Mithraïsme

Définition

Pierre A. Thomé
de , traduit par Caroline Martin
publié le 10 juin 2015
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Disponible dans ces autres langues: anglais, arabe, esperanto, persan, portugais, espagnol
Statue of tauroctony  (Mithras slaying the bull) (by Carole Raddato, CC BY-SA)
Statue de tauroctonie (Mithra terrassant le taureau)
Carole Raddato (CC BY-SA)

Les mystères mithriaques, également connus sous le nom de mithraïsme, étaient un culte à mystères du monde romain dont les adeptes vénéraient la divinité indo-iranienne Mithra (akkadien pour « contrat ») comme le dieu de l'amitié, du contrat et de l'ordre. Le culte apparut à la fin du 1er siècle ap. JC et il se répandit, à un rythme extraordinaire, de la péninsule italienne et des régions frontalières à l'ensemble de l'empire romain.

Le culte, comme beaucoup d'autres, était secret. Les fervents (c'est-à-dire les disciples du culte) vénéraient Mithra dans des temples souvent construits dans des grottes et cachés du public. Cela avait pour but de créer le sentiment de faire partie d'un groupe spécial, tout comme un groupe d'amis proches qui ne partagent pas de secrets avec les étrangers. Toutefois, le secret du culte était toléré par les autorités, notamment par les empereurs romains, car il favorisait le pouvoir impérial. Plus de 200 temples dédiés à Mithra ont été découverts, de la Syrie à la Grande-Bretagne, mais les découvertes se concentrent surtout en Italie, sur le Rhin et le Danube. Après la crise du 3e siècle ap. JC et l'instauration du christianisme, les mystères de Mithra perdirent de leur importance alors que les temples furent murés ou détruits par les chrétiens. Cependant, certains temples restèrent en activité jusqu'au début du 5e siècle ap. JC.

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L'ÉLÉMENT LE PLUS IMPORTANT DU MYTHE À L'ORIGINE DES MYSTÈRES MITHRIAQUES ÉTAIT LA MISE À MORT D'UN TAUREAU PAR MITHRA.

L'élément le plus important du mythe à l’origine des mystères mithriaques était la mise à mort d'un taureau par Mithra ; cette scène est également connue sous le nom de «tauroctonie». On croyait que de la mort du taureau - un animal souvent considéré comme un symbole de force et de fertilité - jaillissait une nouvelle vie. La renaissance était une idée essentielle dans le mythe des mystères mithriaques. Le sacrifice du taureau établissait un nouvel ordre cosmique et il était associé à la lune, elle aussi associée à la fertilité.

Le relief de Mithra

La particularité des mystères mithriaques réside dans sa visualité. Le sacrifice du taureau était représenté sur un relief en pierre qui occupait une place centrale dans presque tous les temples du culte. Sur ce relief, Mithra est souvent représenté en train de faire tomber l'animal au sol et de le tuer. Étant un dieu perse, Mithra porte ce que les Romains considéraient comme le «chic perse» typique : le bonnet et le pantalon phrygiens, que les Romains ne portaient pas. Environ 650 de ces reliefs en pierre ont été découverts, et ils sont tous étonnamment similaires.

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Dans un exemple typique, comme la célèbre sculpture du musée romain-germanique de Cologne, Mithra détourne le regard du taureau mourant, vers la lune. En outre, Mithra a quelques assistants qui l'aident à prendre la fertilité de l'animal : Un chien et un serpent boivent le sang du taureau, et un scorpion pique le scrotum du taureau. De plus, un corbeau est assis sur la queue de l'animal qui se termine généralement par des épis de céréales. Le corbeau pourrait avoir joué le rôle de médiateur entre Mithra et le dieu du soleil Sol Invictus («Soleil invaincu»), avec lequel Mithra partagera la viande du taureau.

Cult Relief of the Mithraic Mysteries
Relief du culte des mystères mithriaques
Marcuc Cyron (CC BY-NC-SA)

Le relief du sacrifice du taureau était généralement placé à l'extrémité du temple, qui était essentiellement construit comme une salle à manger romaine allongée - une allée flanquée de deux larges bancs surélevés. Cependant, le sacrifice de l'animal était rarement exécuté par les fidèles eux-mêmes. Les adorateurs imitaient la façon dont Mithra partageait la viande du taureau avec Sol, comme en témoignent les fragments de plats et les ossements d'animaux retrouvés dans ces temples. Du porc de haute qualité, du poulet et une grande quantité de vin étaient consommés lors de festins cultuels très animés qui reliaient les fidèles entre eux et à Mithra.

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Les sept degrés d'initiation

Les mystères mithriaques n'étaient cependant pas qu'une affaire de jeux et de divertissement. Il existait des règles strictes quant à l'organisation des fêtes, par exemple en matière d'hygiène. De plus, il y avait sept degrés d'initiation, allant de «corax» (corbeau) à «pater» (père), dont chacun avait son propre type de vêtement. Les autres degrés étaient «nymphus» (époux), «miles» (soldat), «leo» (lion), «perses» (persan) et «heliodromus» (émissaire du soleil). Chaque degré d'initiation avait une tâche différente à accomplir, par exemple, un «corbeau» devait porter la nourriture, tandis que les «lions» offraient des sacrifices au «père». Les initiés devaient également participer à des épreuves de courage. Les peintures du temple de Mithra à Santa Maria Capua Vetere nous montrent différentes scènes de ce rituel. Un initié, les yeux bandés et nu, est conduit à la cérémonie par un assistant. Ensuite, l'initié doit s'agenouiller devant le «père», qui tient une torche ou une épée sur son visage. Enfin, il est étendu sur le sol, comme s'il était mort. Il s'agissait probablement d'un «suicide» rituel au cours duquel l'initié était «tué» par une épée de théâtre non mortelle, puis il renaissait.

