Drust Ier

Définition

Joshua J. Mark
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 19 décembre 2014
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Disponible dans ces autres langues: anglais
Pictish Warrior with Drinking Horn (by Kim Traynor, CC BY-SA)
Guerrier Picte buvant d'une corne
Kim Traynor (CC BY-SA)

Drust Ier (également connu sous le nom de Drest mac Erip) était un des premiers rois des Pictes connu sous le nom de "Roi des cent batailles", bataille au cours desquelles il aurait été victorieux. Son règne est donné comme suit : 406-451 de notre ère ou 413-451 ou 424-451 ou bien 432-451 ou encore 424-453, et sa durée de vie comme étant de 407-478 de notre ère, selon les sources primaires que l'on accepte. Les Pictes eux-mêmes n'ont laissé aucune trace écrite de leur histoire, mais seulement des pierres taillées ou des pierres in situ, gravées d'images. Leur histoire, et même la liste de leurs rois, furent donc écrites par les Romains et, plus tard, par des historiens écossais et anglais. C'est sous le règne de Drust Ier que le christianisme fut introduit pour la première fois chez les Pictes par saint Ninian (360-432 de notre ère), arrivé pour la première fois dans la région en 397 de notre ère (bien que cette date soit contestée). Il a également été rapporté que c'est au cours de la dix-neuvième année du règne de Drust Ier que saint Patrick quitta l'Écosse pour l'Irlande, soit en 432 de notre ère, ce qui plaide en faveur d'une date de 413 pour le début de son règne, et de 451 pour sa mort. Il s'agit très probablement de la date correcte du règne de Drust Ier, mais ce n'est en aucun cas une certitude.

Les auteurs des premières chroniques s'intéressaient avant tout à la datation du succès des missions chrétiennes en Grande-Bretagne du Nord, et non à l'histoire des Pictes, et leurs ouvrages ne mentionnent Drust Ier que comme moyen d'établir quand tel ou tel missionnaire était à l'œuvre dans telle ou telle région. L'historien Stuart McHardy a fait remarquer qu'il faut être prudent lorsqu'on accepte sans réserve les sources anciennes sur l'histoire picte, car aucune de ces histoires ne fut écrite par le peuple lui-même et, en général, ces sources citent les Pictes comme un moyen d'atteindre leurs propres objectifs narratifs. Il écrit : "Comme nous n'avons pas de documents littéraires pictes contemporains, nous sommes constamment obligés de traiter des documents qui doivent être traités avec précaution. Le truisme selon lequel l'histoire est écrite par les vainqueurs pourrait être mieux exprimé en disant que l'histoire est réécrite par les vainqueurs" (118). On ne sait pas si Drust Ier accueillit les missionnaires chrétiens chez les Pictes ou s'il leur résista, et les preuves de conflits ultérieurs entre les Pictes essayant de maintenir leurs croyances traditionnelles et les missionnaires chrétiens n'éclairent pas la période du règne de Drust Ier.

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Drust Ier semble avoir été le premier roi picte à étendre son royaume à tout le nord de la Grande-Bretagne, au lieu de se contenter de régner sur des terres tribales.

Rôle du chef et avènement de la royauté

Les Pictes vivaient dans de petites communautés composées de familles appartenant à un seul clan (appelé "kin"), présidé par un chef de tribu. Ces clans étaient connus sous les noms de Caerini, Cornavii, Lugii, Smertae, Decantae, Carnonacae, Caledones, Selgovae et Votadini (McHardy, 31). Ces clans se disputaient souvent le bétail, mais s'unissaient lorsqu'ils étaient menacés par un ennemi commun et élisaient un chef unique pour diriger la coalition. Les kin (mot gaélique signifiant "enfants") continuaient à suivre et à protéger leur chef, mais ce dernier obéissait au guerrier que tous avaient désigné comme chef du groupe. En ce qui concerne le rôle du chef, les historiens Peter et Fiona Somerset Fry écrivent:

Le chef de la famille était un homme très puissant. Il était considéré comme le père de tous les membres de la famille, même s'il n'était qu'un cousin éloigné pour la plupart d'entre eux. Il s'assurait leur loyauté: il avait des droits de propriété sur leurs terres, leur bétail; leurs possessions étaient en quelque sorte les siennes. Ses querelles les impliquaient et ils devaient y prendre part, jusqu'à y laisser leur vie (33).

