Grande Révolte Juive

Article

Harry Oates
de , traduit par Jerome Couturier
publié le 28 août 2015
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Disponible dans ces autres langues: anglais, Turc

L'Empire romain du début du 1er siècle ap. J.-C. est souvent considéré comme l'empire parfait. Les prouesses militaires exceptionnelles des Romains étaient utilisées pour étendre l'empire et, une fois les territoires suffisamment pacifiés, le pouvoir politique romain s'installait depuis la capitale de l'empire jusqu'aux gouvernements locaux des territoires.

Parfaitement équilibré entre un mélange de puissance dure (occupation militaire et intervention pour faire respecter la loi romaine et inculquer la religion) et de puissance douce (divertissement, technologie et commerce), le pouvoir romain était généralement accepté et apprécié presque partout où l'empire débarquait. Certains sujets de la domination romaine étaient heureux d'échanger leur liberté religieuse en faveur du culte de César contre les avantages des infrastructures publiques, par exemple.

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The Siege and Destruction of Jerusalem
Siège et Destruction de Jérusalem
David Roberts (1796-1864) (Public Domain)

Domination Romaine en Palestine

La Palestine avait été hellénisée depuis longtemps. La culture grecque s'y épanouissait depuis 312 av. J.-C., sous le règne de Séleucos Ier Nicator. Cependant, après la dynastie hasmonéenne, cette hellénisation devint plus que la culture grecque et un mode de vie cosmopolite. Avec la romanisation des classes juives hellénisées, on assista à une recrudescence de la corruption qui avait éclaté sous Antiochos IV Épiphane et la domination séleucide. Les Grecs locaux et l'élite juive hellénisée soutenaient les Romains et, à ce titre, jouissaient de ce que les Romains pouvaient offrir de plus beau. L'élite juive avait pris conscience de sa place élevée dans la société et faisait tout son possible pour maintenir le statu quo. Les Sadducéens, dont les Romains favorisaient l'élite, étaient majoritaires au Sanhédrin (la chambre dirigeante) et défendaient Hérode, le roi-client de Rome.

Cependant, tous les Juifs ne soutenaient pas la position d'Hérode. Les Pharisiens (qui fusionnèrent sans doute avec les Zélotes) s’y opposaient profondément et étaient outrés par les incursions que l'hellénisme continuait à faire dans la religion juive. Les Romains avaient involontairement entretenu un clivage de classe dans la religion juive qui s'était installé sous le règne des Séleucides.

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La corruption enracinée du procurateur romain nommé par le sénat fut transférée aux autorités locales juives et non juives, lesquelles ne se souciaient guères des préoccupations des juifs. La plupart des bénéfices des marchandises vendues sur les marchés de Jérusalem n’étaient pas réinvestis dans l'économie judéenne, mais allaient directement à l'élite, ce qui exaspérait le commun des juifs.

Selon Flavius Josèphe, un historien juif romain contemporain qui combattit aux côtés du peuple juif lors de la révolte, l'inaptitude des gouverneurs romains de la province était la principale cause de la colère juive. L'indifférence et la malveillance des gouverneurs de Judée reflétaient la malveillance des empereurs de Rome. Lorsque Ponce Pilate fut élu par le sénat pour prendre les rênes de procurateur de Jérusalem en 27 ap. J.-C., les relations entre le peuple juif et le peuple romain étaient en lambeaux. Pilate partageait le même mépris que l'empereur Tibère pour le peuple juif et entreprit rapidement d'instaurer un nouveau type de culte pour remplacer la religion juive dans la région.

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En 64 ap. J.-C., Gessius Florus présidait la Judée. Il avait la même indifférence à l'égard de la population juive que Pilate, et n'avait pas l'intelligence politique nécessaire pour calmer la tension de la société juive lorsque les choses tournèrent mal. En d'autres termes, comme le déclare Josèphe, Florus était incompétent.

Rébellion

Le clivage artificiel entre les classes, la corruption des gouvernements locaux et sénatoriaux de la région et le mépris débridé pour le peuple juif provoquèrent une émeute à Césarée en 66 ap. J.-C. Les Zélotes, une bande de Juifs anti-élites non hellénisés, y balayèrent les élites grecques locales soutenues par les Romains.

