Cathédrale de Faras

Définition

Mark Cartwright
de , traduit par Nancy Na
publié le 05 avril 2019
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Disponible dans ces autres langues: anglais
Archangel Michael Fresco, Faras (by Muzeum Cyfrowe MNW, Public Domain)
Fresque de l'archange Michel, Faras
Muzeum Cyfrowe MNW (Public Domain)

La Cathédrale de Faras, une ville de la Nubie ancienne et autrefois capitale du royaume de Faras (la Nobatie), fut construite et reconstruite du VIIIe au XIe siècle ap. J.-C. Son intérieur était décoré de centaines de fresques qui comptent parmi les plus beaux exemples de l’art paléochrétien visible au monde. Comme le site est désormais au fond du lac Nasser, tout ce qui reste de cette autrefois grande ville sont les œuvres d'art et les objets qui furent sauvés pour la postérité avant 1964.

Aperçu historique

Faras (ou Pachoras) était une ville située sur le Nil (avant la 2e cataracte), près de la frontière de l'Égypte et du Soudan actuels, dans la région connue sous le nom de Nubie dans l'Antiquité. Forte d'une longue histoire, la ville fut fondée entre 2040 et 1750 av. J.-C. et devint un important centre de commerce et centre religieux d'abord dans l'Empire égyptien, puis dans le royaume de Koush (c.1600 av. J.-C.) jusqu'au milieu du IVe siècle ap. J.-C. Vers 350 ap. J.-C., Faras devint la capitale du nouveau royaume de ce nom, également connu sous le nom de Royaume de Nobatie ou Nobadia.

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Des piliers en brique soutenaient autrefois un toit complexe comportant un grand dôme central et des dômes plus petits au-dessus des quatre allées.

Faras adopta le christianisme vers 543 à la suite d'une mission originellement envoyée par l'empereur byzantin Justinien Ier (r. de 527 à 565), qui voyagea à travers l'Égypte, alors chrétienne.. Cependant, il y a avait déjà des missionnaires chrétiens dans le royaume avant, et la date précise de l'adoption officielle de la religion n'est pas connue. Des tombes indiquent aussi que certaines pratiques préchrétiennes continuèent à être poursuivies jusque dans l'ère chrétienne de la Nubie. Environ un siècle plus tard, le royaume adopta la doctrine monophysite du christianisme suite à l'influence du royaume chrétien d'Axoum (alias Aksoum, en Éthiopie actuelle, IIIe-VIe siècle ap. J.-C.). Faras était le siège d'un évêque qui conseillait le roi et aurait eu une certaine influence sur le gouvernement.

L'ancien royaume nubien de Dongola (aussi connu sous le nom de Makurie qui prospéra du VIe au XIVe siècle ap. J.-C.) absorba les petits royaumes chrétiens voisins de Faras, situés au nord, et peut-être aussi l'Alodie au sud, formant un État unifié à la fin du VIIe siècle. L’unification était probablement une réponse à la menace croissante des États musulmans d’Afrique du Nord, notamment de l’Égypte. Une longue période de paix et de prospérité relative avait cependant suivi la signature d'un pacte de non-agression entre Dongola et l'Égypte vers 652. La paix prit finalement fin lorsque les Mamelouks d'Égypte (1250-1517) attaquèrent le royaume en 1276. En 1315, un dirigeant fantoche musulman fut installé en ancienne Dongola par les Mamelouks. Les Nubiens furent ensuite attaqués par les Arabes nomades Juhayna qui envahirent le Soudan depuis le nord de l'Égypte au XIVe siècle.

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Faras Cathedral Model
Maquette de la cathédrale de Faras
Piotr Ligier (CC BY-SA)

Après plusieurs siècles de marasme historique, Faras attira de nouveau l'attention internationale grâce aux excavations archéologiques de certaines parties de la ville au début des années 1960. Hélas, juste au moment où Faras semblait pouvoir grandement contribuer à notre connaissance de l'ancienne Nubie, la plus grande tragédie de la ville se produisit. En 1964, Faras et ses environs furent délibérément submergés par la montée du lac Nasser, suite à la gestion du Nil par le gouvernement égyptien. Heureusement, tout ne fut pas perdu.