Le rôle du chef et la façon dont les Pictes mettaient de côté leurs différences tribales en cas de menace extérieure sont illustrés pour la première fois par le récit de l'écrivain romain Tacite de la bataille du Mont Graupius en 83 de notre ère entre les forces romaines d'Agricola et les Pictes réunis autour du chef calédonien Calgacos. En 79/80 de notre ère, Agricola envahit l'Écosse et s'avança jusqu'à une ligne située entre les rivières Clyde et Forth en 82 de notre ère. Après avoir établi des fortifications, il envahit le pays des Pictes en 83 de notre ère et fut accueilli par Calgacos lors d'une bataille au Mont Graupius.

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Tacite relata la bataille et, ce faisant, fut le premier à donner un compte rendu écrit de l'histoire de l'Écosse. C'est du récit de cette bataille par Tacite, et du célèbre discours de Calgacos à ses hommes, que provient la phrase "Où ils ont fait un désert, ils disent qu'ils ont donné la paix". Tacite n'appelle pas Calgacos un roi ou un chef, mais écrit : "Parmi les chefs, Calgacos se distinguait par sa bravoure et son lignage. Devant la foule qui s’agglutinait et réclamait le combat, il prit la parole.". McHardy note que Calgacos "semble avoir tenu son rôle en raison de son habileté plutôt qu'en raison d'un supposé droit de naissance particulier ou d'une position aristocratique". Cela se retrouve dans la société clanique ultérieure, où chaque clan avait son propre capitaine qui le menait au combat" (McHardy, 28). Le chef de clan et le système tribal changèrent sous l'influence du christianisme chez les Pictes et de l'avènement du royaume anglican de Northumbrie, gouverné par une monarchie.

Le christianisme modifia le système de gouvernement picte en remplaçant le système de succession matrilinéaire des Pictes (dans lequel la direction était assurée par la mère) par un système patrilinéaire, dans lequel le fils aîné succédait à son père. Cette évolution semble s'être produite lorsque la dévotion des Pictes à une déesse mère fut remplacée par le Dieu masculin patriarcal du christianisme. L'influence des Angles de Northumbrie sur les Pictes, en ce qui concerne le remplacement du chef de tribu par un monarque, serait liée à leurs incursions répétées sur les terres pictes, qui nécessitaient un leadership central fort sous la forme d'un roi de toutes les tribus régnant de manière cohérente au lieu de l'ancien système de nombreux chefs de tribus qui se regroupaient sous un seul chef en cas de besoin. Bien que l'on ne sache pas exactement pourquoi les Pictes ressentirent le besoin d'un gouvernement central, on pense qu'ils attribuèrent l'efficacité des conquêtes des Northumbriens à leurs rois et qu'ils cherchèrent donc à protéger leurs terres en reproduisant la forme de gouvernement de l'Angle (bien que cela soit loin d'être certain). Le premier roi des Pictes fut Gede, bien qu'aucune année ne soit donnée pour son règne, mais à l'époque de Drust Ier, la royauté semble être devenue une position acceptée parmi les Pictes, puisqu'elle est mentionnée par les anciens chroniqueurs sans commentaire ni explication.

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Règne de Drust Ier

On sait très peu de choses sur le règne de Drust Ier. Il est mentionné dans un certain nombre d'histoires anciennes, dont La Chronique picte un ouvrage d'histoire picte écrit par un auteur inconnu et datant du règne de Kenneth II d'Écosse (971-995). En ce qui concerne la mention de Drust Ier dans les Chroniques, l'historien Thomas Innes, du XIXe siècle, écrit : "Les anciens registres de St: Drust ou Durst, fil. Urb ou Irb, 100 an. vixit, and 100 bella peregit', ce qui signifie 'Drust fils d'Irb vécut 100 ans et livra 100 batailles'" (90). Innes conclut que le règne de Drust Ier commença en 406 de notre ère et se termina en 451, en se basant sur des informations provenant de sources qu'il ne fournit pas. Il écrit ensuite:

D'après ce calcul, il apparaît que c'est sous le règne de ce Drust (Durst) que l'Évangile fut prêché pour la première fois aux Pictes par saint Ninian, au début du cinquième siècle, puis par saint Palladius et saint Patrick aux Écossais et aux Irlandais, entre 430 et 440 après Jésus-Christ. C'est ainsi que se termine la première partie de l'abrégé de la Chronique picte, qui contient le récit de la succession de leurs rois à l'époque de l'ignorance qui précéda leur conversion au christianisme, lorsque, semble-t-il, ils reçurent pour la première fois l'usage des lettres (90).

