Georges Bizet

Définition

Mark Cartwright
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 07 juin 2023
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Disponible dans ces autres langues: anglais, néerlandais
Portrait of Georges Bizet (by Lidia Borda, CC BY-SA)
Portrait de Georges Bizet
Lidia Borda (CC BY-SA)

Georges Bizet (1838-1875) était un compositeur romantique français surtout connu pour son opéra Carmen et la musique instrumentale de la pièce de théâtre L'Arlésienne. Aucun de ses premiers opéras n'avait connu de grand succès, et même Carmen mit plusieurs mois à être acclamé par le public et la critique, trop tard pour que le compositeur, qui mourut d'une crise cardiaque à l'âge de 36 ans, puisse en profiter.

Jeunesse

Alexandre César Léopold Bizet (plus tard connu simplement sous le nom de Georges Bizet) vit le jour à Paris le 25 octobre 1838. Son père, Adolphe Bizet, était perruquier et coiffeur, mais il enseignait occasionnellement le chant. La mère de Georges, Aimée Delsarte, était la fille d'un homme d'affaires prospère, et elle avait également des talents musicaux, cette fois en tant que pianiste. Georges fit preuve d'un grand talent musical dès son plus jeune âge et fut inscrit au Conservatoire de Paris à l'âge de neuf ans (un an de moins que ce qui est normalement autorisé, mais sa tante et son oncle maternel auraient tiré quelques ficelles). En 1855, alors qu'il n'avait que 17 ans, Georges écrivit sa Symphonie en ut. Georges était un élève vedette du Conservatoire, où il remporta le prix de Rome en 1857, ainsi que plusieurs autres prix, notamment de composition, avec l'opéra en un acte Le docteur miracle. Il reçut d'autres prix pour son jeu de piano et d'orgue et pour deux cantates, David et Clovis et Clotilde.

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L'un des professeurs de composition de Bizet était Fromental Halévy (1799-1862), compositeur d'opéras. Bizet devint un grand admirateur du compositeur d'opéra allemand Giacomo Meyerbeer (1791-1864), qu'il décrivait comme "un génie dramatique tonitruant" (Schonberg, 269). Charles Gounod (1818-1893), dont les opéras comprennent Faust (1859), influença également le jeune compositeur. Par-dessus tout, Bizet croyait en la mélodie et il admirait ceux qui savaient la produire.

Bizet aurait pu gagner sa vie en jouant du piano avec virtuosité, mais il préférait composer.

Après avoir obtenu son diplôme en 1858, Bizet se rendit à Rome grâce à l'argent perçu pour ses prix. Il y passa les trois années suivantes à visiter les sites antiques et à composer. Bizet appréciait l'Italie et commençait à se découvrir lui-même. Il déclara : "Je commence à me considérer comme un artiste, mais quels ratés, quels échecs" (Steen, 585). En Italie, il composa un opéra-comique, Don Procopia (qui ne serait joué qu'en 1906), et plusieurs œuvres orchestrales, mais pas la messe qu'il était censé composer comme condition à l'obtention de sa bourse. Les œuvres orchestrales seraient réarrangées pour former la symphonie Roma du compositeur, qui ne serait achevée à sa satisfaction qu'en 1871. C'est dans la capitale italienne que Bizet commença à avoir des problèmes de gorge qui le poursuivraient toute sa vie.

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George Bizet, c. 1860
George Bizet, vers 1860
Sailko (CC BY)

Vie personnelle et caractère

L'historien de la musique C. Schonberg donne le résumé suivant du caractère et de l'apparence de Bizet :

Il n'y avait rien en musique qu'il ne pouvait faire - ce jeune homme rondouillard et coléreux, toujours élégamment vêtu, grignotant constamment des sucreries, des gâteaux, du chocolat et des petits fours. (Pour s'attirer les bonnes grâces de Bizet, il fallait satisfaire son penchant pour les sucreries).

(375)

Bizet eut une liaison avec une femme de ménage de la maison de ses parents, Marie Reiter, qui donna naissance à un enfant en juin 1862. Dans les années 1860, Bizet vivait avec son père au Vésinet, en région parisienne, où ils avaient un bungalow côte à côte. C'est là que le compositeur aimait se promener avec son chien le long de la Seine. Le 3 juin 1869, Bizet épousa la seconde fille de son ancien professeur, Geneviève Halévy. Le couple entretenait une relation amoureuse depuis quelques années et était fiancé depuis 1867, mais la famille de Geneviève désapprouvait cette union. Le mariage et la belle dot de Geneviève soulagèrent Bizet de ses soucis financiers. Le couple eut un fils, Jacques, né en 1872.