Cathédrale de Faras - L'architecture

La cathédrale de Faras fut excavée des sables du désert nubien au cours de quatre saisons, de 1961 à 1964, par une équipe archéologique polonaise qui réussit à y pénétrer avec leurs truelles et leurs pelles juste avant que toute la zone ne soit inondée. Ce qui ressemblait d'abord à une forteresse était une grande cathédrale chrétienne avec deux chapelles latérales. La structure, avec de nombreuses similitudes avec la basilique byzantine standard, fut construite en 707 sur les ruines d'un palais lui-même construit au-dessus d'une église chrétienne du IVe siècle. Ces couches d'histoire furent confirmées par des inscriptions sur deux pierres bases, l'une écrite en copte et l'autre en grec. La cathédrale fut attribuée au cinquième évêque de Faras, Paulos, et au roi Mercure de Dongola (r. à partir de 697), qui avait unifié les trois royaumes chrétiens en Nubie. La nouvelle structure fut construite en utilisant une combinaison de poutres supports en pierres, en briques cuites et en bois. Le toit était plat et en bois.

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Puis, vers 900, la cathédrale fut replâtrée et, vers l'an 1000, elle fut reconstruite, peut-être après qu'un incendie eut détruit le toit. Une nouvelle église fut utilisée à proximité pendant que la cathédrale était en réparation. La nouvelle version de la cathédrale utilisait beaucoup plus de briques de terre cuite, un matériau bien plus polyvalent. Par conséquent, les colonnes de granit furent remplacées par des piliers en brique qui supportaient désormais un toit beaucoup plus complexe comportant un grand dôme central et des dômes plus petits au-dessus des quatre bas-côtés ainsi que de nombreux plafonds voûtés. La cathédrale avait un plan d'étage représentant une grande croix centrale sur un carré. La conception fut sans doute un peu trop ambitieuse, car en 1169, la voûte en berceau de la nef s'effondra, ou bien elle fut peut-être délibérément attaquée. Curieusement, les dégâts ne furent jamais réparés et la nef fut simplement bouclée tandis que le reste de la cathédrale resta en service. Lors des fouilles de la cathédrale, la majeure partie du toit s'était effondrée.

Les fresques

Les intérieurs de beaucoup de bâtiments et surtout des églises dans les royaumes chrétiens de Nubie étaient peints de grandes fresques, mais ce sont celles qui furent ajoutées à l'intérieur de la cathédrale de Faras qui comptent parmi les plus belles. Outre de grandes fresques couvrant des murs entiers, la cathédrale comptait aussi fièrement 120 panneaux peints plus petits.

Bishop Marianos & Mary, Faras Cathedral
L'évêque Marianos et Marie, la cathédrale de Faras
LeGabrie (CC BY-SA)

Les peintures furent toutes réalisées en utilisant la technique «fresco secco»; elles furent donc peintes sur plusieurs couches de plâtre déjà séchées. Elles sont multicolores, avec des teintes de violet prédominant les oeuvres antérieures. Les fresques survivantes de la première version de la cathédrale présentent certaines caractéristiques communes, similaires aux peintures coptes vues à Alexandrie contemporaine, comme des personnages avec de très grands yeux, des têtes un peu carrées et des lignes épaisses utilisées sur les visages. Les peintures réalisées au IXe siècle utilisent principalement du blanc, tandis que le rouge orangé est la couleur la plus commune dans les fresques du Xe siècle.

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comme Pour nous rappeler que la cathédrale faisait partie intégrante de la vie quotidienne de la communauté, les murs présentent de nombreux exemples de graffitis anciens.

Les fresques montrent des scènes de l'Ancien et du Nouveau Testament et des portraits de dignitaires locaux. De nombreux évêques de Faras sont représentés, et souvent, leurs noms sont utilement indiqués. En les comparant avec d'autres documents tels que des pierres tombales, on peut dater les fresques. La découverte d'une liste complète de 27 évêques avec leurs noms et dates de règne peints dans le coin sud-est de la cathédrale fut encore plus utile aux historiens. Les chapelles avaient des peintures murales de l'archange Michel et de Sainte Marie, il y a des représentations des saints, notamment trois importants pour Antioche, et deux personnages somptueusement couronnés représentant la Vierge Marie et la mère d'un roi de Faras de la fin du XIe siècle, qui est appelée Marthe la Reine Mère. Marie tient l'enfant Jésus et pose sa main de manière protectrice sur l'épaule de Marthe.