Outre le fait qu'il fait tout simplement partie du récit chrétien de la conversion des Pictes, Drust Ier semble avoir été un formidable chef militaire et un roi efficace pour son peuple. En 1794, l'historien John Pinkerton, dans son ouvrage An Enquiry Into the History of Scotland Preceeding the Reign of Malcolm III or the Year 1056, note que Drust était bien connu pour les batailles qu'il avait livrées et pour son dévouement à la liberté de son peuple. Les "100 batailles" mentionnées par Innes, et d'autres, semblent avoir été des engagements offensifs visant à éloigner les tribus du sud des terres des Pictes; des campagnes agressives visant à maintenir ou à étendre le territoire picte face aux empiètements des Angles, des Britanniques et des Écossais. Pinkerton mentionne les Romains dans son récit et semble suivre la même source qu'Innes dans son ouvrage de 1879 concernant la durée approximative du règne de Drust Ier. C'est Pinkerton qui fixe le début du règne de Drust Ier à 413 de notre ère, en se basant sur l'année où saint Patrick quitta l'Écosse pour l'Irlande (432 de notre ère, soit la 19e année du règne de Drust Ier). Les Romains ayant quitté la Grande-Bretagne en 410 de notre ère et ayant abandonné depuis longtemps leurs tentatives de conquête des terres septentrionales des Pictes, il semble peu probable que le roi Drust Ier des Pictes ait eu des contacts avec les légions romaines. Cependant, comme pour la majeure partie de la vie de Drust Ier, ce fait est aussi incertain que les dates de son règne.

S'appuyant sur les anciennes Chroniques et Annales, Pinkerton écrit:

La monarchie picte, autrefois confinée aux îles Hebud [les Hébrides], se répandit peu à peu dans le nord-ouest du Pictland, l'Écosse actuelle, et Drust, qui commença cette série, semble avoir employé une partie de ses batailles à l'étendre à l'ensemble du Pictland. En effet, au siècle suivant, Bède mentionne Brude II comme roi de tous les Pictes, sans que l'on sache si ce titre était nouveau. Le règne de Drust est remarquable et illustre à bien des égards : le christianisme se répandit parmi les Pictes du Sud à son époque ou juste avant, on lui attribue une centaine de batailles, les incursions fréquentes des Pictes et leur mainmise sur Valentia lorsque les Romains quittèrent l'île. L'épithète de "Grand" semble donc lui être due, mais elle est souvent donnée avec moins de raison... La Chronique Picte dit que c'est au cours de la xix [19e] année du règne de Drust que Saint Patrick se rendit en Irlande. Usher [un autre historien] montre que c'est en 432 que cet événement eut lieu, ce qui constitue une date fixe pour le début de ce règne [413]. On dit que Drust livra cent batailles, c'est-à-dire un grand nombre ; beaucoup d'entre elles peut-être pour établir son autorité sur les Pictes du Sud et beaucoup, sans doute, contre les Bretons et les Romains, ces derniers abandonnant l'île. (295).

Drust Ier semble donc avoir été le premier roi picte à étendre son royaume à l'ensemble de la Grande-Bretagne septentrionale, contrairement aux chefs antérieurs, puis aux rois, qui semblent s'être contentés de régner sur leurs terres tribales. L'artiste et historien des Pictes, Ronald W. Henderson, de Perth, en Écosse, note que "nous n'avons aucune information [sur les rois précédant Drust Ier] en dehors de leur nom et de la durée supposée de leur règne... d'autres auteurs ont fait diverses suggestions quant à leur signification, mais la plupart du temps sans grand succès. les noms sont tout simplement trop obscurs" (22). Drust Ier est donc le premier roi suffisamment remarquable pour avoir fait l'objet d'un écrit.

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Henderson date la naissance de Drust I en 407 de notre ère, "au moment où les Romains quittaient la Grande-Bretagne" et le décrit comme un homme qui "est probablement devenu une légende de son vivant... Véritable chef, il prit le contrôle pendant les perturbations qui suivirent [l'évacuation romaine] et unit tous les Pictes du Sud sous sa bannière (qui représentait probablement un sanglier), et on pense qu'il établit des ports sûrs pour protéger sa côte de l'invasion des Britanniques" (22). Henderson poursuit:

Ce que l'on pense être son fort, connu sous le nom de Trusty's (i.e. Drust's) Hill, se trouve à Anwoth près de Gatehouse of Fleet dans le Galloway au sud-ouest de l'Écosse. Les ruines de ce fort existent toujours, ainsi que des symboles pictes comprenant un double disque et une baguette en Z, un serpent de mer, un symbole géométrique qui semblerait ressembler à un poignard, et ce qui semble être une tête d'insecte, tous gravés sur un affleurement rocheux près de l'entrée du fort (22).

