Jugurtha

Définition

Joshua J. Mark
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 28 novembre 2017
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Disponible dans ces autres langues: anglais
Jugurtha Captured (by Mary Macgregor, Public Domain)
Jugurtha capturé
Mary Macgregor (Public Domain)

Jugurtha (r. de 118 à 105 avant J.-C.) fut roi de Numidie, en Afrique du Nord, et était le petit-fils du premier roi numide Massinissa (r. de 202 environ à 148 avant J.-C.). Il était le fils illégitime de Mastanabal, le plus jeune fils de Massinissa, et était le moins susceptible de parvenir au pouvoir parmi les petits-fils de Massinissa. Cependant, son ambition personnelle, son intelligence et son caractère impitoyable, associés à un sens aigu de la motivation humaine et à des moyens financiers suffisants pour acquérir de l'influence, le menèrent au pouvoir après la mort de son oncle Micipsa (r. de 148 à 118 av. J.-C.) qui avait succédé à Massinissa.

Micipsa avait divisé le royaume entre ses deux fils Hiempsal I et Adherbal et son fils adoptif Jugurtha, mais ce dernier les assassina tous les deux. Il soudoya le sénat romain et les différents émissaires et généraux envoyés contre lui jusqu'à ce qu'en 105 avant J.-C., après un certain nombre de défaites cuisantes aux mains des généraux romains, il ne finisse par être trahi et livré aux Romains par son beau-fils, Bocchus, roi de la Maurétanie voisine. Il fut ramené à Rome enchaîné et mourut en prison - exécuté ou mort de faim - en 104 avant Jésus-Christ.

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Le récit le plus complet de la guerre de Rome contre Jugurtha est celui de l'historien Salluste (c. 86 - c. 35 avant J.-C.), mais il écrivit avec l'intention de condamner l'avarice et le manque d'intégrité de Rome et choisit l'histoire de Jugurtha pour faire passer son message. Sa version des faits a donc souvent été contestée par les historiens modernes qui affirment que son œuvre est plus une polémique qu'une histoire.

Curieusement, d'autres historiens de l'Antiquité ayant écrit sur la guerre de Jugurtha, tels que Plutarque (46-120 de notre ère) et Dion Cassius (155-235 de notre ère), qui présentent plus ou moins la même image de l'homme et du conflit qu'il initia, sont généralement acceptés, même si ces deux auteurs se sont largement inspirés du récit de Salluste sur l'ascension et la chute de Jugurtha. Comme Salluste présente de loin la version la plus complète de l'histoire de Jugurtha (que les auteurs ultérieurs ne font que répéter) et que nous ne disposons pas d'autres sources viables et moins problématiques, c'est son œuvre qui inspirera principalement le présent article.

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Massinissa fut remplacé par son fils Micipsa dont le frère cadet, Mastanabal, eut un fils illégitime dont les talents naturels et l'intelligence furent remarqués par tous : Jugurtha.

Jeunesse et ascension au pouvoir

Massinissa (de la région de Numidie) avait initialement combattu pour Carthage pendant la deuxième guerre punique (218-202 avant J.-C.) entre Rome et Carthage, mais il changea de camp lorsqu'il comprit que Carthage allait perdre, et devint un allié loyal de Rome. Lorsque les Romains gagnèrent la guerre, Massinissa fut récompensé par tous les territoires d'Afrique du Nord qu'il avait gagnés pendant le conflit et eut plus ou moins le champ libre pour prendre ce qu'il voulait à Carthage.

Il fonda le royaume de Numidie (qui correspond approximativement à certaines parties de l'Algérie et de la Tunisie actuelles), composé de ces territoires fertiles, et approvisionna Rome en céréales. Une fois le commerce avec Rome établi, il enrichit continuellement son trésor dans la capitale Cirta.

