Les Arts Martiaux du Japon Médiéval

Article

Mark Cartwright
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 20 août 2019
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Disponible dans ces autres langues: anglais

Il existait 18 arts martiaux (bugei ou bujutsu) dans le Japon médiéval, parmi lesquels l'utilisation d'armes, les techniques d'autodéfense sans arme, la natation et les compétences équestres. Conçus à l'origine pour affiner les compétences des guerriers afin qu'ils puissent mieux réussir sur le champ de bataille, nombre de ces arts ont ensuite été pratiqués par les civils afin de favoriser la discipline, l'agilité et la vivacité d'esprit. Beaucoup de ces arts restent populaires aujourd'hui, notamment le judo, le kendo, le karaté et l'aïkido.

Japanese Kyudo Archer
Archer Kyūdō japonais
Unknown Artist (Public Domain)

Origines et développements

Plusieurs des arts martiaux qui devinrent populaires dans le Japon médiéval furent importés de Chine où, selon la tradition, ils commencèrent comme un moyen pour les moines bouddhistes de s'assurer qu'ils étaient assez en forme pour rester assis en méditation pendant des heures et comme une méthode pour aider leur concentration. Au fil du temps, ces exercices commencèrent à intégrer des compétences en matière d'armes et se répandirent au Japon. Le kendo, par exemple, qui mettait l'accent sur l'habileté au sabre, fut probablement introduit dans ce pays au 7e siècle. Néanmoins, les Japonais ajoutèrent leurs propres armes, compétences et aspects psychologiques à ces arts martiaux pour répondre à leurs besoins militaires et à leur approche philosophique. À partir du 10e siècle et tout au long de la période médiévale (c. 1185-1603), les guerriers, en particulier les samouraïs, s'exercèrent au maniement des armes et à l'équitation afin de se préparer à relever les défis des trop fréquentes guerres qui ravagèrent le pays lors de luttes des seigneurs de la guerre rivaux pour la suprématie.

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L'ARME PRINCIPALE DES GUERRIERS SAMOURAÏS DU JAPON fut, PENDANT UNE GRANDE PARTIE DE LEUR HISTOIRE, L'ARC.

Ce n'est toutefois qu'à l'époque d'Edo (1603-1868) que ces activités d'entraînement devinrent officiellement connues sous le nom d'arts martiaux que nous connaissons mieux aujourd'hui, c'est-à-dire des activités de temps de paix conçues pour promouvoir non seulement les compétences martiales mais aussi la discipline et une approche philosophique et spirituelle de la vie en général. Au Japon, le dieu guerrier du tonnerre, Takemikazuchi, est considéré comme le patron des arts martiaux et de nombreuses salles d'entraînement (dojo) ont encore aujourd'hui un petit sanctuaire qui lui est dédié.

Les 18 arts martiaux classiques

Les guerriers médiévaux se spécialisaient souvent dans quelques arts martiaux seulement, et les clubs d'entraînement se concentraient généralement sur certaines catégories telles que l'escrime, l'équitation ou le combat à mains nues. Il existait 18 arts martiaux classiques dans le Japon médiéval. Connus sous le nom de bugei jûhappan, ils étaient les suivants:

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  • le tir à l'arc (kyūdō/kyūjutsu)
  • le maniement du bâton à ardillons (mojiri)
  • le lancer de faucille enchaînée (kusarigamajutsu)
  • le lancer de couteaux (shurikenjutsu)
  • escrime et maniement des armes (kendo/kenjutsu)
  • maniement des armes à feu (teppô)
  • équitation (bajutsu)
  • cracher des aiguilles (fukumibarijutsu)
  • maniement d'une arme d'hast (naginatajutsu)
  • maîtrise de la corde (torite)
  • maniement du sabre court (tantõ)
  • espionnage (ninjutsu)
  • maniement du bâton (bōjutsu)
  • maniement de la lance (sōjutsu)
  • natation (suieiijutsu)
  • dégainer le sabre (iaijutsu)
  • maîtrise de la matraque (jitte)
  • yawara (judo/jujitsu)

Samurai on Horseback
Un samouraï à cheval
Unknown Artist (Public Domain)

