Une histoire de fantôme teton est un conte du peuple autochtone Teton (Titunwan) des Oceti Sakowin (peuple des sept feux du conseil), mieux connu sous le nom de Sioux, sur l'une des possibilités de l'état de l'âme après la mort et sur la façon dont les vivants pourraient interagir avec un tel esprit.
Ce n'est qu'une des nombreuses histoires de fantômes amérindiennes et, comme les autres, elle peut faire l'objet de plusieurs interprétations. Les Sioux ne craignaient pas les esprits des morts comme d'autres nations (telles que les Navajos), mais comprenaient le danger potentiel qu'il y avait à interagir avec eux. En effet, les morts, que l'on croyait omniscients, pouvaient transmettre aux vivants des connaissances qu'ils n'auraient pas dû avoir ou, peut-être, les conduire au pays des morts, provoquer des maladies qui conduisaient à la mort ou, si l'esprit était particulièrement en colère et puissant, apporter le malheur à toute la communauté.
Dans cette histoire, un jeune chasseur teton rencontre le fantôme d'une jeune femme qui l'éloigne de son village et de son intention première d'épouser la fille du chef, et il la suit jusqu'à ce qu'il ne devienne lui-même un fantôme. La question de savoir si cette rencontre a été bonne ou mauvaise pour le chasseur dépend de l'interprétation que l'on fait de la suite de sa vie, mais si l'on se réfère à la conception autochtone commune de la valeur de la communauté par rapport aux souhaits ou aux désirs de l'individu, on peut considérer que cette rencontrea été malheureuse dans la mesure où le village a perdu un chasseur prometteur et la fille du chef, un mari potentiel. Dans le même temps, l'histoire aurait pu servir de consolation aux personnes de l'auditoire qui avaient perdu des êtres chers mais n'avaient jamais pu retrouver leur corps ou faire le deuil de cette perte.
Les Sioux Teton
La nation aujourd'hui connue des non-autochtones sous le nom de Sioux se nomme elle-même Oceti Sakowin ou Oceti Sakowin Oyate (peuple de la nation des sept feux du conseil) et se compose à l'origine de sept nations autochtones distinctes :
- Mdewakanton
- Sisseton (aussi appelé Sistunwan)
- Teton (également appelée Titunwan)
- Wahpekute
- Wahpeton (aussi appelé Wahpetunwan)
- Yankton (aussi appelé Ihanktown)
- Yanktonai (aussi appelé Ihanktowana)
Le spécialiste Michael G. Johnson note:
[Les Sioux Teton] étaient les plus grands et les plus puissants des sept branches originelles des Indiens Dakota ou Sioux. En fait, ils étaient plus nombreux que les six autres tribus réunies. Ils sont devenus les Sioux de l'Ouest ou, dans leur propre dialecte, les Lakotas, à la suite de leur migration vers les Hautes Plaines à la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe siècle. (132)
Johnson note également que, pour les Sioux Teton, "l'enterrement était invariablement de type échafaudage funéraire", c'est-à-dire que le cadavre était élevé sur un lit funéraire soutenu par des poteaux pour lui permettre de se décomposer et de libérer l'esprit (ou les esprits) qui l'animait de son vivant. Le cadavre restait sur l'échafaudage à l'air libre jusqu'à ce que les animaux sauvages et les intempéries, ainsi que le temps, n'aient réduit le corps à l'état d'ossements. À ce moment-là, à moins que des rites spéciaux n'aient été accomplis, comme la conservation de l'âme par exemple, l'esprit du défunt se dirigeait vers le royaume des morts dans l'au-delà. Parfois, mais pas toujours, les morts étaient enfermés dans une loge ou une "maison" spéciale, mais le cadavre était souvent élevé sur un échafaudage funéraire.