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À sa mort, son fils Micipsa lui succéda, et son frère cadet, Mastanabal, eut un fils illégitime dont les talents naturels et l'intelligence furent remarqués par tous : Jugurtha. Salluste écrit:

Dès sa jeunesse, Jugurtha, fort, beau, surtout doué d'une vigoureuse intelligence, ne se laissa pas corrompre par le luxe et la mollesse, mais, suivant l'habitude numide, il montait à cheval, lançait le trait, luttait à la course avec les jeunes gens de son âge, et, l'emportant sur tous, leur resta pourtant cher à tous ; il passait presque tout son temps à la chasse, le premier, ou dans les premiers, à abattre le lion et les autres bêtes féroces, agissant plus que les autres, parlant peu de lui.

(La guerre de Jugurtha, 6.1, Remacle).

Comme le dit Salluste, Micipsa était initialement satisfait du succès et de la popularité de son neveu jusqu'à ce qu'il ne pense à la possibilité que Jugurtha ne devienne une menace pour lui-même et ses deux fils. Pour tenter de résoudre ce problème, il confia à Jugurtha le commandement des divisions de cavalerie qu'il envoyait en Espagne pour soutenir les Romains dans leur combat contre Numantia. Il espérait, comme l'écrit Salluste, que Jugurtha " serait facilement victime soit du désir de montrer sa valeur, soit de l'impitoyable ennemi " (7.2). Salluste poursuit :

Mais l'issue fut tout autre qu'il n'avait pensé.
Jugurtha était naturellement actif et vif. Sitôt qu'il eut compris la nature et le caractère de Scipion, général en chef de l'armée romaine, et la tactique ennemie, par ses efforts, son application, son obéissance, sa modestie, son initiative devant le danger, il arriva bien vite à une telle réputation, qu'il conquit l'affection des Romains et terrifia les Numantins.

(La guerre de Jugurtha, 7.3-4, Remacle)

Lorsque la guerre contre Numantia fut gagnée, Scipion renvoya Jugurtha à Cirta avec une lettre de recommandation qui faisait son éloge et une allusion pas si subtile que cela au fait que Micipsa devrait l'adopter comme fils et héritier, ce que Micipsa fit rapidement. Lors de la cérémonie, ou peu après, Micipsa demanda à Jugurtha de prendre soin de ses cousins comme s'ils étaient ses propres frères de sang, ce qu'il accepta, mais rien dans le récit ne suggère qu'il ait jamais eu l'intention de tenir sa promesse. Jugurtha avait passé sa jeunesse dans les activités physiques et la guerre tandis qu'Hiempsal I et Adherbal avaient été élevés dans le confort du palais et, de plus, étaient considérablement plus jeunes que lui et ne semblaient pas avoir gagné son respect.

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Masinissa
Massinissa
Numidix (GNU FDL)

Il n'était pas non plus respecté par ses cousins, comme cela devint évident à la mort de leur père. Micipsa avait demandé que les trois gouvernent conjointement le royaume mais, lors de la première réunion des princes, Hiempsal prit le siège d'honneur et rabroua Jugurtha. Lorsque Jugurtha suggéra que la première mesure de leur règne conjoint devrait être d'annuler les édits de Micipsa des cinq dernières années - parce que le roi était en mauvaise santé et n'avait plus toute sa tête - Hiempsal fut entièrement d'accord et déclara que cela annulerait également l'adoption de Jugurtha et sa prétention au pouvoir. Peu de temps après, Jugurtha fit assassiner Hiempsal à son domicile. Adherbal se mit en sécurité et mobilisa une armée tout en envoyant rapidement des émissaires à Rome pour informer le Sénat des actions de Jugurtha et demander de l'aide.

Adherbal avait la majorité du peuple de son côté, mais Jugurtha, en raison de ses réalisations militaires, avait les meilleurs soldats. Lorsqu'Adherbal rencontra Jugurtha au combat, il fut rapidement vaincu et fuit le champ de bataille. Il quitta la Numidie pour se rendre dans une province romaine établie sur un territoire pris à Carthage et, de là, prit un bateau pour Rome afin de plaider sa cause devant le Sénat, cette fois en personne.