Tous les Nubiens sont représentés avec une peau foncée, tandis que des personnages comme la Vierge Marie ont la peau claire. Les vêtements reçoivent un traitement particulièrement détaillé dans de nombreuses scènes. Toutes les fresques présentent une forte influence byzantine-copte, non seulement dans le style artistique, mais aussi dans les vêtements que portent les gens, qui sont richement brodés et remplis de perles et de bijoux, comme on le voit si souvent dans l'art byzantin.

Nativity Scene, Faras Cathedral
Scène de la Nativité, cathédrale de Faras
CJ Matulewicz (CC BY-SA)

Un mur entier porte une scène de la Nativité, datant des Xe et XIe siècles, avec Marie vêtue d'une longue robe sombre, allongée sur ce qui semble être une chaise longue. L'historien de l'art P. Garlake décrit en détail l'importance artistique de cette remarquable fresque de Faras, qui est aussi la plus grande peinture murale nubienne connue :

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La Nativité dans la cathédrale de Faras marque le plus haut niveau d'accomplissement dans l'art chrétien nubien. Elle était la modèle pour de nombreuses autres madones. Les couleurs, notamment des vêtements, sont audacieuses. Les différents sujets sont peints comme des éléments distincts dans une composition libre. On dit que la crèche en forme d'autel dérive des peintures de Jérusalem. C'est l'un des rares cas dans l'art chrétien où les bergers sont nommés (Arnias et Lekotes); et les mages préfèrent les chevaux aux chameaux conventionnels, faisant ainsi écho à l'histoire d'amour millénaire de la Nubie avec ses chevaux. (69)

Enfin, outre les œuvres d'art, et comme pour nous rappeller que la cathédrale faisait partie intégrante de la vie quotidienne de la communauté, les murs ont également révélé de nombreux exemples de graffitis anciens. Ces lignes isolées, qui sont le plus souvent des prières ou un appel à Dieu pour qu'il aide une personne donnée, sont écrites dans les trois langues utilisées dans le royaume : le copte, le grec et le vieux nubien.

Une fois excavé des sables nubiens, une équipe de spécialistes de la conservation du Musée national de Varsovie reçurent la tâche de sauver et de préserver ces chefs-d'œuvre de l'art paléochrétien. Les fresques furent retirées des murs autant que possible et méticuleusement nettoyées de la saleté et les peintures fragiles furent restaurées avec des adhésifs. Fixées sur un nouveau support, les fresques purent alors à nouveau être exposées à la verticale. Ces fenêtres sur le passé chrétien de l'Afrique de l'Est sont aujourd'hui visibles dans divers musées, mais principalement au Musée national soudanais de Khartoum et à la galerie Faras du Musée national polonais de Varsovie.

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Traducteur

Nancy Na
Passionnée d'histoire et écrivaine amatrice avec un amour particulier pour le monde antique et médiéval.

Auteur

Mark Cartwright
Mark est un auteur, chercheur, historien et éditeur à plein temps. Il s'intéresse particulièrement à l'art, à l'architecture et à la découverte des idées que toutes les civilisations peuvent nous offrir. Il est titulaire d'un Master en Philosophie politique et est le Directeur de Publication de WHE.

Citer cette ressource

Style APA

Cartwright, M. (2019, avril 05). Cathédrale de Faras [Faras Cathedral]. (N. Na, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-18081/cathedrale-de-faras/

Style Chicago

Cartwright, Mark. "Cathédrale de Faras." Traduit par Nancy Na. World History Encyclopedia. modifié le avril 05, 2019. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-18081/cathedrale-de-faras/.

Style MLA

Cartwright, Mark. "Cathédrale de Faras." Traduit par Nancy Na. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 05 avril 2019. Web. 27 avril 2024.

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