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Opéras et suites

Bizet aurait pu gagner sa vie comme pianiste virtuose, mais il préférait composer. Il dit un jour : "Je ne suis pas fait pour la symphonie ; j'ai besoin du théâtre, je ne peux rien faire sans lui" (Thompson, 121). Il retourna à Paris en 1860 et commença à poursuivre son rêve d'écrire des opéras. À cette époque, il écrivit Ivan IV, mais ne l'acheva pas. Un autre opéra, Jean Le Terrible, a été perdu depuis. Son premier opéra mis en scène date de 1863, grâce à l'appui du directeur de théâtre Léon Carvalho qui avait de l'argent à dépenser grâce à une subvention gouvernementale destinée à aider les anciens lauréats du prix de Rome. Bizet fut choisi et proposa Les pêcheurs de perles. Malheureusement, le public et la critique du Théâtre-Lyrique de Paris ne furent guère impressionnés et l'opéra ne dura que 18 représentations. Aujourd'hui, une chanson de cet opéra reste populaire, Au fond du temple saint, un duo de l'acte I, et l'opéra connut un renouveau au XXe siècle. Il est vrai que le libretto, situé à Ceylan (l'actuel Sri Lanka), laissait à désirer, ce que regrettèrent les auteurs lorsqu'ils réalisèrent plus tard le grand talent du compositeur qui le leur avait commandé; ils le qualifièrent eux-mêmes de "cadeau empoisonné" (Schonberg, 375). Un critique fit cette déclaration mémorable : "Il n'y avait ni pêcheurs dans le libretto, ni perles dans la musique" (Steen, 587).

George Bizet, 1875
Georges Bizet, 1875
Étienne Carjat (Public Domain)

Bizet ne se laissa pas décourager par ce revers et continua d'écrire d'autres opéras tout en gagnant de l'argent en écrivant des chansons médiocres et des œuvres pour piano pour des éditeurs de musique, en donnant des leçons de piano et en jouant lors des répétitions de théâtre. En décembre 1867, l'opéra de Bizet La jolie fille de Perth, basé en partie sur le roman du même nom de Sir Walter Scott (1771-1832), fut créé, toujours grâce à Carvalho, mais ce fut une nouvelle déception et, comme Les pêcheurs de perles, il n'obtint que 18 représentations. Une fois de plus, la principale faiblesse était le libretto.

La puissante partition de Carmen comporte des segments entraînants, dont l'ouverture la plus reconnaissable de tous les opéras.

La guerre franco-prussienne (1870-71) entraîna la fermeture des théâtres parisiens et Bizet rejoignit la Garde nationale (bien qu'il ait été exempté de service grâce à son prix de Rome). Bizet occupa une forteresse défensive à Paris et aida dans l'un des hôpitaux de la capitale. Heureusement, le conflit fut de courte durée et, toujours en 1871, Bizet acheva ses Jeux d'enfants, une suite de pièces pour piano à quatre mains. L'année suivante, en mai, l'opéra Djamileh de Bizet fut présenté au prestigieux Opéra-Comique de Paris, mais ce fut un nouvel échec, avec cette fois onze représentations seulement (il ne serait repris qu'en 1938). Toujours confiant dans ses convictions musicales malgré tous ces échecs, Bizet savait ce qu'il voulait écrire, quoi qu'en aient pensé les critiques, même s'il connaîssait de nombreux moments de doute en privé. Comme le compositeur le nota si bien un jour, "j'ai le courage de préférer Raphaël à Michel-Ange, Mozart à Beethoven, Rossini à Meyerbeer" (Schonberg, 375).

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Toujours en 1872, Bizet fut chargé d'écrire la musique instrumentale de L'Arlésienne, une pièce de théâtre d'Alphonse Daudet (1840-1897) basée sur son propre roman. La musique (aujourd'hui réunie en deux suites) comporte un solo de saxophone alto inhabituel et reste une pièce populaire dans le répertoire des concerts. Le minuetto suprêmement mélodique de la Suite n° 1 laisse l'auditeur songeur quant à ce qui aurait pu se passer si la carrière de Bizet avait été plus longue.