Jugurtha et Adherbal

Jugurtha s'était fait de nombreux amis parmi les Romains en Espagne et avait compris que l'or pouvait acheter toutes sortes de grâces ; il envoya donc des émissaires avec des cadeaux aux sénateurs romains qui étaient ses amis ainsi qu'à d'autres qui le seraient bientôt. L'expert Philp Matyszak commente :

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Jugurtha avait appris plus que le métier de soldat en Espagne. Il savait que le succès ou l'échec à Rome dépendait de l'exercice d'une fonction et que les élections, même aux postes les plus bas, étaient d'un coût phénoménal. Adherbal vint à Rome avec le droit de son côté et un plaidoyer pour la justice. Les envoyés de Jugurtha venaient avec de l'or. Jugurtha obtint un décret qui divisait le royaume entre lui et Adherbal, Jugurtha se voyant attribuer la partie la plus riche, ce qui indigna fortement les incorruptibles romains. (65)

Bien que cette affirmation ait été contestée, et que certains spécialistes insistent sur le fait que le territoire de Jugurtha était égal en richesse et en ressources à celui d'Adherbal, le récit de Salluste soutient l'argument selon lequel Jugurtha reçut la meilleure partie du royaume. De plus, qu'il l'ait été ou non, le Sénat refusa de le censurer de quelque façon que ce soit pour l'assassinat d'Hiempsal ou son attaque non provoquée contre Adherbal. Jugurtha était sûr que suffisamment d'or pourrait lui acheter une décision favorable et il s'avéra qu'il avait raison.

Jugurtha assassina un monarque allié de Rome et les défenseurs romains de Cirta. Le Sénat déclara donc la guerre à la Numidie en 112 av. J.-C.

Désormais à la tête de son propre royaume, Jugurtha consolida son pouvoir et attaqua le territoire d'Adherbal. Adherbal et ses partisans furent repoussés et se réfugièrent dans la ville fortifiée de Cirta. Jugurtha les poursuivit et organisa un siège. Adherbal envoya de nouveaux émissaires à Rome pour demander de l'aide et rendre compte des hostilités de Jugurtha.

Des envoyés de Rome furent envoyés sur place pour servir de médiateurs mais ne rencontrèrent que Jugurtha, jamais Adherbal. Jugurtha refusa de lever le siège ou de cesser les hostilités de quelque manière que ce soit et, après avoir probablement reçu un gros pot-de-vin, les envoyés romains reprirent le bateau pour l'Italie.

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Les défenseurs de Cirta, réalisant qu'ils avaient été abandonnés par Rome, n'eurent d'autre choix que de se rendre. Ils n'avaient pas assez de nourriture et d'eau pour résister à un long siège et semblent avoir été convaincus que Jugurtha honorerait les conditions qu'il leur avait données ; il leur offrait la vie sauve en échange de la ville. Cependant, une fois les défenses levées, Jugurtha ordonna à ses hommes de tuer tous les adultes armés à l'intérieur des murs de la ville et fit torturer Adherbal à mort.

Le roi Jugurtha

Parmi les défenseurs de Cirta se trouvaient un certain nombre de romains qui, selon Salluste, avaient encouragé Adherbal à se rendre en croyant qu'ils seraient épargnés et renvoyés chez eux, ce qui ne fut pas le cas. Lorsque la nouvelle du massacre de Cirta parvint à Rome, le Sénat fut contraint d'agir, même à contrecœur. Salluste les décrit comme ayant fait traîner en longueur la discussion sur l'opportunité d'envoyer des forces contre Jugurtha parce qu'un grand nombre d'entre eux avaient été soudoyés ; Salluste qualifie ces sénateurs d'"outils du roi" :

Quand l'affaire fut connue à Rome et portée devant le Sénat, les mêmes agents du roi intervinrent ; soit par leur crédit, soit par des chicanes, ils cherchèrent à gagner du temps et à adoucir la noirceur de ce forfait.