Gessius Florus, dans un élan d'orgueil méprisable, pilla le Temple sacré pour financer le culte de César et érigea des statues de l'empereur Néron et de lui-même avec l'argent qu'il avait pris. Cela mit évidemment en colère le peuple juif. Le Temple était non seulement le centre de la vie religieuse et sociale pour les Juifs, mais aussi le signe de la présence de Dieu dans la ville sainte. Lorsque Florus fit une descente dans le Temple et ordonna aux habitants des environs de suivre sa forme de polythéisme, ce fut la plus grande insulte à la religion juive, et les Juifs se rebellèrent. Il s’ensuivit des attaques ponctuelles contre des citoyens romains dans toute la Judée, en particulier dans les villes du nord. Là, dans des régions telles que celle de Narbata, le peuple juif renversa le gouvernement romain.

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En réponse à cette victoire juive, la légion romaine de Syrie, soutenue par la Scythie voisine, tenta de réprimer la rébellion. Les Romains de Syrie s'emparèrent sans trop de peine de vastes régions du nord de la Judée et de la Galilée qui s'étaient révoltées. Mais les Romains se dispersèrent trop, tombèrent dans une embuscade, et furent vaincus sur la côte de Judée à la bataille de Beth-Horon. Ce fut une grande victoire pour les rebelles. Les Romains de Syrie abandonnèrent leurs postes et rentrèrent en Syrie.

L'empereur Néron, furieux de l'impudence des rebelles juifs, envoya le général romain Vespasien détruire les armées rebelles et punir les citoyens de la province de Judée.

Vespasien et son fils Titus revinrent plus forts en Judée avec plus d'hommes et massacrèrent presque tous les émeutiers juifs à Césarée et dans le nord de la Galilée. Environ 10 000 Juifs furent tués ou vendus comme esclaves.

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Des Romains aux Portes de Jérusalem

Les derniers émeutiers juifs s'enfuirent de Césarée vers Jérusalem; là, ils cessèrent de payer l'impôt au Temple et assassinèrent sans discernement les soldats romains qui y étaient stationnés.

Les Zélotes et les Sicaires prirent le contrôle de la garnison militaire romaine de Jérusalem. Ce fut une victoire encourageante pour le peuple juif, car les Zélotes bénéficièrent alors d'un soutien croissant dans la ville. Ce sentiment de domination juive sur les Romains fut de courte durée.

En 67 ap. J.-C., les Romains, sous la direction de Vespasien et de Titus, reprirent toute la Judée et tuèrent les rebelles juifs qui y restaient. Le bastion juif de Jotapata (proche de l’actuelle Yodfat) tomba sous contrôle romain après un siège de 47 jours. Puis les Romains marchèrent sur Jérusalem.

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Le point de vue des dirigeants juifs de Jérusalem, principalement des Sadducéens, passa de l'exaltation à la panique. Ils savaient que la révolte n'aurait pas un succès durable, et ils implorèrent les Zélotes de se rendre pacifiquement afin de sauver autant de vies juives que possible. Les Zélotes refusèrent.

Ils anticipaient l'insurrection qui ne manquerait pas de se produire si les chefs juifs modérés étaient écoutés par le commun des mortels. En conséquence, les Zélotes et les fanatiques Sicaires les exécutèrent publiquement et pendirent leurs cadavres afin que tout le monde puisse voir les répercussions de la prédication des messages de paix des insurgés. Les chefs modérés présents à Jérusalem au début de la révolution, en 66 ap. J.-C., avaient tous été tués en 68, mais aucun d'entre eux par les agresseurs romains.

Peu avant le siège de Jérusalem, une guerre civile éclata à Rome. Vespasien devint le nouvel empereur en 69 ap. J.-C., et Titus, le commandant en second de la guerre, prit les rênes. En 70 ap. J.-C., les Romains étaient aux portes de Jérusalem et en assiégeaient les murailles.

