Guerre des farines

Définition

Harrison W. Mark
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 14 mars 2022
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Disponible dans ces autres langues: anglais, espagnol
Alms to the Poor (by Martin Drolling, Public Domain)
L'aumône aux pauvres
Martin Drolling (Public Domain)

La guerre des farines désigne la série d'environ 300 émeutes qui secouèrent la France d'avril à mai 1775, en raison de la hausse du prix du pain. Les révoltes ne s'apaisèrent qu'après le déploiement de soldats, ce qui entraîna des centaines d'arrestations. C'est l'une des premières manifestations physiques des nombreuses crises qui conduisirent à la Révolution française (1789-1799).

Le prix du pain était d'une importance capitale pour les classes populaires françaises au crépuscule de l'Ancien Régime. Le pain constituait les trois quarts de l'alimentation de la plupart des gens ordinaires et, même en temps normal, les travailleurs les plus pauvres pouvaient dépenser jusqu'à la moitié de leurs revenus uniquement pour le pain. Par conséquent, même des augmentations modestes du prix du pain menaçaient de nombreuses personnes de mourir de faim, faisant des hausses soudaines des prix les moments les plus dangereux pour l'ordre public. La guerre des farines fut déclenchée lorsque le contrôleur général français Anne-Robert Jacques Turgot (1727-1781) qui croyait au laissez-faire, une approche non interventionniste de l'économie, supprima le contrôle du prix du pain. Cette décision combinée à une famine en 1774 entraînèrent une hausse du prix du pain, ce qui provoqua des émeutes.

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Bien que l'approvisionnement en pain se soit stabilisé après la guerre des farines, les émeutes furent l'une des premières grandes manifestations liées aux problèmes qui allaient provoquer la Révolution française. Pendant la Révolution elle-même, les émeutes du pain deviendront une forme courante de protestation et conduiront à des moments révolutionnaires clés tels que la marche des femmes sur Versailles en octobre 1789.

Contexte : Le droit inaliénable au pain

Dans les années 1700, les céréales étaient devenues la culture la plus populaire en France. Bien qu'il n'y ait pas eu de famine généralisée à l'échelle du pays au cours des six décennies précédant les années 1770, la faim localisée était toujours un problème et la peur de la famine avait suffi à susciter une obsession pour la culture des céréales. D'autres cultures à haut rendement comme le maïs et les pommes de terre étaient plus rarement cultivées car ces deux cultures nécessitaient beaucoup plus d'engrais que les céréales, ce qui s'avérait difficile à une époque où la plupart des troupeaux de bétail n'étaient ni assez nombreux ni assez bien nourris pour fournir un fumier adéquat. En dehors de l'Alsace et de la Lorraine où la pomme de terre était largement cultivée, de nombreux paysans français considéraient encore que la pomme de terre était impropre à la consommation animale, et encore moins humaine, et refusaient de la cultiver.

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Le roi de France devait veiller à ce que tous ses sujets aient accès au pain.

La popularité des céréales, combinée à l'absence d'accès constant à la viande dans les classes inférieures, faisait que le pain constituait une part importante du régime alimentaire des gens ordinaires. Le manque de diversification de l'agriculture française signifiait également que les mauvaises récoltes avaient un effet catastrophique. Bien que la France ait connu de nombreuses années de bonnes récoltes dans la première moitié du 18e siècle, à partir de la fin des années 1760, les récoltes devinrent plus incertaines et les rendements fluctuaient fortement. Entre 1770 et 1789, seules trois saisons de récolte furent abondantes partout en France. À chaque nouvelle génération, les terres agricoles des paysans étaient divisées entre les fils, de sorte qu'à la fin des années 1700, de nombreuses fermes de campagne étaient plutôt petites et donnaient donc des récoltes instables.