(.27.1)

Cependant, malgré tous leurs efforts, il n'y avait pas de tournure qui ait pu changer le fait que Jugurtha avait assassiné un monarque en exercice, allié de Rome, ainsi que les défenseurs romains de Cirta et des non-combattants. Le Sénat déclara la guerre à la Numidie en 112 avant Jésus-Christ et Lucius Calpurnius Bestia fut choisi pour diriger les forces romaines contre Jugurtha vers 111 av. J.-C.

Lorsque Jugurtha entendit cette nouvelle, il fut choqué, car il croyait que l'argent pouvait tout acheter à Rome, et il y envoya rapidement son fils et quelques émissaires avec encore plus d'argent, car il était clair pour lui qu'il ne devait pas en avoir envoyé assez. Bien qu'il semble que Bestia ait été tenté de recevoir ces envoyés, le Sénat leur fit savoir que, à moins que la délégation numide ne vienne annoncer la reddition inconditionnelle de Jugurtha, ils devaient rentrer chez eux.

Bestia n'eut alors d'autre choix que de mener ses troupes au combat en Afrique du Nord. Il commença sa campagne avec vigueur, défaisant les forces de Jugurtha et capturant des villes et des forteresses. Cependant, Jugurtha freina son avancée, non pas par la force mais par la corruption. Il rencontra Bestia et lui fit remarquer qu'il n'y avait pas besoin d'un conflit prolongé et coûteux, affirmant plus ou moins que " ce qui est fait est fait ", et promit sa soumission à l'autorité romaine, une somme de plus de 30 éléphants et une importante somme d'argent liquide - en plus de ce qu'il avait pu verser sur les comptes personnels de Bestia.

Bestia rappella ses troupes et retourna à Rome, ne laissant derrière lui qu'une force symbolique. Les commandants de ces troupes, qui semblent également avoir été soudoyés par Jugurtha, lui rendirent alors les éléphants et lui vendirent également un certain nombre de déserteurs des rangs romains. Bestia prétendait que, compte tenu des nombreux autres problèmes auxquels Rome était confrontée, il avait obtenu la paix avec Jugurtha sans une guerre coûteuse.

Territories During the Second Punic War
Territoires pendant la Seconde Guerre Punique
Javierfv1212 (CC BY-SA)

Le peuple de Rome et certains membres du Sénat, cependant, n'étaient pas satisfaits de ce résultat et une enquête fut lancée pour savoir qui et combien de hauts fonctionnaires étaient à la solde de Jugurtha. Jugurtha fut convoqué à Rome devant le Sénat pour témoigner et on lui promit un sauf-conduit et l'immunité pendant tout son séjour.

Jugurtha s'exécuta mais, avant que son témoignage ne puisse être recueilli, l'un des tribuns, Gaius Baebius, s'avança et lui interdit de parler. Le public, qui s'était rassemblé pour assister à la procédure, fut scandalisé et tenta de le chasser, mais il usa de son influence pour empêcher le témoignage de Jugurtha et l'enquête ne donna rien.

Un autre petit-fils de Massinissa, Massiva, qui avait demandé au Sénat de l'aider à se faire roi de Numidie après s'être débarrassé de Jugurtha, se trouvait à Rome pour assister à la procédure. Jugurtha trouva l'endroit où Massiva séjournait et le fit assassiner. Lorsqu'il fut confronté, il avoua ouvertement ce qu'il avait fait, mais il estima que cela ne regardait pas Rome et, de plus, on lui avait promis l'immunité pendant sa visite et on ne pouvait rien lui faire. Le Sénat impuissant n'eut d'autre choix que de lui demander de quitter Rome et le pays sur-le-champ.

La guerre de Jugurtha

L'insolence et l'audace de Jugurtha ne pouvant être tolérées plus longtemps, une armée commandée par le général Postumius Albinus fut envoyée en Afrique du Nord pour s'occuper de lui en 110 avant Jésus-Christ. Albinus avait fait partie de ceux qui, à Rome, favorisaient le défunt Massiva et n'aimait pas Jugurtha, mais, pour une raison ou une autre, il ne fit aucune avancée significative contre lui. Il dut retourner à Rome pour les élections et laissa son commandement à son frère Aulus.