Une fois que la panique s'était emparée de la ville, il n'y eut plus moyen de faire marche arrière. Les Zélotes savaient que, malgré leurs efforts, le flot constant d'opinions différentes exprimées par les différentes factions du peuple juif gênait le leadership zélote dans la ville. Ils voulaient une guerre totale au lieu de la guerre d'usure que certains avaient programmée. Les Zélotes, menés par Jean de Gischala, décidèrent d'inciter la population à participer à la révolution en brûlant les récoltes et les aliments séchés que les Sadducéens et les Pharisiens avaient stockés en prévision du siège romain.

Cela fonctionna dans une certaine mesure. Selon Josèphe, près d'un million de Juifs des deux sexes, y compris des enfants, s'engagèrent pour défendre la ville après l'incendie des denrées alimentaires. Mais cela eut aussi des conséquences désastreuses. Les citadins et les soldats moururent de faim. Ceux qui survécurent à la faim souffrirent de malnutrition.

Au fil des jours, l'armée romaine admit que le seul moyen de reconquérir la ville était d'établir un camp juste à l'extérieur des murs. C'était une méthode de combat à distance. Tous ceux qui tentaient de s'échapper de la ville étaient crucifiés et placés soit sur une croix, soit sur un mur faisant face à la ville. Terrifiée, la population juive à l'intérieur des murs savait qu'elle devait se battre ou courir le risque de mourir de la manière la plus irrespectueuse qui soit.

Attaque de Jérusalem

Finalement, après une bataille de sept mois, les Romains avaient suffisamment endommagé les murs de la ville pour pouvoir y faire une brèche. Au cours de l'été 70 ap. J.-C., les soldats romains pénètrèrent dans la ville. La supériorité militaire était évidente alors que les Romains forçaient les Zélotes à se battre dans les rues. Les Romains détruisirent et brûlèrent la ville et massacrèrent le peuple juif sur leur passage.

Les Zélotes et les Sicaires se retirèrent dans le Temple. La légion romaine, après plusieurs tentatives pour percer les murs, mit le feu au Temple sacré. Le site qui avait donné de l'espoir à des milliers de Juifs fut détruit. Il semblait que Dieu n'était plus dans la ville. Ce fut le pire coup porté par les Romains à la Judée. Le reste de la ville fut pillé et incendié peu après la chute du Temple. Les Romains écrasèrent le reste de la résistance juive assiégée. En septembre 70 ap. J.-C., Jérusalem était entièrement sous contrôle romain.

Résultat de la Grande Révolte

Selon Josèphe, plus d'un million de Juifs furent tués. Des Juifs furent vendus comme esclaves, et beaucoup furent ramenés à Rome. 70 000 esclaves juifs construisirent le Collisée de Rome. En Judée, le Temple détruit ne fut jamais reconstruit, ce qui donna naissance à une nouvelle forme de Judaïsme: Le Judaïsme rabbinique. Les rabbins étaient désormais au centre de la religion, prenant le relais du grand prêtre. La synagogue devint le centre de la vie juive et, avec la diaspora, la Torah devint la source de connaissances la plus précieuse pour le peuple juif.

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Bibliographie

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Traducteur

Jerome Couturier
Je suis médecin, spécialisé en Génétique. J'aime l'Histoire et l'Antiquité depuis mon plus jeune âge. J'ai toujours eu un interêt pour la recherche dans divers domaines scientifiques, dont l'archéologie.

Auteur

Harry Oates
Je m'appelle Harry Oates, j'ai récemment obtenu un diplôme avec 2.1 de l'Université de Southampton. J'ai étudié avec énergie l'ancienne Palestine, depuis la société juive entre 200 et 60 av. J.-C., et les origines du Christianisme jusqu'à la montée de l'Islam.

Citer cette ressource

Style APA

Oates, H. (2015, août 28). Grande Révolte Juive [The Great Jewish Revolt of 66 CE]. (J. Couturier, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-823/grande-revolte-juive/

Style Chicago

Oates, Harry. "Grande Révolte Juive." Traduit par Jerome Couturier. World History Encyclopedia. modifié le août 28, 2015. https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-823/grande-revolte-juive/.

Style MLA

Oates, Harry. "Grande Révolte Juive." Traduit par Jerome Couturier. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 28 août 2015. Web. 26 avril 2024.

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