Mithraeum in Saarbrücken
Mithraeum à Saarbrücken
Anna16 (CC BY-SA)

D'autres éléments importants du culte étaient l'abnégation et la remise en question morale de soi. Par exemple, comme le raconte l'auteur chrétien Tertullien vers 200 ap. JC, une couronne était placée sur la tête de l'initié, qu'il devait rejeter en disant «Mithra est ma (vraie) couronne» (Tertullien, De corona milites 15). Cela aussi était considéré comme un rituel de réincarnation, qui marquait le début d'une nouvelle vie pour l'initié. Les premiers adeptes documentés de Mithra étaient des soldats et des officiers de l'armée romaine, mais avec la popularité croissante du culte, la majorité des fervents étaient des esclaves affranchis des villes. Les femmes, cependant, étaient exclues.

Pourquoi un soldat romain, ou n'importe qui d'autre, se donnerait-il tant de mal pour devenir membre d'un mystère de Mithra ? Premièrement, comme mentionné précédemment, le culte soutenait l'empereur, contrairement à d'autres cultes, comme les bacchanales. Deuxièmement, le culte était basé sur l'intérêt mutuel, l'amitié et l'intimité. Les temples n'accueillaient que de petits groupes. Il est compréhensible que les militaires aient été attirés par ces aspects qui garantissaient une certaine stabilité dans une profession autrement dangereuse.

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Débat sur les origines du Culte

Il existe trois points de vue différents sur la façon dont les mystères de Mithra devinrent un culte dans le monde romain et hellénistique. Les historiens romains et grecs des 2e et 3e siècles ap. JC pensaient que le culte était né «en Perse» ou «avec les Perses», et les premières recherches suivirent souvent cette interprétation. Cependant, les découvertes archéologiques ne corroborent pas ce point de vue : la plupart des temples mithriaques ont été découverts en Italie et dans les provinces du Danube, et non en Perse. Qui plus est, les reliefs cultuels représentant Mithra arborent ce que les Romains considéraient comme des vêtements typiquement orientaux, mais ils font preuve de peu d'originalité. Cela est comparable aux stéréotypes modernes selon lesquels tous les Allemands portent des pantalons de cuir, ou tous les Américains portent des chapeaux de cow-boy.

Head of Mithras
Tête de Mithra
Carole Raddato (CC BY-SA)

Une deuxième opinion est que le mithraïsme d'origine perse oriental se mélangea à la culture romaine-hellénique pour se transformer en une nouvelle forme de culte. Si cette théorie de la transformation est tentante, le problème reste que dans la région frontalière entre le monde romain-hellénique et le monde perse, où cette fusion aurait eu lieu, on trouve peu de traces du culte de Mithra.

Ces dernières années, une nouvelle théorie radicale a été établie, selon laquelle les mystères mithriaques ne virent pas le jour en Orient, mais en Italie. Le culte fut fondé par un inconnu, ou un «génie», qui emprunta quelques éléments au monde perse pour donner à ses mystères mithriaques une touche exotique. Le problème ici est que cette personne n'est jamais mentionnée comme le fondateur, même par ses fidèles, et qu'il n'y a aucune preuve pour soutenir la «théorie de l'invention» autre que le plus grand nombre de temples mithriaques en Italie, et leur absence dans d'autres régions. (Cf. Witschel 2013 : 209)

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En fin de compte, les sources sont trop peu nombreuses pour que l'on puisse formuler une explication certaine de l'origine du culte, et il y a beaucoup de questions sans réponses. Outre la multitude d’artefacts visuels des mystères mithriaques, il reste peu de sources écrites. Il n'existe que des descriptions écrites par des auteurs chrétiens, qui n'étaient peut-être pas très friands de la concurrence mithriaque. Aux yeux du père de l'église Jérôme de Stridon, par exemple, les temples de Mithra étaient des lieux qu'il valait mieux détruire. Il ne subsiste aucune source écrite des membres des mystères de Mithra, mais cela est logique si l'on garde à l'esprit qu'il s'agissait d'un culte secret. Peut-être ne faut-il pas tant se concentrer sur la recherche d'une racine unique du culte. Nous devrions plutôt adopter une approche dynamique. Au sens figuré, nous devrions examiner de près les différentes branches des mystères mithriaques à différents endroits, et les différentes périodes de temps, ou «saisons», auxquelles ce culte fascinant a existé. (Cf. Witschel 2013 : 209)

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Bibliographie

  • Anonymous. Der Neue Pauly. J.B. Metzler: Stuttgart, Weimar, 2000
  • Christian Witschel. "Die Ursprünge des Mithars-Kults. Orientalischer Gott oder westliche Neuschöpfung." Imperium der Götter, edited by Badisches Landesmueum Karlsruhe. Badisches Landesmueum Karlsruhe, 2013, 480.

Traducteur

Caroline Martin
Française, ayant vécu au Royaume Uni pendant 20 ans, Caroline Martin est totalement bilingue. Lectrice passionnée depuis son plus jeune âge, elle a développé un amour de l'histoire qui remonte a ses années sur les bancs de l’école. Elle s'intéresse maintenant beaucoup à l'histoire en général et à la géopolitique.

Citer cette ressource

Style APA

Thomé, P. A. (2015, juin 10). Mithraïsme [Mithraism]. (C. Martin, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-13674/mithraisme/

Style Chicago

Thomé, Pierre A.. "Mithraïsme." Traduit par Caroline Martin. World History Encyclopedia. modifié le juin 10, 2015. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-13674/mithraisme/.

Style MLA

Thomé, Pierre A.. "Mithraïsme." Traduit par Caroline Martin. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 10 juin 2015. Web. 25 avril 2024.

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