Selon Henderson, une autre preuve du règne de Drust Ier est la source d'eau douce Katie Thirsty Well, au sud d'Abnernethy, en Écosse. Henderson souligne que le puits ne s'appelle pas "Katie's Thirst Well" ni "Katie Thirsty's Well" mais Katie Thirsty Well et soutient que l'origine du nom vient de Sainte Catherine d'Alexandrie (qui fut martyrisée) associée à une corruption du nom de Drust, "Trusty" (comme pour "Trusty's Hill") pour devenir "Thirsty". Henderson rejette donc l'histoire plus connue de l'origine du nom, selon laquelle une servante nommée Katie Thirsty utilisait régulièrement le puits pour aller chercher de l'eau pour sa maîtresse, Lady Miller, pour un alambic illégal qu'elle possédait. La probabilité que Henderson ait raison est renforcée par la corrélation connue entre les noms "Drust", "Drustan" et "Trust", "Trustan" et "Tristran"/"Tristram". Comme Trusty's Hill est identifié à Drust Ier, il en va de même pour le puits qui, à l'origine, aurait pu s'appeler Katherine's Well ou Drust's Well avant que les noms ne soient combinés en Katie et Drust's Well pour finalement devenir Katie Thirsty Well (puits de Katie assoiffée).

L'importance de Drust Ier dans l'histoire picte est attestée par le nombre de fois où son nom apparaît dans les chroniques ultérieures en tant que "roi des cent batailles" et, comme nous l'avons vu, par son succès dans l'expansion du territoire des Pictes. Malheureusement, les historiens anciens qui n'utilisaient pas le règne de Drust comme un repère pour les efforts missionnaires chrétiens, ont soit écrit en pensant que Drust Ier était suffisamment célèbre pour ne pas avoir besoin d'élaborer sur son règne, soit cette documentation a été perdue. Selon Henderson, la date de décès de Drust Ier est 478 de notre ère, soit beaucoup plus tard que la date de naissance généralement donnée (tout comme la date de naissance de 407 de notre ère) et cette divergence illustre la difficulté de faire des affirmations définitives sur le règne du roi Drust Ier, si ce n'est qu'il était connu pour la durée de sa vie et ses nombreuses victoires militaires.

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Bien que, comme nous l'avons vu, il soit presque toujours cité comme le roi sous lequel le christianisme arriva chez les Pictes, on affirme également que cet événement se produisit avant ou après son règne. Après la mort de Drust Ier, le pouvoir passa à Tholarg, fils d'Anile, puis à Nechtan Morbet, fils d'Irb (très probablement le frère cadet de Drust Ier), et Nechtan est également considéré comme le roi qui accueillit les missionnaires chrétiens. Le règne de Nechtan, vers 485 de notre ère, est toutefois trop tardif pour l'œuvre missionnaire de saint Ninian et trop précoce pour celle de saint Colomba. Bien qu'il y ait certainement eu des chrétiens à l'œuvre pour évangéliser la population entre Ninien et Colomba, ces deux-là sont les plus connus et les plus souvent cités en conjonction avec d'autres événements afin d'enregistrer leurs succès. Il est donc probable - mais pas certain - que ce sont les efforts de Ninian sous Drust Ier qui amenèrent le christianisme aux Pictes. Quoi qu'il en soit, Drust Ier des Pictes est depuis longtemps reconnu comme un personnage militaire et politique important de l'Écosse du Ve siècle, même si les détails de ses victoires et de ses réalisations ont été perdus dans le temps.

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Joshua J. Mark
Auteur indépendant et ex-Professeur de Philosophie à temps partiel au Marist College de New York, Joshua J. Mark a vécu en Grèce et en Allemagne, et a voyagé à travers l'Égypte. Il a enseigné l'histoire, l'écriture, la littérature et la philosophie au niveau universitaire.

Citer cette ressource

Style APA

Mark, J. J. (2014, décembre 19). Drust Ier [Drust I]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-13475/drust-ier/

Style Chicago

Mark, Joshua J.. "Drust Ier." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le décembre 19, 2014. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-13475/drust-ier/.

Style MLA

Mark, Joshua J.. "Drust Ier." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 19 déc. 2014. Web. 27 avril 2024.

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