente et élégante, devint très active dans la politique de la cour, exerçant le pouvoir par le biais de sa clique, connue sous le nom de junte Nur Jahan. Son nom était inscrit sur les pièces de monnaie et Nur Jahan donnait parfois des audiences dans son palais. Excellente tireuse et chasseuse d'animaux sauvages, Nur Jahan s'adonnait aux intrigues politiques. Elle contribua à faire de son père et de son frère Asaf Khan des hauts fonctionnaires de la cour. Ladli Begum, sa fille issue de son premier mariage, fut mariée au fils de Jahangir, Shahryar, qui devint le candidat de Nur Jahan au trône moghol. Le prince Khurram, le futur Shah Jahan (r.de 1627 à 1658), se rebella contre Jahangir, mais il fut refoulé.

Les historiens modernes ont mis en doute la crédibilité de la junte de Nur Jahan. Jahangir était actif et ne négligeait pas les affaires de l'État. Une grande partie du parti pris contre la reine était la posture anti-féministe des historiens contemporains. Nur Jahana passa ses derniers jours à superviser le mausolée de son père à Agra. Dame cultivée, elle était une créatrice de tendances en matière de vêtements, de cosmétiques et de parfums de la zenana moghole.

Mumtaz Mahal

Épouse de l'empereur Shah Jahan (r. de 1628 à 1658), Mumtaz Mahal (alias Mumtaz-i-Mahal), fut immortalisée en raison de l'amour profond qu'elle portait à son mari et fut la source d'inspiration du Taj Mahal. Connue auparavant sous le nom d'Arjumand Banu Begum, elle vit le jour en avril 1593 à Agra au sein d'une famille perse très connectée et bien placée. Son père, Asaf Khan (mort en 1641), était le Mir Bakshi (ministre de la guerre), et son grand-père Itimaduddaula était le Wazir (ministre des revenus) de l'administration moghole. En outre, la sœur d'Asaf Khan était la célèbre Nur Jahan (1577-1645). Dame d'une beauté et d'une grâce exceptionnelles, de nombreuses légendes avaient été tissées autour d'Arjumand. Le prince Khurram, le futur Shah Jahan, tomba sous son charme dans le Meena Bazar (une sorte de marché pour les dames des Moghols) en 1607. Arjumand tenait une boutique de perles de verre et de soie. Ce fut le coup de foudre et ils se sont marièrent cinq ans plus tard, comme le voulait à un mariage royal. Elle reçut un maximum d'amour, de soins, d'affection et de passion parmi les épouses de Shah Jahan, qui la para du titre de Mumtaz Mahal Begum ("Ornement bien-aimé du palais"). Le couple partagea un lien intime qui dura toute une vie.

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Taj Mahal
Taj Mahal
Dennis Jarvis (CC BY-SA)

Mumtaz Mahal n'était pas comme les autres reines de l'époque médiévale et du début de l'ère moderne, vivant simplement une vie de luxe ou se livrant à des intrigues de cour. Elle accompagna souvent Shah Jahan dans ses campagnes militaires. Mumtaz était un pilier de soutien pour l'empereur dans les moments de tribulation grâce à ses soins, son confort et ses conseils. Elle était l'épouse préférée alors que des reines comme Akbarabadi Mahal (m. 1677), Kandahari Mahal (m. 1594), Hasina Begum Sahiba (m. 1617), Manbhavathi Sahiba (m. 1626) et d'autres avaient toutes une relation superficielle avec Shah Jahan. Il avait tellement confiance en Mumtaz Mahal qu'il lui donna le Muhr Uzah (sceau impérial). Le couple eut sept enfants survivants sur quatorze, dont beaucoup laissèrent leur empreinte dans l'histoire moghole. Jahanara Begum (1614-1681), une dame douée et cultivée, était la Padishah Begum, l'impératrice des princesses, qui s'occupait de Shah Jahan emprisonné. Le fils aîné, Dara Shikoh (1615-1659), était le favori de l'empereur et un érudit de renom. Mumtaz ne survécut pas à la sanglante guerre de succession entre ses fils : Dara (1615-1659), Shuja (1616-1660), Aurangzeb (1618-1707) et Murad (1624-1661). Mumtaz avait, au moins, pris soin de l'éducation de ses enfants. Sa secrétaire, Sati-un Nissa, donnait des cours particuliers aux frères et sœurs royaux. Dame pieuse et aimable, Mumtaz aidait les femmes nécessiteuses et démunies.