L'au-delà et les fantômes
Les histoires de fantômes amérindiennes sont nées de la croyance que l'âme (ou, selon certains systèmes de croyances, les âmes) qui animait un être humain vivant survivait à la mort corporelle et continuait d'exister, soit autour du corps qu'elle avait habité (jusqu'à ce qu'il ne se décompose ou ne soit brûlé), soit dans les lieux qu'elle avait connus dans sa vie. La manière dont ces esprits étaient compris différait, souvent de manière significative, d'une nation à l'autre. Le spécialiste Larry J. Zimmerman commente:
Bien que les croyances sur la mort et les coutumes et rituels entourant le deuil varient d'un Autochtone à l'autre, certains thèmes communs se dégagent - par exemple, la plupart des groupes pensaient que les morts représentaient un danger pour les vivants et, par conséquent, les défunts étaient traités avec respect et prudence. Presque tous les peuples autochtones croyaient en un plan d'existence au-delà du royaume des vivants, mais les descriptions de la vie après la mort différaient grandement, et la question de savoir ce qu'il advenait de l'âme après la mort était très complexe pour de nombreuses tribus. (246)
Certaines nations, comme les Mandans, croient que chaque individu a plusieurs âmes, quatre pour eux, deux pour d'autres, et qu'au moins une de ces âmes reste autour du corps après la mort tandis que l'autre voyage dans l'au-delà et, selon certaines histoires, attend que la seconde âme ne la rejoigne. La vision de l'au-delà diffère d'une nation à l'autre comme tout autre aspect culturel et, pour certains, comme les Sioux, il peut s'agir d'une image miroir de la vie que l'on a connue sur terre, tandis que pour d'autres, il s'agit simplement d'une pause avant de se réincarner, et pour d'autres encore, d'un monde à l'envers où les rivières coulent à l'envers, où les gens parlent un charabia, et où les danses tournent dans le mauvais sens avec les mauvais pas. Quelle que soit la vision de l'au-delà qu'avait une communauté, il était - et est toujours - entendu que les morts y appartenaient, pas les vivants, et que les rencontres avec un esprit - sauf dans certaines circonstances - portaient malheur.
L'esprit d'un ancêtre ou d'un parent récemment décédé qui apparaissait dans un rêve ou une vision pour transmettre une information vitale, un conseil ou une orientation était toujours le bienvenu, mais rencontrer une apparition, en particulier celle d'une personne que l'on ne connaissait pas, portait généralement malheur, à moins qu'un accord ne soit conclu avec le fantôme.
L'homme qui lutta avec un fantôme
Dans le conte teton " L'homme qui lutta avec un fantôme", par exemple, un jeune guerrier chargé de tuer ses ennemis et de voler leurs chevaux rencontre deux fantômes dans les bois. Le premier est le fantôme d'une femme qui apparaît "comme jadis", portant des vêtements et des bijoux démodés, le visage caché par une robe en peau de bison (Jackson, 334). Le guerrier fait semblant d'être mort, et la fantôme lève son pied et le laisse tomber trois fois, comme pour s'en assurer, avant de sortir son couteau pour le couper. Lorsque le guerrier lui crie dessus, elle s'enfuit dans les bois et disparaît. Cet épisode illustre le type de danger que peut représenter un fantôme pour les vivants: il pourrait prendre un trophée pour le rapporter au monde des esprits.
La nuit suivante, le jeune guerrier rencontre le fantôme d'un homme qui lui demande de la nourriture. Le jeune homme dit qu'il n'en a pas, mais le fantôme sait qu'il ment - car les fantômes savent tout - et ils partagent donc un repas, puis fument la pipe du jeune homme en signe d'amitié et de communion. Lorsqu'ils ont terminé, le fantôme dit au guerrier qu'ils doivent lutter; si le jeune homme le bat, sa mission sera couronnée de succès, mais si le fantôme gagne, la mission échouera. Le guerrier vainc le fantôme et continue à tuer ses ennemis et à s'emparer de leurs chevaux. L'histoire se termine par la phrase suivante: "Tout s'est passé comme le fantôme l'avait dit". C'est pourquoi les gens croient ce que disent les fantômes" (Jackson, 335).
Aucun des deux épisodes n'est présenté comme une fantaisie ou un rêve, mais comme un événement réel, et les deux présentent une compréhension commune des fantômes. Dans le deuxième épisode, en établissant un lien avec l'esprit et en se soumettant à une épreuve de force spirituelle et physique, le jeune guerrier est assuré de réussir sa mission. Ici, le jeune homme répond à l'esprit par une interaction respectueuse, même s'il ment d'abord en disant qu'il n'a pas de nourriture, alors que, dans le cas du premier fantôme, en faisant semblant d'être mort, il rejette toute possibilité de ce genre.