Aulus marcha contre Jugurtha mais le roi numide demanda des pourparlers et les hostilités furent arrêtées ; Jugurtha retarda et interrompit ensuite les négociations jusqu'à ce que ne pointe à l'horizon la fin de la saison des campagnes. Reconnaissant qu'il devrait bientôt rentrer à Rome sans avoir rien accompli, Aulus mobilisa ses hommes pour attaquer la ville de Suthul où, avait-il entendu, Jugurtha entreposait une immense quantité de son trésor.

Marius se révéla être un excellent général qui choisit de frapper Jugurtha en amenuisant systématiquement ses villes et en épuisant ses ressources plutôt que de l'affronter dans des batailles répétées.

Cependant, Jugurtha disposait d'espions partout et entendit parler des plans d'Aulus. Il rassembla son armée et frappa rapidement le camp romain, dispersant l'armée d'Aulus. Ceux qui n'avaient pas été tués lors de l'assaut initial n'eurent d'autre choix que de se rendre.

Jugurtha ordonna alors à chacun des soldats vaincus et à leurs commandants de "passer sous le joug" - un rituel symbolique reconnaissant la supériorité de l'adversaire - et leur donna moins de deux semaines pour quitter son royaume ou être tués.

Son attaque du camp romain - puis l'humiliation qu'il imposa aux troupes vaincues - mit en rage le peuple romain et le Sénat. Il semble que Jugurtha ait pensé qu'il pourrait acheter son ticket de sortie pour échapper aux conséquences à venir mais, cette fois, il se trompait.

Rome envoya contre lui le général Quintus Caecilius Metellus (qui reçut plus tard l'épithète de Numidicus, vers 109 av. J.-C.) avec une force impressionnante. Metellus était réputé pour son intégrité et ne pouvait être acheté, mais Jugurtha croyait encore que tout ce qui appartenait à Rome pouvait être acheté à bon prix. Il envoie donc des émissaires pour négocier. Dion Cassius écrit dans son Histoire:

Jugurtha avait envoyé des députés à Métellus pour négocier la paix : le général romain fixa plusieurs conditions ; mais successivement, et comme si chacune eût toujours été la seule qu'il dût imposer. C'est ainsi qui il obtint des otages, des armes, les éléphants, les prisonniers et les transfuges. Metellus tua tous les transfuges ; mais il n'accorda point la paix, parce que Jugurtha ne voulut pas se rendre auprès de lui, dans la crainte d'être arrêté. (26.89)

Metellus frappa alors de plein fouet Jugurtha, s'emparant de la ville de Vaga puis le battant à la bataille de Muthul en 108 avant J.-C. Jugurtha tenta de se rallier et de se regrouper, mais nombre de ses soldats estimaient avoir fait plus que leur devoir pour le roi et se retirèrent dans leurs foyers. Jugurtha envoya alors des émissaires à Metellus pour tenter à nouveau de négocier une paix mais, à chaque fois, Metellus réussit à rallier ces hommes à sa cause et les renvoya pour tenter d'assassiner Jugurtha. Matyszak écrit :

Il y avait une certaine ironie dans cette situation : l'homme que Jugurtha ne pouvait pas corrompre utilisait ses propres armes de corruption, de tromperie et de retardement contre lui. Pour le reste de sa vie, Jugurtha ne pourrait faire confiance à personne et chacun de ses proches collaborateurs était un assassin potentiel. L'atmosphère de peur et de suspicion qui en résulta poussa nombre des plus proches conseillers de Jugurtha à l'abandonner avant d'être eux aussi accusés de comploter contre leur chef. (69)