En 1873, Bizet poursuivit son rêve d'écrire un opéra à succès et commença à composer Don Rodrigue, mais ne l'achèverait jamais. En 1875, l'ouverture Patrie remporta un grand succès et le compositeur fut fait Chevalier de la Légion d'honneur. Bizet était maintenant prêt pour son chef-d'œuvre emblématique, et cette fois, il ne prendrait aucun risque avec le libretto. Cette œuvre, sa plus belle, fut commandée par Camille du Locle en 1872 (il avait également commandé Djamileh).

Carmen

Bizet acheva Carmen en 1874. L'histoire de cet opéra en quatre actes est celle d'une bohémienne appelée Carmen et est basée sur Carmen, un roman de 1845 de Prosper Mérimée (1803-1870). Le livret est de Henri Meilhac et Ludovic Halévy (neveu de Fromental Halévy). Dans sa forme originale, l'histoire était racontée par des dialogues parlés plutôt que par des récitatifs (discours mélodiques).

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L'intrigue se déroule à Séville et met en scène un caporal, Don José, qui s'éprend de la gitane Carmen, qui travaille dans une fabrique de cigarettes, mais il est frustré lorsqu'elle est arrêtée. Don José tente de faire libérer Carmen, mais il est lui-même arrêté. Tous deux sont relâchés, mais Carmen s'éprend à son tour d'un torero appelé Escamillo. Carmen et Escamillo décident de s'enfuir en compagnie d'un groupe de contrebandiers, mais Don José les poursuit. Escamillo et Don José se battent, puis ce dernier est consolé par son amie Micaëla. Carmen se promet à Escamillo s'il gagne sa prochaine corrida, mais Don José la poignarde et la tue alors qu'elle attend à l'extérieur de l'arène. À ce moment même, Escamillo victorieux sort de l'arène avec une foule en délire. Triomphe et tragédie.

La puissante partition de Carmen comporte des segments entraînants - dont l'ouverture la plus reconnaissable de tous les opéras - ainsi que des instruments de percussion inhabituels comme les castagnettes et les tambourins. Même l'entracte est un chef-d'œuvre de mélodie (la version d'Herbert von Karajan est recommandée ici).

La première de Carmen eut lieu à l'Opéra-Comique le 3 mars 1875. Le public de l'Opéra-Comique était plus habitué à des drames légers avec beaucoup de sentimentalité et une fin heureuse pour les encourager à rentrer chez eux. Les critiques et la presse furent d'abord scandalisés par l'histoire vériste de Carmen et ses personnages immoraux. L'œuvre était également novatrice, puisqu'il s'agissait du premier opéra comique parlé, du premier opéra dont l'héroïne était quelque peu antipathique et du premier opéra qui se terminait par une véritable tragédie. La partition regorgeait également d'épisodes d'originalité. Des compositeurs comme Giacomo Puccini (1858-1924) se feraient plus tard une spécialité de ce genre de théâtres, mais pour l'instant, les critiques et le public ne savaient pas trop quoi penser de cette nouvelle approche de l'opéra.

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Carmen by Emile Wauters
Carmen d'Emile Wauters
Emile Wauters (Public Domain)

Bizet, une fois de plus vaincu et déprimé par la réaction tiède du public, qualifia son opéra de "flop définitif et sans espoir" (Schonberg, 376). C'était une exagération et, de plus, les initiés savaient ce qu'ils voyaient et entendaient. Pyotr Ilyich Tchaikovsky (1840-1893) déclara (alors que le sort de la production était encore indécis) que Carmen "deviendrait l'opéra le plus populaire du monde" au cours de la décennie suivante (Sadie, 305); il ne s'était pas trompé. Plus tard, le compositeur se montra encore plus enthousiaste à l'égard de l'opéra : "À mes yeux, il s'agit d'une œuvre magistrale dans le plein sens du terme, c'est-à-dire l'une de ces choses qui sont destinées à refléter les efforts musicaux de toute une époque dans la plus grande mesure" (Panenka). Richard Wagner (1813-1883), le plus respecté des compositeurs d'opéra de l'époque, fit l'éloge de Bizet : "Dieu merci, voici enfin quelqu'un qui a des idées dans la tête" (Schonberg, 377). Le soutien de poids se poursuivit lorsque Johannes Brahms (1833-1897), qui vit l'opéra 20 fois, déclara publiquement qu'il était tout à fait prêt à marcher jusqu'au bout du monde pour pouvoir embrasser le créateur de Carmen.