L'histoire suggère que la première apparition aurait pu être causée par le fait que le jeune homme avait dressé un camp près du lieu de sépulture du corps de la femme fantôme, ce qui, associé à sa réponse à celle-ci, témoigne d'un manque de respect pour les morts, et il risque donc de perdre son pied comme trophée aux mains d'un fantôme en colère. Dans le deuxième épisode, cependant, le respect et la force dont il fait preuve sont récompensés par la prédiction de son succès. Il est donc possible d'interagir avec un fantôme et d'avoir de la chance, mais ce n'est pas souvent le cas et, en outre, ce qui constitue la "chance" dépend de l'interprétation que l'on fait de l'histoire.
Dans Une histoire de fantôme teton, l'interaction entre le jeune chasseur et le fantôme de la jeune femme n'a rien à voir avec l'une ou l'autre de ces situations. Le jeune chasseur rencontre le fantôme et, par la suite, sa vie n'est plus jamais la même. C'est au public de décider si cette vie est meilleure ou pire que celle qu'il aurait eue avant cette rencontre.
Le texte
Le texte suivant est une traduction du récit extrait de Voices of the Winds: Native American Legends (Légendes Indiennes Tome 1 : Les voix du vent) de Margot Edmonds et Ella Clark, tiré de la traduction de J. O. Dorsey du conte original des Tetons.
La tribu des Tetons était prospère et ses membres étaient en bonne santé et forts parce qu'ils mangeaient beaucoup de viande de bison. Habituellement, lorsqu'ils campaient pour la nuit, un crieur se rendait dans les huttes et lançait un appel:
"Il y aura beaucoup de bisons demain. Soyez sur le qui-vive!"
Un jour, après que les Tetons furent rentrés au camp après une dure chasse au bison, un jeune homme annonça qu'il souhaitait épouser la plus belle fille de la tribu, la fille du chef.
Son père lui dit: "Je ne te donnerai pas ma permission tant que tu ne m'auras pas amené beaucoup de chevaux." Le jeune Indien partit donc à la recherche de nombreux chevaux sauvages, dans l'espoir de plaire au chef et d'épouser sa jolie fille.
Pendant l'absence du jeune brave, sa tribu abandonna son campement habituel et s'installa ailleurs. Plus tard, le jeune Indien revint au camp abandonné avec plusieurs chevaux capturés. Comme il était tard dans la journée, il pensa s'abriter à proximité dans une hutte isolée.
Au début, il ne trouva pas de porte pour entrer dans la hutte, car les côtés étaient recouverts de tourbe jusqu'à mi-hauteur. Finalement, il réussit à entrer. À l'intérieur se trouvaient quatre hauts poteaux qui avaient été enfoncés dans le sol.
Les poteaux soutenaient une sorte de lit funéraire. Sur le lit reposait une femme dont les vêtements étaient ornés de dents d'élan. Elle tourna la tête en regardant le jeune brave teton. Il la reconnut immédiatement comme un membre de sa tribu, mais c'était une femme fantôme ! Ils restèrent là longtemps et elle devint sa femme.
Un jour, il se dit : "Je crois que je vais partir à la chasse au bison". Bien qu'il ne l'ait pas dit à haute voix, la Femme Fantôme connaissait ses pensées et lui dit: "Tu as faim de viande de bison? Monte à cheval et retourne sur les falaises.
"Quand tu arriveras au troupeau de bisons, fonce au milieu d'eux et tire sur le plus gros. Rapporte la peau et la viande de bison. Fais rôtir la viande et apporte m'en une part avant de manger la tienne."
Le jeune Indien teton partit et suivit les instructions de la femme fantôme. Lorsqu'il atteignit la vallée, il arriva devant un grand troupeau de bisons. Il chargea son cheval à toute vitesse au milieu d'eux et abattit le plus gros. Il l'écorcha et découpa la viande, transportant la robe et la viande sur son cheval. Il embrocha un gros morceau de viande et le fit rôtir jusqu'à ce qu'il soit suffisamment cuit, puis il l'apporta à la Femme Fantôme, qui se tenait au centre de la hutte.
Son mari fut surpris de la voir ainsi. Des rangées et des rangées de perles magnifiques décoraient ses vêtements de cuir. Sachant déjà ce que le jeune brave pensait, elle lui dit: "N'aie pas peur de moi, s'il te plaît!