Les principaux arts martiaux

Tir à l'arc

L'arme principale des guerriers samouraïs du Japon fut, pendant une grande partie de leur histoire, l'arc, et l'habileté avec cette arme était pratiquée dans l'art martial du kyūdō ou kyūjutsu ("la voie de l'arc"). Depuis au moins le 6e siècle, il existe deux types distincts de tir à l'arc. Le premier était un événement civil formel où le style et la technique d'un archer debout étaient jugés plus importants que le fait d'atteindre la cible. L'archer dirigeait d'abord sa flèche vers le ciel, puis vers la terre pour symboliser l'unité entre ces deux éléments, puis, à cheval, il visait un groupe de trois cibles circulaires. Chaque cible était distante d'environ 60 mètres et l'archer devait atteindre l'un de leurs cinq cercles concentriques en suivant une piste circulaire avec son cheval. Les archers ayant réussi à atteindre les trois cibles passaient au tour suivant où ils devaient atteindre trois cibles d'argile beaucoup plus petites. Le vainqueur de la compétition était l'archer qui avait touché le plus près du centre des cibles, selon la décision d'un juge. Cette forme de tir à l'arc est connue sous le nom de Yabusame et bien que remontant au 11e siècle elle est encore très populaire au Japon aujourd'hui.

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Le deuxième type de tir à l'arc, beaucoup plus utile sur le plan martial, consistait à tirer rapidement sur des cibles tout en chevauchant un cheval. Les archers s'entraînaient également à simuler des batailles et il est même arrivé que de réelles batailles aient été réglées par deux archers montés qui se chargeaient l'un l'autre à plusieurs reprises pour déterminer qui serait le vainqueur.

COMME POUR LES ARTS MARTIAUX NON ARMÉS, LES TECHNIQUES D'ÉPÉE METTaiENT L'ACCENT SUR LA DÉFENSE PLUTÔT QUE SUR L'ATTAQUE.

Les arcs mesuraient de 1,5 à 2,5 mètres ou de 5 à 8 pieds de long et étaient généralement fabriqués en bois et en bambou laminé, souvent protégés par une laque. Les flèches en bambou variaient en longueur mais étaient généralement mesurées en unités de poing fermé, une flèche standard ayant une longueur de 12 poings, ce qui équivaut à 86-96 cm (34-38 pouces). Les flèches étaient munies de trois ou quatre plumes pour augmenter leur stabilité en vol. L'arc était concurrencé par l'épée en tant qu'arme principale des guerriers à l'époque médiévale, mais c'est l'introduction des armes à feu à la fin du 16e siècle qui entraîna son déclin définitif sur le champ de bataille.

Lances

La lance (yari) était une autre arme traditionnelle clé de la guerre au Japon. Conçue non pas pour être lancée mais pour être enfoncée, son maniement était pratiqué dans l'art du sōjutsu. La plupart des lances étaient dotées d'une lame à double tranchant mesurant de 30 à 75 cm (12-29 pouces) de long. Un type courant avait une lame en forme de L conçue pour aider à accrocher un cavalier ennemi à son cheval. De même, la perche à lame unique (naginata) était une arme de base de l'infanterie, mais elle n'eut pas son art martial spécifique avant le 17e siècle. Ce dernier art était l'un des rares à être pratiqué à la fois par les hommes et les femmes, ces dernières étant généralement des filles de samouraïs.

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Samurai Swords
Épées de samouraï
Los Angeles County Museum of Art (Public Domain)

Épées

Le sabre (nihonto) a toujours eu une signification particulière au Japon, car il s'agit d'une arme utilisée par les dieux dans l'histoire de la création shintoïste, et c'est l'un des trois objets de l'ancien costume royal japonais. L'art du sabre était pratiqué dans le cadre du kendo ("la voie du sabre"), qui utilisait à l'origine de vrais sabres, mais ceux-ci furent ensuite remplacés par des armes moins meurtrières munies de lames de bambou (shinai). Le sabre traditionnel japonais long et incurvé (katana) mesurait environ 60 cm (2 ft) de long et possédait une lame d'acier solide avec un seul tranchant super aiguisé. Il était tenu à deux mains et l'art martial était conçu pour parfaire les réflexes et la vivacité d'esprit qui seraient indispensables sur le champ de bataille. L'épée remplacera l'arc et deviendra l'arme principale des guerriers samouraïs d'élite à partir de la période Kamakura (1185-1333). Dégainer le sabre de manière efficace était une compétence en soi (iaijutsu) et l'objectif dans la guerre réelle était de trancher son adversaire en un seul mouvement, avec grâce et rapidité. Comme pour les arts martiaux non armés, les techniques d'épée étaient axées sur la défense plutôt que sur l'attaque.