Alors qu'elle accompagnait l'empereur dans une campagne militaire, Mumtaz, enceinte, mourut le 17 juin 1631, après avoir mis au monde le quatorzième enfant de la famille, Gauhara Begum (1631-1706). L'histoire raconte que son dernier vœu fut d'ériger un monument symbolisant le véritable amour. Pris de remords, Shah Jahan tint sa promesse et ordonna la construction du magnifique Taj Mahal. Six mois plus tard, le corps de la reine fut exhumé du jardin Zainabadi, à Burhanpur, où il fut enterré temporairement. Le Taj devint finalement son mausolée. Le tombeau, symbole de l'amour éternel, est l'une des "sept merveilles" du monde moderne et une incontournable destination touristique.

Jahanara Begum
Jahanara Begum
Unknown Artist (Public Domain)

Jahanara Begum

Jahanara Begum était la deuxième et l'aînée des enfants vivants de l'empereur Shah Jahan et de Mumtaz Mahal. Après la mort malheureuse de Mumtaz en 1631, Jahanara, âgée de 17 ans, fut affectée au sceau royal et reçut le titre de Padshah Begum (première dame) de l'Empire moghol. Cependant, son père avait trois autres épouses. Fille préférée de Shah Jahan, elle exerça une grande influence politique sous le règne de son père et était souvent considérée comme "la femme la plus puissante de l'empire" à cette époque. Elle soutint fortement son frère, Dara Shikoh, en tant que successeur de son père. Elle se rangea du côté de l'héritier présomptif Dara pendant la guerre de succession qui suivit la maladie de Shah Jahan en 1657. Elle finit par rejoindre son père au fort d'Agra, où celui-ci avait été placé en résidence surveillée par Aurangzeb. Fille dévouée, elle s'occupa de Shah Jahan jusqu'à sa mort en 1666. Plus tard, elle se réconcilia avec Aurangzeb qui lui conféra le titre d'"impératrice des princesses" et remplaça sa jeune sœur, Roshanara Begum, en tant que première dame. Elle se réengagea dans la politique, fut influente dans plusieurs affaires cruciales et bénéficia de certains privilèges spéciaux dont les autres femmes royales ne peuvent bénéficier. Jahanara mourut sous le règne d'Aurangzeb sans s'être jamais mariée.

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Tomb of Roshanara Begum
Tombe de Roshanara Begum
Prayash Giria (CC BY-SA)

Roshanara Begum

Troisième fille de l'empereur Shah Jahan et de son épouse, Mumtaz Mahal, Roshanara Begum était une princesse brillante et une poétesse de talent. Elle soutint son jeune frère, Aurangzeb, dans la guerre de succession après la maladie de Shah Jahan en 1657. Roshanara avait une rivalité fraternelle avec Jahanara, qui n'appréciait pas l'influence de cette dernière sur Shah Jahan. Lorsqu'Aurangzeb devint empereur en 1658, elle reçut le titre de Padshah Begum et devint la "première dame de l'empire moghol".

Un domaine captivant mais négligé reçoit aujourd'hui l'attention qu'il mérite. Un nouveau regard est désormais jeté sur les dames royales mogholes et leur engagement social et culturel avec le monde extérieur. Ces femmes royales n'ont pas fait l'objet d'une attention particulière dans l'histoire pendant une longue période, mais des recherches récentes les ont placées dans le courant dominant de l'étude de l'histoire moghole et médiévale de l'Asie du Sud. Leur rôle dans les décisions politiques et financières est désormais reconnu.

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Bibliographie

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Patit Paban Mishra
Patit Paban Mishra, Professor of History (Retired) at Sambalpur University, India, and the Northern University of Malaysia, specializes in World History with particular reference to South Asian and South-East Asian History.

Citer cette ressource

Style APA

Mishra, P. P. (2022, octobre 31). Femmes Royales de l'Empire Moghol [Royal Women in the Mughal Empire]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-2098/femmes-royales-de-lempire-moghol/

Style Chicago

Mishra, Patit Paban. "Femmes Royales de l'Empire Moghol." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le octobre 31, 2022. https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-2098/femmes-royales-de-lempire-moghol/.

Style MLA

Mishra, Patit Paban. "Femmes Royales de l'Empire Moghol." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 31 oct. 2022. Web. 13 déc. 2024.

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