La crainte de la famine incita de nombreux paysans français à protéger leur accès au pain. L'idée que la capacité à se nourrir était un droit qui devait être protégé par les autorités était largement répandue. Pour cette raison, le roi de France fut longtemps surnommé "le premier boulanger du royaume" et devait veiller à ce que tous ses sujets aient accès au pain. Si ce droit n'était pas protégé, comme dans le cas de l'augmentation du prix du pain au-delà de ce que la plupart des gens pouvaient se permettre, beaucoup estimaient qu'il était de leur responsabilité morale d'agir. Cette pratique consistant à s'assurer que les biens nécessaires à la survie étaient accessibles à tous allait être connue sous le nom d'économie morale. La plupart des gens considéraient cette pratique différemment du vol pur et simple, car lorsque les prix étaient trop élevés, les émeutiers qui prenaient du pain ou des céréales laissaient souvent derrière eux le prix qu'ils estimaient juste, un concept connu sous le nom de taxation populaire. La thésaurisation en période de difficultés était également considérée comme un péché capital ; pendant la Révolution française, elle était punie de mort.

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Depuis le Moyen Âge, cette économie morale était soutenue par une série de réglementations au sein du marché des céréales, sauvegardées par les autorités françaises pour garantir l'accessibilité aux céréales. Ces réglementations comprenaient un contrôle sur les personnes qui pouvaient participer à la vente de céréales et des limitations dans les transactions commerciales. Les cultivateurs n'avaient pas le droit de s'impliquer davantage dans le marché des céréales, au-delà de la vente de leur production, de peur que certaines entités ne deviennent trop puissantes et ne monopolisent le commerce dans une région donnée. Par exemple, les boulangers pouvaient acheter suffisamment de céréales pour fabriquer leur pain, mais il leur était interdit de les revendre. Tous les échanges devaient se dérouler dans un forum public, et des réglementations garantissaient que les prix du pain restaient fixes et n'augmentaient jamais trop.

Turgot et les physiocrates

Le roi Louis XVI (1754-1793) monta sur le trône en mai 1774, tout désireux d'être aimé. Pourtant, la guerre des farines, qui éclata moins d'un an après le début de son règne et quelques semaines seulement avant son couronnement, constituait un début difficile pour le règne et la popularité du jeune roi. La guerre des farines trouve son origine dans l'une des premières actions de Louis en tant que roi, la nomination de l'économiste Anne-Robert Jacques Turgot, 47 ans, comme contrôleur général.

Turgot était un partisan de la théorie économique connue sous le nom de physiocratie qui prônait un système économique de laissez-faire. Les physiocrates pensaient qu'un individu travaillerait davantage pour son propre bénéfice que pour celui des autres, et que les travailleurs seraient plus productifs s'ils en tireraient un meilleur profit, ce qui profiterait aux consommateurs en fournissant une offre plus importante pour leur demande. Cette économie naturelle était inhérente à la loi de la nature et était voulue par Dieu. Les réglementations telles que celles du marché des céréales faisaient obstacle à cet ordre naturel et devaient donc disparaître afin que "l'économie puisse respirer l'air pur et capiteux de l'échange marchand" (Schama, 81).

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Anne-Robert Jacques Turgot
Anne-Robert Jacques Turgot
Antoine Graincourt (Public Domain)

Des mesures physiocratiques avaient été prises dans les années 1760 lorsque les ministres de Louis XV (r. de 1715 à 1774) avaient supprimé pour la dernière fois la réglementation des grains. Cette mesure fut presque immédiatement suivie d'une pénurie et d'émeutes localisées en 1767 et 1768, et la plupart des règlements avaient été rétablis en 1770. Quatre ans plus tard, Turgot, confronté à l'énorme tâche de redresser l'économie française, était toujours convaincu que la physiocratie pouvait fonctionner en France. Il pensait que le commerce et la fabrication s'épanouiraient sous ce système et c'est ainsi que, le 13 septembre 1774, Turgot abolit les réglementations et annonça le libre-échange des céréales.

La guerre des farines

L'édit de Turgot arrivait au mauvais moment, juste avant la mauvaise récolte de céréales de 1774. Bien que Turgot ait été informé des conditions défavorables de la récolte dès le mois d'août 1774, il refusa de reporter son décret. La récolte n'avait pas été aussi mauvaise que ça dans toutes les régions de France ; par conséquent, de nombreux marchands, qui n'étaient plus limités par la réglementation sur les céréales, commencèrent à acheter les céréales dans les régions qui s'étaient mieux comportées pendant la récolte et à les vendre dans les régions les plus touchées à des prix plus élevés. La tentative de ces marchands de s'accaparer le marché fit en sorte que les problèmes de pénurie alimentaire du printemps 1775 passèrent d'un problème affectant plusieurs régions à une urgence nationale. Pour cette raison, la guerre des farines qui s'ensuivit fut beaucoup plus étendue que les émeutes de 1767-1768. La famine commença très vite à affecter les gens, et bien que le gouvernement français ait ordonné des envois de nourriture de pays étrangers, ceux-ci n'arrivèrent pas assez vite.