À partir de ce moment-là, ils discutèrent librement et planifièrent ce qu'ils voulaient faire. Le jeune Indien courageux dit: "Pourquoi ne pas commencer notre vie ensemble comme l'ont fait nos parents lorsqu'ils se sont mariés pour la première fois?
Mais la femme fantôme répondit: "Non, non, cela ne marchera jamais, car nous devrons planter notre tente le jour et voyager la nuit." Le jeune homme courageux s'interrogea sur cet arrangement.
C'est ainsi qu'ils voyagèrent de nuit. La femme fantôme marchait devant, la tête couverte, sans dire un mot à son mari pendant le voyage. Ses jambes étaient invisibles. Elle ne faisait aucun bruit, flottant comme un fantôme.
Chaque fois que le jeune courageux indien teton pensait à quelque chose, la Femme Fantôme savait déjà ce qu'il avait en tête. C'est pourquoi les Indiens teton disent : "Méfiez-vous des fantômes, car les fantômes savent tout".
Ils disent que les fantômes savent quels vents soufflent et quand ils soufflent. Les fantômes savent quand il y aura de la neige. Les fantômes savent quand il y aura du tonnerre et des éclairs. Les fantômes sont heureux quand les vents soufflent, parce qu'ils peuvent flotter plus rapidement en voyageant d'un endroit à l'autre.
C'est ainsi que vécurent la Femme Fantôme teton et le jeune courageux teton. Les membres de leur tribu ne les retrouvèrent jamais. La fille du chef se demanda pourquoi son jeune brave n'était jamais revenu auprès d'elle.
Finalement, le jeune courageux devint lui aussi un fantôme teton, flottant avec la femme fantôme teton, chaque nuit et pour toujours.
Conclusion
La hutte que le jeune homme trouve est une forme de rite funéraire connue sous le nom de maison d'enterrement, dans lequel le corps est enterré dans une maison construite expressément à cet effet, bien que les morts aient également été enterrés sous le sol de la maison qu'ils avaient habitée. L'enterrement dans une hutte construite à dessein pour servir de tombeau comprend souvent aussi l'enterrement sur un échafaudage, où le cadavre est soulevé du sol sur une plate-forme soutenue par des poteaux, où il reste jusqu'à ce qu'il ne se décompose et que l'esprit ne le quitte pour se rendre dans l'au-delà. On pourrait dire que le jeune chasseur manque de respect à la tombe, mais l'histoire prend soin de noter que son peuple s'était déplacé pendant son absence et qu'il avait confondu la hutte d'enterrement avec une hutte commune dans laquelle il pourrait s'abriter.
Une fois à l'intérieur, il ne trouva pas un cadavre en décomposition sur l'échafaudage, mais une jeune femme de sa tribu dont il semble tomber instantanément amoureux "et elle devint sa femme". La femme-fantôme lui apprend à devenir un chasseur encore meilleur qu'il ne l'était auparavant et tous deux entament une vie de couple. L'histoire pourrait se terminer sur une note de "bonheur éternel", si ce n'est que le jeune chasseur brise plusieurs tabous de la culture teton. Il pénètre dans le lieu des morts sans l'autorisation ni même la connaissance du défunt, noue une relation avec un fantôme et déserte sa communauté pour suivre un fantôme. Cependant, au début de l'histoire, le jeune chasseur voulait une femme et, à la fin, il a une femme avec laquelle il reste "chaque nuit et pour toujours", ce qui suggère la nature éternelle de l'amour et de la fidélité.
L'histoire aurait pu être racontée pour avertir le public de ce qui pourrait arriver si l'on interagissait avec un fantôme, mais elle aurait pu aussi servir à consoler ceux qui avaient perdu quelqu'un et n'avaient aucune idée de ce qu'il était devenu. Un jeune homme ou une jeune femme qui avait quitté le village un jour pour chasser ou cueillir des herbes et qui n'était jamais revenu aurait pu mourir de bien des façons, mais si son corps n'avait jamais été découvert, ses survivants n'auraient pas pu faire leur deuil. Une histoire de fantôme teton aurait pu apporter cette conclusion en suggérant que la personne avait pu partir avec un fantôme qu'elle aimait et qu'elle suivait toujours cet esprit, qu'elle le chérissait et qu'elle serait toujours choyée par lui, fidèlement et éternellement.