Chevaux

L'équitation ou bajutsu était une compétence clé de la guerre japonaise à partir du Ve siècle. Les chevaux japonais, qui provenaient pour la plupart du nord-est sauvage du Japon, avaient tendance à être courts sur pattes mais robustes. Les étalons étaient préférés mais pouvaient être capricieux et difficiles à manier. Le contrôle du cavalier était facilité par des rênes, un mors, une bride et une selle en bois (kura) munie d'étriers en forme de coupe, ce qui permettait au cavalier de tirer à l'arc en position debout et rendait beaucoup plus difficile de le déloger. Les pieds des chevaux étaient ferrés et ils portaient même parfois des sandales de paille (umagutsu) pour réduire le bruit à l'approche de l'ennemi.

Natation

La natation ou suieiijutsu devint un art martial populaire à partir du 12e siècle. Il ne s'agissait pas seulement de traverser une étendue d'eau aussi rapidement que possible, mais de le faire en portant des armes et en silence, y compris sous l'eau. Il s'agissait sans doute d'une réponse à l'augmentation du nombre de châteaux au Japon et à leur caractéristique principale, à savoir un large fossé de protection.

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Ninja by Hokusai
Ninja de Hokusai
Katsushika Hokusai (Public Domain)

Ninjas

Le ninjutsu était l'art martial pratiqué par les ninjas, les troupes spécialisées des armées japonaises chargées de sabotages, d'assassinats, d'espionnage et d'attaques des châteaux. Le ninjutsu impliquait l'acquisition d'un haut niveau d'habileté dans l'utilisation de toutes sortes d'armes et d'équipements, des crochets à grappin aux célèbres étoiles à lancer (shuriken). Entraîné par un maître ou sensei dès l'enfance dans une école spécialisée, un ninja apprenait tous les autres arts martiaux classiques et progressait ensuite vers des compétences hautement spécialisées telles que la lecture de cartes, le camouflage et le saut sur les toits, mais aussi l'art d'attacher un prisonnier, de mélanger des poisons et d'utiliser des explosifs.

Vers l'ère moderne

Le judo ("la voie de la souplesse") n'a été populaire qu'à partir du 19e siècle de notre ère, mais il avait évolué à partir du jujitsu ("technique de la souplesse") qui était devenu populaire depuis le 8e siècle au Japon. Les attaques, les saisies et les projections sont issues de formes de lutte bien plus anciennes. Essentiellement une méthode d'autodéfense, les adeptes doivent posséder une grande agilité et se déplacer de manière rapide et précise, en visant les points faibles de l'anatomie de leur adversaire. Le karaté ("main vide"), qui n'est devenu populaire au Japon qu'à partir du XXe siècle, et l'aïkido ("voie de la'union des énergies"), où l'on immobilise les attaquants en exerçant une pression sur les articulations, parfois jusqu'à les disloquer, sont également des disciplines tardives du répertoire martial.

This content was made possible with generous support from the Great Britain Sasakawa Foundation.

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Mark Cartwright
Mark est un auteur, chercheur, historien et éditeur à plein temps. Il s'intéresse particulièrement à l'art, à l'architecture et à la découverte des idées que toutes les civilisations peuvent nous offrir. Il est titulaire d'un Master en Philosophie politique et est le Directeur de Publication de WHE.

Citer cette ressource

Style APA

Cartwright, M. (2019, août 20). Les Arts Martiaux du Japon Médiéval [Martial Arts in Medieval Japan]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-1436/les-arts-martiaux-du-japon-medieval/

Style Chicago

Cartwright, Mark. "Les Arts Martiaux du Japon Médiéval." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le août 20, 2019. https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-1436/les-arts-martiaux-du-japon-medieval/.

Style MLA

Cartwright, Mark. "Les Arts Martiaux du Japon Médiéval." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 20 août 2019. Web. 22 avril 2024.

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