Le 15 mars 1775, les premiers signes d'agitation furent visibles à Reims, la ville qui se préparait à accueillir le couronnement de Louis XVI au mois de juin suivant. Inquiète de la pénurie alimentaire, une foule d'environ 200 personnes se forma devant un monastère pour demander une réduction du prix du pain. Le monastère distribua du pain et la foule se dispersa sans violence. Un mois plus tard, alors que les prix continuaient à grimper, des troubles éclatèrent dans la région de Bourgogne lorsqu'un groupe d'émeutiers saccagea la maison d'un meunier qui avait été accusé de vendre de la mauvaise farine. Lorsque le meunier se réfugia chez un ami, les émeutiers saccagèrent également la maison de ce dernier, avant d'arrêter une péniche de grains et de forcer les marchands à vendre leur stock sur place.

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Les émeutiers, qui adhéraient à la taxation populaire, veillaient à ne pas voler le grain mais à laisser derrière eux la somme qui leur semblait équitable.

Cependant, la guerre des farines ne prit véritablement son essor qu'à Beaumont-sur-Oise, un village de la région parisienne. Le 22 avril, 1 setier (4,43 boisseaux) de blé et de seigle était vendu au prix élevé de 26 livres sur le marché du village. Les villageois se plaignaient d'un tel prix mais le payaient quand même s'ils le pouvaient. Cinq jours plus tard, le 27 avril, le marché semblait être bien approvisionné et les villageois pensaient que cela signifiait que les prix avaient baissé. Loin de bénéficier d'une réduction, les villageois furent choqués de voir que le grain était maintenant vendu à 32 livres par setier. Outrés, des disputes éclatèrent entre les villageois et les marchands qui se transformèrent bientôt en émeutes. Les émeutiers chassèrent les marchands de leurs étals et saccagèrent leurs étalages. Les émeutiers, qui adhéraient à la taxation populaire, s'assuraient de ne pas voler le grain mais de laisser derrière eux la somme d'argent qu'ils estimaient être le juste prix à payer, qui dans ce cas était de 12 livres par setier. Après avoir pris ce dont ils avaient besoin, l'émeute se calma d'elle-même, et la plupart des gens rentrèrent chez eux avant que les autorités n'aient eu le temps de réagir.

Tôt le lendemain matin, 11 personnes de Beaumont-sur-Oise se rendirent dans la ville de Méru et racontèrent aux habitants ce qu'ils avaient fait. Lorsque le marché de Méru ouvrit ses portes quelques heures plus tard, les habitants suivirent l'exemple de leurs voisins et se précipitèrent pour piller les céréales. La foule était composée principalement de femmes, elles déchirèrent les sacs à l'aide de couteaux et ramassèrent autant de grains qu'elle le purent dans leur tablier pour les ramener chez elles. La nouvelle de cette émeute se répandit et, le lendemain, dans la ville de Pontoise, plus d'une centaine de personnes interceptèrent et saccagèrent plusieurs charrettes de grains, tout en mettant à sac les maisons de six éminents marchands de grains et de farine.

The Burned Farmer or the Poor Family
Le Fermier brûlé ou la famille pauvre
François Philippe Charpentier (Public Domain)

Dans les jours qui suivirent l'émeute initiale du 27 avril, des soulèvements similaires s'étendirent à d'autres villes de la région parisienne, dont le nombre et l'intensité augmentèrent de jour en jour. Comme le dit succinctement l'universitaire Cynthia Bouton, "une fois attisée, la conflagration se propagea rapidement et dans de nombreuses directions à la fois" (Bouton, 92). De leur confinement relatif dans le Bassin parisien, les émeutes s'étendirent au nord jusqu'en Normandie. Le 3 mai, une émeute particulièrement intense éclata à Vernon, en Normandie, lorsque des émeutiers attaquèrent un important magasin de grains et de farine. Comme leurs compatriotes d'autres villes françaises, les émeutiers de Vernon exigèrent une baisse des prix, et lorsqu'ils commencèrent à devenir violents, le commis du magazine ferma et verrouilla la porte, refusant toute vente supplémentaire. Les émeutiers se mirent alors à attaquer les portes verrouillées avec des ciseaux, des couteaux et même des masses. Ils refusèrent de s'arrêter, même après l'arrivée de la police qui répondit en tirant sur la foule et en blessant 6 personnes. Cela ne fit qu'enrager la foule qui jeta des pierres sur les fenêtres et attaqua trois moulins avant de se disperser.