Metellus poursuivit sa campagne, prenant une ville après l'autre, et reprenant même la ville de Vaga que Jugurtha avait réussi à reconquérir. A Thala, Jugurtha fut à nouveau vaincu, perdant encore plus de territoires, d'armes et d'hommes au profit de Metellus, et le commandant romain aurait sans doute continué jusqu'à la victoire complète, mais il fut remplacé à ce moment-là par son commandant en second, Gaius Marius (vers 107 av. J.-C.), qui était ambitieux aux dépens de Metellus et l'accusait de faire traîner la guerre inutilement. Bien que les historiens antiques soient unanimes à louer la conduite de Metellus au détriment de Marius, ce dernier se révéla être un excellent général qui choisit de frapper Jugurtha en amenuisant systématiquement ses villes et en épuisant ses ressources plutôt que de l'affronter dans des batailles répétées.

Gaius Marius
Caius Marius
Franz Venhaus (CC BY-ND)

Capture et mort

Jugurtha, désespéré, fit appel à son gendre, Bocchus, lui promettant un tiers de son royaume en échange de son aide pour vaincre Marius. Bocchus accepta l'offre et les forces alliées tombèrent sur l'armée romaine alors qu'elle était en marche pour se retirer vers ses quartiers d'hiver. Marius résista vaillamment aux forces beaucoup plus nombreuses, puis les vainquit, infligeant de lourdes pertes à l'armée de Jugurtha. Bocchus se retira du champ de bataille avec ses forces en grande partie intactes car il avait refusé d'engager de nombreuses troupes après avoir vu avec quelle férocité les Romains se battaient.

Bocchus contacta alors secrètement Marius pour demander une conférence et Marius envoya son subordonné (et futur dictateur de Rome) Lucius Cornelius Sulla (vers 80 av. J.-C.) pour régler les détails. Sulla dit à Bocchus qu'un accord ne pouvait être conclu que s'il livrait Jugurtha. Au même moment, Jugurtha apprit que Sulla était à la cour de Bocchus et exigea que son gendre lui livre le Romain.

Bocchus invita Jugurtha à son palais en lui faisant croire qu'il venait pour faire Sulla prisonnier tout en disant à Sulla que Jugurtha lui serait livré dès son arrivée. Personne ne semble avoir su de quel côté penchait réellement Bocchus jusqu'au moment où il fit arrêter Jugurtha et le remit à Sulla en 105 avant Jésus-Christ.

Jugurtha fut amené à Rome enchaîné, il fut obligé de prendre part au triomphe de Marius et fut ensuite emprisonné dans le donjon connu sous le nom de Tullianum. Selon un récit, il y fut laissé mourir de faim, tandis que selon un autre, il fut exécuté par strangulation en 104 avant Jésus-Christ. En échange de son aide pour capturer Jugurtha, Bocchus reçut les terres de Numidie que son beau-père lui avait promises en échange de son aide pour vaincre Rome.

Jugurtha s'était avéré être l'un des plus dangereux ennemis de Rome, car il n'était pas seulement un habile chef militaire, mais il savait aussi comment exploiter la grande faiblesse de son ennemi : l'avarice. Ayant observé de première main l'attitude facile des Romains à l'égard des pots-de-vin, il en tira le meilleur parti, persuadé que toutes les personnes impliquées dans la transaction en tireraient profit. Au tout début, il prouva qu'il avait raison, mais il finit par découvrir que l'argent ne peut nous venir en aide que pendant un certain temps.

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Joshua J. Mark
Auteur indépendant et ex-Professeur de Philosophie à temps partiel au Marist College de New York, Joshua J. Mark a vécu en Grèce et en Allemagne, et a voyagé à travers l'Égypte. Il a enseigné l'histoire, l'écriture, la littérature et la philosophie au niveau universitaire.

Citer cette ressource

Style APA

Mark, J. J. (2017, novembre 28). Jugurtha [Jugurtha]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-13932/jugurtha/

Style Chicago

Mark, Joshua J.. "Jugurtha." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le novembre 28, 2017. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-13932/jugurtha/.

Style MLA

Mark, Joshua J.. "Jugurtha." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 28 nov. 2017. Web. 19 avril 2024.

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