La critique et le public, en France et à l'étranger, finirent par oublier les éléments les plus choquants et furent conquis par le drame et la magnifique partition. Carmen futt mis en scène à Vienne en octobre (après avoir été raccourci et avec un récitatif allemand ajouté par Ernest Guiraud, un ami de Bizet), à Londres en juin 1878 et à New York en octobre 1878. En fin de compte, Carmen devint l'un des opéras les plus populaires de tous. Il est dommage que le compositeur n'ait pas vu ce succès se concrétiser.

Œuvres les plus célèbres de Bizet

Les œuvres les plus célèbres de Georges Bizet, dont les dates de création sont indiquées entre parenthèses, sont les suivantes :

3 cantates
Symphonie en ut (1855)
Les pêcheurs de perles (1863)
Roma (1869 et révisée en 1871)
Jeux d'enfants - Children's Games (1871)
L'Arlésienne - La fille d'Arles (1872)
Carmen (1875)
Don Procopio (1906)

Tomb of Georges Bizet
Tombe de Georges Bizet
Paulae (CC BY)

Mort et héritage

Alors que Carmen se jouait à Paris, Bizet fut pris d'une crise de rhumatisme articulaire aigu qui aggrava sa maladie cardiaque de longue date. Le compositeur continua malgré tout à travailler et composa un oratorio (œuvre de concert) de commande, Geneviève de Paris. Il ne l'achèverait jamais. Georges Bizet mourut d'une crise cardiaque à Bougival, en région parisienne, le 3 juin 1875, jour de son sixième anniversaire de mariage et trois mois exactement après la création de Carmen. Le soir de la mort de Bizet, la soprano qui interprétait sa Carmen, Célestine Galli-Marié (1840-1905), s'évanouit sur scène. Curieusement, cela se produisit pendant la scène de la voyance, lorsque Carmen est informée de sa propre mort à venir.

Non seulement Carmen est encore régulièrement joué dans le monde entier, mais l'opéra a également inspiré un grand nombre d'œuvres dérivées sur scène et au cinéma. Le film muet Carmen de Cecil B. DeMille de 1913 (l'un des rares films de l'époque) est basé sur cet opéra. La comédie musicale Carmen Jones, jouée à Broadway en 1943, est basée sur l'opéra de Bizet mais a été reprise pendant la Seconde Guerre mondiale (1939-45) ; la musique reste fidèle à la partition de Bizet mais les paroles ont été ajoutées par Oscar Hammerstein II. Une version cinématographique pionnière de Carmen Jones avec une distribution entièrement noire, réalisée par Otto Preminger, a été réalisée en 1953 et a remporté le Golden Globe Award du meilleur film. En 1949, un ballet basé sur l'histoire de Carmen et sur la musique de Bizet a été présenté pour la première fois à Londres et continue d'être mis en scène dans le monde entier aujourd'hui. Il y a même eu une version de Carmen en patins à glace en 1990. Au XXIe siècle, le personnage de Carmen continue d'attirer les plus grands noms du monde du spectacle avec le film Carmen : A Hip Hopera avec Beyoncé Knowles.

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Questions & Réponses

Pourquoi Georges Bizet est-il célèbre ?

Georges Bizet est célèbre pour son opéra Carmen de 1875 et la suite musicale L'Arlésienne.

Quel âge avait Bizet à sa mort ?

Georges Bizet n'avait que 36 ans lorsqu'il mourut d'une crise cardiaque en juin 1875. Il ne connaîtrait jamais le grand succès international de son opéra Carmen.

Comment meurt Carmen dans l'opéra Carmen de George Bizet ?

Dans l'opéra Carmen de Georges Bizet, le personnage principal, Carmen la gitane, est poignardée et tuée par son amant Don José.

Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Mark Cartwright
Mark est un auteur, chercheur, historien et éditeur à plein temps. Il s'intéresse particulièrement à l'art, à l'architecture et à la découverte des idées que toutes les civilisations peuvent nous offrir. Il est titulaire d'un Master en Philosophie politique et est le Directeur de Publication de WHE.

Citer cette ressource

Style APA

Cartwright, M. (2023, juin 07). Georges Bizet [Georges Bizet]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-21955/georges-bizet/

Style Chicago

Cartwright, Mark. "Georges Bizet." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le juin 07, 2023. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-21955/georges-bizet/.

Style MLA

Cartwright, Mark. "Georges Bizet." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 07 juin 2023. Web. 26 avril 2024.

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