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Le 6 mai, les émeutes quotidiennes atteignirent leur apogée, avec 14 marchés et 42 villages différents ce jour-là. Les troubles commençaient également à se propager dans les campagnes où des brigands envahirent et saccagèrent des terres appartenant à de simples fermiers. Ces attaques étaient toutefois l'exception, car la plupart des émeutiers concentraient leurs efforts et leur colère sur les profiteurs, tels que les riches meuniers ou les membres des parlements. De nombreux émeutiers adhéraient encore à la taxation populaire et continuaient à laisser derrière eux 12 livres par setier, même s'ils saccageaient les étals des marchands. Le 11 mai, la plupart des émeutes étaient terminées.

Émeutes à Versailles et réponse de la Couronne

Le 2 mai, quatre jours avant le point culminant de la guerre des farines, on signala au roi que des milliers d'émeutiers marchaient sur Versailles. Bien qu'une histoire ait circulé par la suite selon laquelle Louis XVI aurait courageusement ouvert les portes de Versailles aux émeutiers, aurait fait face à la foule sur un balcon, l'aurait calmée avec des paroles paternelles sympathiques, et aurait été accueilli par des cris de joie de Vive le Roy !, cette chaîne d'événements est vraiment peu probable. Les rapports de police semblent indiquer que non seulement la famille royale fut évacuée Versailles pour se réfugier à Fontainebleau, mais que les émeutiers ne se dirigèrent même pas vers le palais. Au lieu de cela, ils se dirigèrent vers les réserves de farine royales.

Louis XVI of France
Louis XVI
Joseph-Siffred Duplessis (Public Domain)

Les reserves royales contenaient plus de 900 sacs de farine, dont certains étaient périodiquement expédiés aux boulangers jusqu'à Paris. 5 000 émeutiers réussirent à piller la moitié de ces sacs avant que les gardes royaux n'arrivent pour les disperser. Pour faire rentrer les émeutiers chez eux sans violence, et craignant qu'ils ne s'attaquent encore au château lui-même, le prince de Poix, gouverneur militaire de Versailles, promit à la hâte de baisser le prix de la farine à 2 sous la livre. Cette mesure eut pour effet de calmer les foules, mais la nouvelle de cette nouvelle réduction se répandit rapidement dans tout Paris. Le prince de Poix fut ensuite réprimandé par Turgot pour avoir porté atteinte à son édit.

Le 3 mai, à 8 heures du matin, des émeutiers venus des villages des environs de Paris entrèrent dans la ville et dévalisèrent des centaines de boulangeries. Jusque-là, les autorités parisiennes avaient pris peu de mesures ; le lieutenant général de police, Jean-Charles-Pierre Lenoir, avait seulement alerté le guet mais n'avait posté aucune garde et déployé aucune troupe, malgré les multiples villes de la région parisienne en proie à des émeutes. Ce n'est qu'après les émeutes parisiennes du 3 mai que les autorités françaises mirent en place une réponse coordonnée. Dans les jours qui suivirent, environ 25 000 soldats furent mobilisés, certains étant envoyés pour patrouiller dans la campagne tandis que d'autres gardaient les marchés et les portes des boulangeries. Sous la protection des soldats, la police fut alors libre de commencer à arrêter des suspects.

Espérant que les choses se calmeraient à Reims à temps pour le couronnement du roi, Turgot ordonna la mobilisation des ateliers de charité de la ville et le long de la route de Paris pour fournir du travail aux roturiers mécontents. Le 5 mai, Louis XVI appella officiellement à une répression rapide et sévère des émeutes, et le 9 mai, il offrit une amnistie générale à tous les émeutiers qui rendraient leurs biens volés en nature ou en espèces, à l'exception des chefs ou des instigateurs. En raison de la réponse de la Couronne ainsi que d'une perte de vitesse générale, la guerre des farines se termina avant le 11 juin 1775, date du couronnement de Louis XVI, bien que le mécontentement soit resté élevé tout au long de l'été avant que l'approvisionnement ne se rétablisse complètement.

Conséquences et héritage

Comme le roi l'avait promis, la répression du gouvernement contre les émeutiers de la guerre des farines fut effectivement sévère, du moins si on la compare aux émeutes alimentaires de moindre ampleur précédentes. Lors des émeutes précédentes, les arrestations ne se comptaient généralement que par dizaines, avec peu de poursuites et des punitions légères. Dans les jours qui suivirent la guerre des farines, la police arrêta 548 personnes pour leur rôle dans les troubles, 92 % des arrestations ayant eu lieu en région parisienne. Les autorités françaises recherchèrent les meneurs et les instigateurs pour en faire des exemples, et peu d'entre eux nièrent leur implication. Parmi les chefs d'émeute reconnus coupables, deux furent condamnés à la pendaison, 15 à la servitude comme galériens (dont cinq à vie) et neuf à la prison royale.

Turgot vit les émeutes comme une attaque contre sa position et le concept même de physiocratie. Des pamphlets attaquant ses édits circulèrent dans tout le royaume cet été-là, ce qui amena Turgot à voir des ennemis partout et à se convaincre que la guerre des farines n'était rien d'autre qu'une conspiration élaborée où les gens faisaient semblant d'avoir faim pour l'embarrasser, lui et sa politique. Nombre des personnes arrêtées furent soumises à des interrogatoires sur cette prétendue conspiration visant à saper le libre-échange, mais ces interrogatoires ne révélèrent absolument rien. Turgot tenta de sauver la face en rejetant la responsabilité sur d'autres personnes, demandant et obtenant la démission du lieutenant-général de police Lenoir, mais il est clair que son expérience physiocratique avait échoué pour le moment. Un an plus tard, Turgot lui-même serait renvoyé du cabinet du roi, pour des raisons diverses et variées.

The Self-Sacrifice of a Father
Le sacrifice d'un père
Jacques Sablet (Public Domain)

Bien que Louis XVI ait essayé de faire preuve de solidarité avec les pauvres en mangeant du pain maslin, un mélange de blé et de seigle, plutôt que du pain blanc manchet de l'élite, beaucoup le rendirent responsable des pénuries alimentaires. Certains adoptèrent même la théorie de la conspiration du Pacte de famine, selon laquelle le roi et d'autres groupes d'intérêt gardaient délibérément les céréales loin des masses afin de mieux les contrôler. Alors que les classes inférieures blâmaient le roi, les classes supérieures attribuaient les émeutes à la décadence morale des pauvres, estimant que ces derniers souhaitaient le chaos pour le chaos. Les tensions sociales exacerbées par la guerre des farines ne feraient que s'aggraver au cours de la décennie suivante.

La guerre des farines ne fut en aucun cas la première, ni la plus importante émeute de la faim du 18e siècle. C'est une affaire relativement peu sanglante, à l'exception des deux exécutions, et qui ne changea rien au statu quo. Pourtant, survenant si peu de temps après l'ascension de Louis XVI, la guerre des farines semble être l'un des premiers signes avant-coureurs d'une agitation profonde, non seulement dans certaines régions de France, mais aussi dans la majeure partie du royaume. Au cours des années suivantes, les récoltes ne s'améliorant pas, les émeutes du pain deviendront plus fréquentes, l'une d'entre elles éclatant dans les provinces du sud en 1778, ainsi qu'en Normandie en 1784 et à nouveau en 1785. On peut donc dire que la guerre des farines fut comme la première bruine qui précéda l'orage de la Révolution française.

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Harrison W. Mark
Harrison Mark est diplômé de SUNY Oswego où il a étudié l'histoire et les sciences politiques.

Citer cette ressource

Style APA

Mark, H. W. (2022, mars 14). Guerre des farines [Flour War]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-20621/guerre-des-farines/

Style Chicago

Mark, Harrison W.. "Guerre des farines." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le mars 14, 2022. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-20621/guerre-des-farines/.

Style MLA

Mark, Harrison W.. "Guerre des farines." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 14 mars 2022. Web. 24 avril 2024.

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